L’indice de durabilité, mesure phare de la politique pour un numérique responsable, est retoqué par l’UE

09 novembre 2023 à 09h44
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L’indice de durabilité français est mis sur pause © Prostock-studio / Shutterstock
L’indice de durabilité français est mis sur pause © Prostock-studio / Shutterstock

Même pas encore entré en vigueur officiellement, l’indice de durabilité est déjà dans une impasse. Bruxelles a jugé que cet outil de lutte contre la pollution du numérique était contraire au droit européen.

Il devait remplacer le désormais célèbre « indice de réparabilité », il se fera attendre. L’indice de durabilité, prévu par l’article 16 de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) de 2020, vient de recevoir un coup de semonce de la Commission européenne. Comme l’a révélé le média l’Informé, les commissaires européens ont jugé que le texte français n’est pas compatible avec le droit de l’Union.

Qu'est ce que l'indice de durabilité ?

Préparé de longue date, ce nouvel indice devait aider les consommateurs et consommatrices à choisir les appareils les plus réparables (comme l’indice de réparabilité le fait aujourd’hui), mais aussi les plus fiables, durables et robustes. En ce sens, il étendait l’assiette des critères pris en compte dans l’indice de réparabilité pour prendre en compte la garantie, le suivi logiciel, l’évolutivité et tout un tas d’autres critères.

Son entrée en vigueur devait se faire au premier janvier 2024 avec des délais d’application différents sur chaque catégorie de produits. Cela ne sera donc pas le cas puisque la publication d’un texte au journal officiel est empêchée jusqu’en février 2024 et la France va devoir réviser ses textes d’ici là si elle veut rentrer dans les clous.

La raison pour laquelle les foudres de la commission se sont abattus sur ce texte est toute simple : l'UE travaille également sur un indice de durabilité au niveau européen et les critères retenus par Paris et Bruxelles ne semblent pas compatibles. Plus précisément, c’est la coexistence des deux indices qui pourrait être contraire au droit de l’Union selon l’Afnum, une alliance qui regroupe des gros bonnets de l’industrie comme Apple, Google, Microsoft, Amazon et Samsung.

Un risque de retour en arrière ?

Dans un courrier publié le 6 octobre dernier, le groupe va même plus loin et tire à boulets rouges sur certains des critères de l’indice français. Selon les industriels membres du regroupement, certaines mesures comme l’obligation de différencier les mises à jour de sécurité des mises à jour fonctionnelle ou la possibilité d’installer un système d’exploitation alternatif « ne représentent pas une valeur ajoutée évidente pour environnement ». Les fabricants craignent aussi que l’indice ne viole la directive européenne sur les secrets industriels en les obligeant à dévoiler des informations protégées telles que « les tests d’abrasion pour les smartphones et les tests accélérés de dalle pour les téléviseurs ».

Ce délai dans la mise en place de l’indice de durabilité inquiète l’association Halte à l’Obsolescence programmée qui craint que cela ouvre « une opportunité pour les industriels de revoir à la baisse cet indice ». Le projet européen étant toujours en débat, le processus de négociations pourrait revenir sur des points pourtant acquis dans l’indice de durabilité français. La prise en compte du prix des pièces détachées est notamment citée, alors qu’un combat de longue haleine avait permis « l’obtention de critères ambitieux » sur le sujet.

Source : L'Informé

Corentin Béchade

Journaliste depuis quasiment 10 ans, j’ai écumé le secteur de la tech et du numérique depuis mes tout premiers chapôs. Bidouilleur (beaucoup), libriste (un peu), j’ai développé une spécialisation sur...

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Journaliste depuis quasiment 10 ans, j’ai écumé le secteur de la tech et du numérique depuis mes tout premiers chapôs. Bidouilleur (beaucoup), libriste (un peu), j’ai développé une spécialisation sur les thèmes de l’écologie et du numérique ainsi que sur la protection de la vie privée. Le week-end je torture des Raspberry Pi à grands coups de commandes 'sudo' pour me détendre.

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Commentaires (6)

nicgrover
Je n’ose imaginer le lobbying de certaines grandes marques pour faire capoter cet aspect de la loi.
philouze
ça pue le lobying, faut dénoncer ça
gaadek
Punaise, certains dirigeants européens sont de vrais imbéciles et devraient se reconvertir.<br /> l’obligation de différencier les mises à jour de sécurité des mises à jour fonctionnelle ou la possibilité d’installer un système d’exploitation alternatif « ne représentent pas une valeur ajoutée évidente pour environnement ».<br /> Donc, un smartphone dont les MAJ de sécurité ne sont plus disponibles ne pose pas de problème? Franchement, moi ça me dérange qu’on puisse exploiter une faille non corrigée pour aller voler mes données personnelles<br /> Et quand un fabricant ne propose plus de mise à jour du système, pouvoir se tourner vers des solutions open source (lineage OS) permet de continuer d’utiliser l’appareil et donc évite l’achat d’un nouveau.<br /> Ca me débecte de lire que certains décideurs européens trouvent ça inutile.
sylvebarbe78
Et ça vous étonne ?
Gandalf67
Petits arrangements entre amis…
COVINA
Quand on qualifie «les tests d’abrasion pour les smartphones et les tests accélérés de dalle pour les téléviseurs » de secrets industriels, je pense qu’il manque un déterminant, c’est plutôt les «&nbsp;secrets des industriels&nbsp;» qui ne veulent surtout pas que cela se sache.
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