Hubert Reynier, Greenwich : "Il ne faut pas sous estimer les opérateurs"

03 août 2005 à 00h00
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Co-Fondateur de Greenwich Consulting, Hubert Reynier évoque l'avenir de la convergence numérique à l'heure du "Triple Play" et de la téléphonie universelle

JB - Hubert Reynier, bonjour. En quelques mots, pourriez vous présenter votre parcours ?

HR - Bonjour. J'ai un double profil car diplômé de Telecom Bretagne et d'un MBA à Yale. Après avoir été en charge de projets internationaux chez Ascom, un équipementier suisse, j'ai rejoins la branche conseil d'Ernst & Young, rachetée par la suite par . En septembre 2001, j'ai décidé de créer, avec trois associés, la société Greenwich consulting.

JB - Quel est votre métier ? Aider les opérateurs fixes ou mobiles à mieux appréhender la convergence de l'informatique, de l'audiovisuel et des télécoms ?

HR - Greenwich consulting est à mi chemin entre une société de conseil en stratégie, avec des compétences en marketing ou en CRM, et une société de conseil en management. Cette double culture nous permet d'accompagner le développement de nos clients, qui sont effectivement les acteurs majeurs européens des telecoms (mobile, fixe et internet) et medias, opérateurs et constructeurs.

JB - Que leur conseillez vous concrètement ?

HR - Nous avons été sollicités en 2004 par un opérateur de télécommunications pour l'accompagner dans sa réflexion autour du multimedia mobile afin d'augmenter sa part de marché et ses revenus en s'appuyant sur les nouveaux services autour de l'image, de la musique ou de la télévision.

La convergence a également un impact sur la distribution et nous aidons un opérateur à décliner sa nouvelle stratégie commerciale dans ses propres points de vente, dans les réseaux de partenaires franchisés ou dans la grande distribution. Il faut également former les vendeurs, modifier leur intéressement sur les ventes ou s'assurer que le système d'information ou la logistique seront à la hauteur.

Nous avons également remarqué que l'arrivée du multimédia mobile était un défi pour les centres d'appel et le support client. Nous recommandons de distinguer clairement un niveau 1, en charge des questions basiques et qui peut éventuellement être implanté à l'étranger, et un niveau 2, pour répondre aux questions des utilisateurs avancés, qui doit obligatoirement bénéficier de personnels mieux formés, plus compétents mais également plus exigeants en terme de rémunération.

JB - En tant que société de conseil, quel regard portez vous sur l'évolution des opérateurs fixes avec le "Triple Play" et l'arrivée d'offres de téléphonie universelle comme BT fusion en UK ou FT HomeZone en France ?

HR - L'arrivée des boîtiers multiservices, capables de proposer de l'internet, de la téléphonie, de la télévision et demain de la téléphonie mobile avec un combiné WiFi/GSM est un défi non seulement technique mais également marketing pour les opérateurs. Il faut cependant distinguer clairement les opérateurs alternatifs - pour qui ce type de packages "low cost" leur permet de capter une part des communications passées avec un téléphone mobile depuis son domicile - et des opérateurs dominants pour qui de telles formules "tout en un" pourraient être destructrices de valeur.

De plus en plus de fournisseurs d'accès "Triple Play" réfléchissent à l'idée de devenir MVNO mais je ne pense pas que les opérateurs, qui ont investi dans leur propre réseau cellulaire, soient pressés de voir apparaître ce type de concurrence...

JB - Vous pensez qu'il y a un avenir pour les MVNO ?

HR - Je pense qu'on verra les MVNO évoluer de la même manière que les ISP à la fin des années 90. Certains fournisseurs d'accès n'étaient que des marques qui souhaitaient renforcer leur présence sur un nouveau média tandis que d'autres sont devenus, comme Free, de véritables opérateurs alternatifs en investissant leurs marges dans la constitution de leur propre réseau.

Actuellement, les MVNO attaquent des niches marketing comme les régions ou les jeunes, que les grands opérateurs ont du mal à toucher, mais pour se développer, ils doivent certainement réfléchir à des alliances avec des fournisseurs d'accès et investir dans leur propre réseau et leur propre support client.

JB - Les MVNO sont souvent tributaires du réseau cellulaire GSM. Croyez vous qu'un opérateur alternatif puisse miser sur le WiFi ou le MESH networking ?

HR - Il faut être technologiquement agnostique et les deux dernières années ont démontré que les trois grands opérateurs avaient rapidement su se réapproprier la technologie Wifi malgré le lancement d'une multitude de "Wireless ISP" dont les capacités d'investissement étaient très limitées. Pour le moment, je suis donc assez sceptique à l'idée de voir naître un opérateur global, misant sur le mesh networking ou le WiFi, pour court-circuiter les grands réseaux cellulaires. Le parc de terminaux Wifi est néanmoins en train de se démocratiser et il y a peut-être une niche de marché à explorer, par exemple sur le marché entreprises.

JB - Quel regard portez vous sur une nouvelle génération d'opérateurs "alternatifs" comme Skype ou peut-être demain MSN et ?

HR - Cette nouvelle catégorie d'acteurs est clairement identifiée par les opérateurs fixes et commence à le devenir par les opérateurs cellulaires pour les zones couvertes en WiFi. Ils poussent l'opérateur à choisir entre un positionnement de simple fournisseur d'infrastructure et un positionnement de fournisseur de service, conservant la relation client.

Leur développement est possible sur ligne fixe, où les infrastructures sont amorties et où les opérateurs proposent des forfaits illimités. Une fois encore, il ne faut pas sous estimer la capacité de réaction des opérateurs qui proposent déjà leurs propres logiciels de voix sur IP.

JB - Messagerie, Imagerie, Jeux, Musique, Télévision : C'est à l'opérateur mobile de tout proposer à ses clients ?

HR - Après avoir révolutionné les fournisseurs d'accès, le "Triple Play" touche effectivement depuis quelques mois les opérateurs mobiles qui peuvent désormais proposer de la téléphonie, un accès internet et de la télévision grâce à de nouveaux réseaux haut débit mobiles mais également grâce à de nouveaux terminaux multimedia qui, après avoir cannibalisé le PDA ou l'appareil photo, s'attaquent à la console du jeu ou au baladeur.

Je pense que les opérateurs ont actuellement tendance à proposer eux même tous ces services pour lancer ces marchés. Mais une logique de kiosque se développe et va coexister avec les offres opérateurs

Qu'elle soit sur ligne fixe ou mobile, la convergence est en tout cas l'occasion d'une immense redistribution des cartes et les intermédiaires ne créant pas beaucoup de valeur doivent s'interroger rapidement sur leur positionnement.

Quelle que soit l'évolution des télécoms ou des médias, Greenwich consulting restera en tout cas au cœur de cette convergence numérique afin de les aider à prendre les bonnes décisions et les accompagner dans leur mise en œuvre.

JB - Hubert Reynier, je vous remercie.
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