Thylacine, mammouth laineux et dodo : cette entreprise de biotechnologie veut tous les ressusciter

Maxence Glineur
Publié le 04 février 2023 à 10h00
© bergslay / Pixabay
© bergslay / Pixabay

Des scientifiques veulent se consacrer à l'oiseau qui a disparu depuis quelques siècles, avec pour objectif (entre autres) de sensibiliser le public à l'extinction progressive de nombreuses espèces.

L'être humain a un impact non négligeable sur la faune et la flore qui l'entourent depuis plus de 12 millénaires. Cependant, la civilisation humaine a considérablement accéléré son développement, modifiant de plus en plus de territoires et affectant la planète dans sa globalité. La biodiversité subit de plein fouet les conséquences de cette expansion, à tel point que l'on parle aujourd'hui d'une 6e extinction de masse, directement causée par les activités humaines. L'histoire du dodo en est sans aucun doute l'un des exemples les plus frappants.

Recréer un génome à partir d'espèces apparentées

Vivant sur l'île Maurice, le dodo n'a jamais été confronté à la prédation. Lorsque les Européens sont arrivés sur son territoire au XVIIᵉ siècle, très docile et peu méfiant, ce gros oiseau a rapidement été exterminé, directement et indirectement par les humains et les autres espèces introduites. La société Colossal Biosciences a demandé à la biologiste Beth Shapiro et à son équipe de mener des travaux visant à sa « dé-extinction ».

Cette dernière explique qu'il sera impossible de ramener une copie identique de l'oiseau. Mais puisqu'il est génétiquement proche d'autres espèces encore vivantes, comme le pigeon de Nicobar ou le solitaire de Rodrigues, il sera possible de comparer différents génomes pour identifier les mutations particulières qui font que le dodo ressemble à un dodo. À partir de là, il serait possible d'en recréer un.

Il existe cependant une complication non négligeable : la plupart des technologies de clonage et d'édition de gènes sont orientées vers les mammifères. Mettre un embryon cloné dans un œuf pour faire éclore une nouvelle génération constituera une prouesse scientifique susceptible de prendre beaucoup plus de temps que la reconstruction du génome lui-même. Mais, Shapiro reste optimiste : « Nous savons que nous pouvons cultiver ces cellules chez certaines espèces, donc nous savons que nous pouvons y arriver. Maintenant, il nous faut faire toutes les expérimentations. »

Une démarche qui ne se limite pas aux laboratoires

Dès qu'il s'agit de travailler sur le génome, des questions éthiques
émergent. Tom Gilbert, directeur du Centre d'hologénomique évolutive de
l'université de Copenhague, a expliqué à Vice que la reconstitution
d'une espèce n'est que le début du processus. Il subsiste des questions
autour de ce qui est considéré comme un dodo ou non. « Que
mesurons-nous ? La similarité génomique ? La similarité physique ? La
similarité dans la niche qu'il remplit et ce qu'il fait, même s'il n'a
pas la même apparence ? Par exemple, si vous pouvez faire en sorte qu'un éléphant puisse vivre dans le froid et se comporte comme un mammouth... est-ce suffisant ?
»

Cela soulève la question de savoir si cela en vaut la peine. Ici non plus, ce n'est pas tout noir ou tout blanc. Parfois peut-être, mais dans d'autres cas, l'environnement est déjà tellement modifié que l'espoir de voir des populations vivre librement est loin d'être réalisable.

L'universitaire relativise toutefois la situation en observant que, même s'il peut être difficile de réintroduire de telles espèces, ce serait un moyen efficace de sensibiliser le public à la situation critique d'espèces en voie de disparition. Un sentiment partagé par Shapiro : « Puisque tout le monde pense à l'extinction et au dodo simultanément, c'est l'occasion de sensibiliser un peu plus le public sur ce qu'il se passe. »

Holocene Park

Depuis 2021, Colossal est également impliquée dans la réintroduction du mammouth laineux et du thylacine (ou tigre de Tasmanie). Elle espère être à l'origine de nouvelles technologies aux multiples applications qui permettraient la reconstitution d'écosystèmes menacés ou disparus, mais également la préservation des espèces menacées d'extinction.

Ben Lamm, le dirigeant de la société, explique : « Il y a beaucoup d'avantages du point de vue de la préservation, dans la mesure où nous pouvons apprendre du réensauvagement. » Il conclut : « Toute technologie que nous développons et qui a des applications en matière de protection de l'environnement, nous voulons la subventionner et la donner au monde. » Bien sûr, toute ressemblance avec la saga Jurassic Park est fortuite. Quoique… les oiseaux, comme le dodo, sont bien les descendants des dinosaures…

Source : Vice

Maxence Glineur
Par Maxence Glineur

Geek hyper connecté et féru de podcasts, je suis toujours en train de lire ou écouter des points infos en tout genre. Entre histoire, tech, politique, musique, jeux-video et vulgarisation scientifique : toute l'actualité (ou presque) attise ma curiosité. Sinon, j'aime le rock et le lofi, les game-nights toujours trop longues, les bons films et les nanards.

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bennukem

Ouf, à un moment j’ai eu peur que « belle maman » soit dans la liste des bestioles à ressusciter.

fg03

« avec pour objectif (entre autres) de sensibiliser le public à l’extinction progressive de nombreuses espèces »
J’ai plutôt l’impression que c’est l’objectif contraire !
A montrer qu’on peut impunément rescusciter n’importe quel espèce, que reste t-il de sacré ? On peut éteindre toutes les espèces comme bon nous semble et jouer à Dieu pour les rescusciter quand on en aura envie.
Je pense plutôt que le but est de montrer que l’espèce humaine adore jouer aux apprentis sorciers pour le meilleur et surtout pour le pire.
Enfin bon ca pose d’autres questions importantes d’ordre morale et éthique ? ou encore sur le risque de faire revenir des virus ou autres maladies autrement plus virulentes et léthales qui avaient disparu.

Wifi93

En plus du DODO, on pourrait nous faire un T-REX et quelques Raptors ? Histoire de dépenser sans compter et voir jusqu’où on peut aller.

SPH

Ca barde ici :fearful:

Vankovic

Oui, non, bon. Pourquoi et pourquoi pas ?
Recréer des espèces que nous avons fait disparaitre, ça pourrait s’envisager…
Mais où sera la limite éthique à ne pas dépasser ? Je pense qu’on devrait consacrer plus d’argent et d’énergie à maintenir la faune que nous sommes en train d’éradiquer.
Parce qu’il n’y a pas que la mégafaune qui disparait. Nombre d’espèces de petites tailles sont en extinction accélérée.
On trouve la baleine et l’éléphant « sympathique » (quoi qu’avoir un éléphant furax devant soi doit être tout sauf rassurant et réjouissant), mais la biodiversité est étroitement intriquée avec toutes les espèces.
Et l’article ne donne pas le but final de ces expérimentations. Parce que derrière ce genre d’expérience, il y a forcément de l’argent, beaucoup d’argent, à récupérer comme à dépenser.

Blackalf

Le problème, c’est que si tellement d’espèces animales se sont éteintes, c’est souvent parce que leur écosystème a été bouleversé ou détruit par l’homme. Alors quelle serait leur place dans le monde d’aujourd’hui ?

Si l’on recréait une espèce dont la source de nourriture a elle aussi disparu, il faudrait donc recréer également cette source. Exemple typique, si le koala avait disparu et qu’on veuille le recréer mais qu’il n’y a plus d’eucalyptus sur la planète, que mangerait-il ?

Et si on le modifie génétiquement pour qu’il mange autre chose, ce ne serait plus vraiment un koala, et il pourrait même devenir une espèce invasive s’il s’attaque aux sources de nourriture d’autres espèces. Bref, une fois de plus, des scientifiques risquent de jouer aux apprentis-sorciers.

Marc_Lupin

« c’est souvent parce que leur écosystème a été bouleversé ou détruit par l’homme ».

Ou par la nature elle-même sinon on se baladerais encore au milieu des dinos voir même on n’existerait pas le problème de l’être humain c’est qu’il croit pouvoir tout résoudre et être responsable de tout d’un coup je me flagelle méchant méchant être humain et après boaa bougez pas les gars on va trouver une solution tout en se matant le nombril évidemment .Malheureusement ça ne marche pas a tout les coups surtout de nos jours ou toutes ces belles promesses ne sont là pour la plupart que pour faire du pognon .Sinon sur la forme je suis d’accord avec toi…:point_up_2:

Comcom1

Faux, l’homme n’est pas responsable de l’extinction de toutes les espèces disparues.

ypapanoel

De toutes, non c’est sûr. Mais ça tombe bien : ce n’est pas ce qu’il a écrit

Comcom1

à l’échelle de la vie de la planète, « souvent » n’est pas non plus adapté