Live Japon : Karpelès et les médias nippons

23 août 2015 à 17h35
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L'image des Français au Japon n'en sortira pas grandie : après déjà plus de 20 jours dans une cellule d'un commissariat japonais, Mark Karpelès, "geek" originaire de la région de Dijon, s'apprête à quelques semaines de plus d'interrogatoire avant une possible inculpation.
L'homme (30 ans) était patron de feue MtGox, une société de gestion d'une plate-forme d'échange de monnaie virtuelle bitcoin. Cette firme sise au Japon a fait faillite l'an dernier après la disparition encore mystérieuse de centaines de milliers de ces bitcoins. L'enquête semblait piétiner et l'affaire presque éteinte. C'était sans compter sur la pugnacité des enquêteurs nippons qui ne lâchent pas le morceau, surtout quand les soupçons finissent par se concentrer sur un seul et même personnage.

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M. Karpelès, qui (aux dires d'ex-employeurs) n'a déjà pas laissé une excellente impression en France lorsqu'il l'a quittée il y a quelques années, a été arrêté le 1er août sur des accusations de manipulation de données informatiques. La police ne parle qu'aux médias nippons en catimini, mais les prévient quand même avant de ses mouvements de sorte que les photographes ont pu être sur place pour immortaliser les scènes spectaculaires. C'est ainsi qu'on a vu notre compatriote se faire embarquer vêtu d'un célèbre mais en ces circonstances honteux T-Shirt bleu "Effortless french",  une image qui n'est pas des plus valorisantes pour notre nationalité aux yeux des médias japonais qui peuvent ainsi se délecter à satiété.

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Il est clair que dans ce genre de cas les médias nippons s'en donnent à coeur joie pour montrer l'individu sous son pire jour. L'affaire MtGox les avait déjà pas mal occupés l'an passé au moment de la banqueroute de la plate-forme, quand le M. Karpelès en question tentait une "conférence de presse d'excuses" à la façon japonaise entouré de son avocat, un exercice difficile à improviser pour des non-Nippons. Cette fois son arrestation et toutes les charges qui semblent peser sur lui vont une fois de plus renforcer la conviction de certains que « les étrangers sont une poisse, un danger, une menace pour la sécurité et l'homogénéïté de la société japonaise ». Et même si on peut aisément rétorquer qu'il n'y a pas besoin d'appeler des gens de l'extérieur pour dénombrer des milliers de "yakusas" et autres escrocs, le fait est que là, dans ce cas hypermédiatisé, c'est un Français qui selon eux s'est mal comporté, a fauté. Car ici, la présomption d'innocence n'existe pour ainsi dire pas. C'est même procès (celui des médias, celui de la justice) et double-peine. On pourrait même dire "triple", car les internautes ne se privent pas non plus de se payer sa tête (comme ils le font aussi avec des Japonais qui ont fauté) en couplant joyeusement la culpabilité présumée à la nationalité.

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M. Karpelès donc est en passe de séjourner 20 jours de plus avec des policiers qui sont en train d'acquérir la conviction qu'il a détourné des fonds et pas qu'un peu, l'équivalent de près de 2,5 millions d'euros. Il aurait aussi à des fins personnelles tout ou partie de ces dépôts de ses clients informatiquement captés.
C'est en analysant scrupuleusement les données informatiques (ou les traces qu'elles ont laissées) que les limiers japonais reconstituent peu à peu les pièces du puzzle qui montrerait qu'entre mars 2011 (date à laquelle il a repris la plate-forme) et septembre 2013, même si M. Karpelès n'a en réalité effectué aucune opération de dépôt ni retrait sur ses comptes en bitcoins et liquide, leur solde a grimpé.

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« Les accès frauduleux à la plate-forme pour élever le solde des comptes ont été effectués à au moins 30 reprises », a écrit récemment le quotidien à grand tirage Yomiuri, citant les enquêteurs. « Pour toutes ces intrusions internes, M. Karpelès, qui disposait des droits d'accès, est le suspect numéro 1 », a précisé le journal, ajoutant que le but des transactions était vraisemblablement de réaliser des gains pour soutenir d'autres activités de la société Tibanne gérée par le même M. Karpelès.
Pour parvenir à leurs fins, les policiers ont apparemment été forcés de développer un logiciel d'analyse particulier, selon les médias nippons, ce qui montre qu'ils ont bel et bien l'intention d'élucider totalement l'histoire de la disparition des bicoins que M. Karpelès a initialement imputée à une énorme attaque informatique. A ce stade, on ne peut pas dire qu'elle n'a pas eu lieu, mais même si l'intéressé nie être impliqué dans les opérations frauduleuses dont il est soupçonné, il paraît certain que la police nippone a agi en ayant accumulé une grande quantité d'éléments concordants.

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Le visage et le profil de l'individu qui se dessinent ainsi dans la presse nippone sont moins "bon enfant" que ceux présentés par des médias français décrivant l'individu sous les traits d'une sorte de génie incompris qui aurait appris le japonais (la 5e langue la plus difficile du monde) en 30 jours. L'homme a un pouvoir de conviction qui dépasse l'entendement pour réussir à faire avaler de telles sornettes à ses interlocuteurs. Mais les flics nippons sont, eux, sont plus durs d'oreille !
A suivre...
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