Les guichets de vente des petites gares ferment en France. En Région Sud, 26 gares perdront leurs guichets avec présence humaine à partir de septembre 2025. À partir de janvier 2026, ce sera au tour de 13 gares du Grand Est. Selon les régions et la SNCF, c'est le succès du numérique qui en est responsable : plus de 80 % des billets se vendent désormais en ligne. Pourtant, la fréquentation des TER augmente de 10 % entre 2023 et 2024.

Ce bornes de billetterie avaient déjà remplacé les guichets d'achat dans les gares SNCF - ©Andrei Antipov / Shutterstock
Ce bornes de billetterie avaient déjà remplacé les guichets d'achat dans les gares SNCF - ©Andrei Antipov / Shutterstock

On avait eu un avant-goût du changement en 2023 avec la disparition des petites bornes jaunes caractéristiques de compostage de billets, agaçants pour les usagers, mais pourtant si emblématiques des gares de notre enfance. Aujourd'hui, c'est la disparition des guichets SNCF qui s'accélère d'une région à l'autre. En Région Sud, 26 petites gares sont progressivement dépourvues de guichets avec présence humaine depuis septembre. À partir de janvier 2026, ce sera au tour de 13 gares du Grand Est. En Hauts-de-France, une quarantaine de suppressions de postes et de contrats d'intérimaires est en cours. En Nouvelle-Aquitaine, les guichets des gares de Royan, Cognac et Saintes sont menacés.

Les syndicats de cheminots pointent une « casse organisée des services publics ». Les régions et la SNCF la qualifient d'adaptation aux nouvelles habitudes des voyageurs. La rationalisation budgétaire et la transformation numérique signent-elles la fin des petites gares telles que nous les connaissons, ainsi que la SNCF elle-même ?

En Grand Est, 11 % seulement des billets se vendent au guichet, contre 31 % en 2019

Parlons peu, mais parlons chiffres. Nos confrères de BFMTV ont mené l'enquête. En Grand Est, 11 % des ventes de billets TER transitent par les guichets en 2024, alors qu'elles représentaient 31 % en 2019. Cette chute vertigineuse en cinq ans montre comment les comportements d'achat ont basculé. Les applications mobiles, les sites internet et les bornes automatiques ont conquis la clientèle. Les petits guichets que servaient les cheminots se sont vidés.

Les 13 guichets du Grand Est qui fermeront en janvier 2026 réalisent une moyenne de 6 à 10 ventes par jour seulement, selon Thibaud Philipps, vice-président de région chargé des transports au Grand Est. La rentabilité n'existe plus. Un revenu annuel de 8 000 euros ne compense les 200 000 euros annuels que la SNCF reçoit par guichet en service. Pour les autorités organisatrices des TER, les chiffres imposent une conclusion plutôt fataliste.

En Région Sud, plus de 80 % des ventes se font sous format digital. L'institution a donc décidé de proposer des alternatives aux 26 gares qui perdront leurs guichets. Ses solutions s'appellent espaces ZOU!, guichets mobiles, partenariats avec les buralistes et la Poste. La Région Sud affirme que « depuis plusieurs années, les habitudes d'achat des usagers des TER ont changé ». Elle ajoute que 96 % des voyageurs de TER bénéficient d'une possibilité d'achat dans la gare qu'ils empruntent. Le guichet traditionnel, dans cette logique, prend les airs d'un luxe révolu.

La CGT Cheminots réclame une « réhumanisation des gares »  - ©Romain P19 / Shutterstock
La CGT Cheminots réclame une « réhumanisation des gares » - ©Romain P19 / Shutterstock

Or, la fréquentation des TER augmente de 10 % quand les guichets ferment

Entre 2023 et 2024, la fréquentation des TER a bondi de 10 %. Plus de clients voyagent en train, plus de présence aux gares. Parallèlement, la SNCF supprime les guichets. C'est tout simplement aberrant et incroyable pour les syndicats de cheminots.

Sud Rail l'énonce sans détour : « alors que la fréquentation TER, dans les trains et dans les gares, a augmenté de 10 % entre 2023 et 2024, la direction SNCF et les Autorités Organisatrices veulent continuer à détruire le service public ferroviaire ». Pourquoi amputer l'offre humaine quand la demande augmente ? Le syndicat y voit une aberration.

Pour la CGT Cheminots, les agents en gare représentent bien davantage qu'un coût comptable. C'est une mission auprès des clients âgés, des voyageurs peu à l'aise avec la technologie, un lien social qu'on tisse dans les territoires. L'organisation affirme que « la population dit unanimement stop » face à la disparition « de ce bien commun indispensable pour maintenir un lien social ».

La CGT Cheminots réclame une « réhumanisation des gares ». Sud Rail dénonce que « les guichets de proximité sont sacrifiés sur l'autel budgétaire alors qu'ils constituent un maillon essentiel de la cohésion des territoires ». Deux conceptions du service public s'opposent. L'une priorise la rentabilité immédiate, l'autre l'accessibilité pour tous.

Source : BFMTV