L'ARCEP a publié ce mercredi une série de sept mises en demeure visant SFR, Orange, Free et Bouygues Telecom. Plus de 270 sites mobiles promis pour réduire la fracture numérique sont toujours en attente, certains depuis des années.

L'ARCEP a fait un tir groupé sur le New Deal Mobile, en mettant en demeure les quatre opérateurs. © Alexandre Boero / Clubic / Shutterstock
L'ARCEP a fait un tir groupé sur le New Deal Mobile, en mettant en demeure les quatre opérateurs. © Alexandre Boero / Clubic / Shutterstock

La promesse du New Deal Mobile de 2018 visait à éradiquer les zones blanches, mais comme a pu le constater l'ARCEP, celle-ci semble en partie vaine. Ce mercredi 7 mai, le gendarme des télécoms a dévoilé sept décisions assez piquantes, qui aboutissent à la mise en demeure des opérateurs français, d'Orange à Free en passant par Bouygues Telecom et SFR. Ces sanctions concernent aussi bien des sites 4G récents que des obligations plus anciennes, laissant des centaines de communes sans couverture mobile décente.

Des communes abandonnées par les opérateurs malgré leurs promesses

Dans le détail, les quatre décisions les plus récentes visent des obligations de juillet 2023. La décision n°2025-0165 nous apprend qu'au 28 octobre 2024, SFR n'a activé aucun de ses 40 sites attribués, même si l'opérateur a pris d'en mettre en service 31 d'ici le 3 août 2025. Free, de son côté (décision n°2025-0163), affiche également un zéro pointé sur 36 sites, qui seront tous activés avant le 4 août 2025. Orange ne fait guère mieux avec un seul site activé sur 39 (décision n°2025-0164), tout comme Bouygues qui a déployé une unique antenne sur 33 (décision n°2025-0162).

Trois autres décisions concernent des manquements plus anciens. Bouygues est épinglé pour 55 sites qui auraient dû être actifs depuis février 2024 (décision n°2024-2504), tandis que SFR accumule les retards sur plusieurs dizaines de sites datant de 2018-2023 (décision n°2024-0242), ce qui agace l'ARCEP.

La décision n°2024-0241 vise spécifiquement Orange pour ses 68 sites de 4G fixe en retard, dispositif crucial pour les zones sans bon haut débit filaire. Seuls 87 sites sur 155 sont opérationnels, ce qui prive encore de nombreux foyers de leur seule possibilité d'accès à Internet dans les zones rurales isolées.

L'ARCEP déplore les justifications insuffisantes des opérateurs

Les justifications avancées par les opérateurs sont systématiquement rejetées par l'ARCEP. Refus d'accès aux terrains, lenteurs administratives, problèmes de raccordement électrique... L'autorité juge certains arguments insuffisants, avec un manque de documents probants qui révèle un possible manque de suivi rigoureux des projets.

L'état d'avancement est en tout cas inquiétant. Pour Free, 10 sites n'ont toujours pas fait l'objet d'une signature de bail. Chez Bouygues, on grimpe à 17 sites. SFR ne fournit pas de calendrier cohérent, tandis qu'Orange compte 16 sites terminés mais non activés pour la 4G fixe, sans explication claire.

Le régulateur point du doigt le défaut structurel d'organisation interne chez certains opérateurs et une communication défaillante avec les collectivités locales. Les communes concernées restent souvent sans interlocuteur identifié ni information sur l'avancement des travaux, ce qui creuse forcément le fossé de confiance entre opérateurs et territoires ruraux.

Les opérateurs sont dans le viseur de l'ARCEP sur l'installation des antennes mobiles. © Yashi S007 / Shutterstock
Les opérateurs sont dans le viseur de l'ARCEP sur l'installation des antennes mobiles. © Yashi S007 / Shutterstock

Un ultimatum commun lancé à Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free pour sortir de l'impasse

L'ARCEP fixe donc une date butoir commune au 4 août 2025 pour les obligations les plus récentes. Cette mise en demeure formelle ouvre la voie à des sanctions financières en cas de nouveau manquement constaté. Pour les sites plus anciens, certains délais sont encore plus courts, notamment pour Orange et Bouygues Telecom, qui ont des obligations de déploiement à six mois.

Tous les opérateurs doivent désormais fournir un reporting exhaustif, avec des fiches détaillées par site, des preuves de démarches, et un descriptif de l'état d'avancement précis. L'autorité exige aussi des documents probants, comme des baux signés, des permis de construire obtenus, des dates de travaux, et des calendriers fiables de déploiement. La mutualisation technique reste une obligation non négociable, précise aussi l'organisme.

Pour les habitants des zones concernées, l'enjeu dépasse le simple confort numérique. Sans ces antennes promises, l'accès aux services essentiels comme la navigation web, les appels d'urgence, ou le télétravail peut devenir difficile. La 4G fixe d'Orange représente même l'unique solution d'accès Internet pour certains foyers sans fibre ni ADSL convenable.

Peut-on pour autant parler d'échec du New Deal Mobile ? En tout cas, l'ARCEP nous fait comprendre que la fracture numérique, sept ans après ses premières promesses, n'est toujours pas soignée.

Source : ARCEP