L'Internet mobile, la vraie révolution!

28 mars 2002 à 00h00
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On constate aujourd'hui que l'ARPU (Revenu moyen par utilisateur) sur les réseaux mobiles est stabilisé voire en régression dans certains pays. Conséquence directe d'une maturité d'un marché où les utilisateurs ont acquis le contrôle de leur consommation et où l'usage de la voix est maintenant bien établi et installé. Après dix ans de téléphonie mobile, l'internet mobile se doit de prendre le relais.

Et cela ne va pas sans une nécessaire évolution du rôle de l'opérateur mobile. Pourtant, on le voit, malgré le succès des SMS, l'excessive prudence à proposer des offres de services purement numériques est manifeste. Est-ce l'insuccès de la campagne de lancement du WAP et sa complexité qui inhibe les initiatives? Ou tout simplement le temps d'un repositionnement de culture d'entreprise devant un nouveau métier?

Or la motivation est là : les opérateurs mobiles, en quête de croissance de l' ARPU, lorgnent sur l'Internet mobile. Après une catastrophique tentative avec le WAP, c'est le GPRS qui porte tous les espoirs. Cette technologie utilise l'infrastructure de leur réseau GSM et si son implémentation n'a certes pas été exempte de difficultés, il reste qu'elle n'a pas impliqué de lourds investissements pour la rendre disponible sur l'ensemble des territoires couverts, surtout au regard des coûts évoqués par le déploiement de l'UMTS.

Le GPRS est donc le transporteur de données souple et performant qui doit devenir à présent l'initiateur du prochain relais de croissance, celui de la consommation numérique mobile.

Partant du postulat qu'il y a une réelle opportunité de marché à développer la consommation de services numériques utilisant un media efficace et simple à utiliser, accompagnant ainsi le développement d'une société de plus en plus nomade. Postulat d'autant plus séduisant que l'Internet mobile remporte un succès colossal au Japon à travers les implémentations du célèbre i-mode et... du WAP!

Forts de cet exemple, les acteurs Européens tentent d'en retirer quelques recettes. Pourtant, les principaux éléments clef du modèle Japonais n'apparaissent pas dans les stratégies. Si ce n'est sous la forme des M-Services, initiés par la GSM Association regroupant quelques 600 opérateurs, visant à donner une cohésion à un ensemble de spécifications à l'origine disparates.

Or dans un premier temps, la perception des départements Marketing des opérateurs mobiles des opportunités de développement de services numériques se concentre sur un usage professionnel. En effet, un tel choix de mise en place simplifie la problématique de lancement puisque ici la première (et unique?) valeur ajoutée majeure est d'apporter un point d'accès Internet à des professionnels en situation de mobilité. Accès aux boites aux lettre électroniques, au Web ou à l'Intranet de l'entreprise sont les services initialement ciblés par les premières offres GPRS.

Malgré l'optimisme et l'enthousiasme que suscite l'avènement de cette commercialisation, ces offres présentent globalement une tendance marquée à installer un marché captif et à limiter la souplesse que le GPRS autorise. Par exemple: aujourd'hui, l'utilisation de l'infrastructure GPRS d'Orange et de SFR ne permet pas l'envoi de mails autres que ceux expédiés au nom des comptes que les opérateurs destinent à leurs clients (@orange.fr et @sfr.net). Conséquence : impossible d'envoyer un mail au nom de son compte professionnel en utilisant le réseau GPRS et les serveurs relais des opérateurs. Situation techniquement injustifiée, il suffit d'évoquer le même service proposé par n'importe quel Fournisseur d'Accès à Internet (FAI) fixe qui assume là son rôle de transporteur et relaie sans sourciller l'ensemble des mails que l'on souhaite envoyer.

Autre point stratégique des réseaux GPRS d'Orange et SFR : on peut s'inquiéter aujourd'hui d'un apparent manque d'ouverture des pare-feux (Firewall) mis en place par les opérateurs. On semble ainsi s'acheminer étrangement vers la situation dans laquelle, si l'opérateur ne commercialise pas lui-même un service, on ne pourra pas aller le chercher en dehors de son portail, sur l'Internet par exemple.

Certes, des raisons techniques légitimes existent pour justifier la base d'un tel choix : Détenir l'ensemble des moyens de distribution des services numériques permet d'en assurer la qualité de service (QoS) à l'usager. Mais c'est au détriment d'une ouverture vers l'extérieur, vers l'Internet et cela contrarie directement l'un des facteurs de succès que les SMS ou l'Internet mobile Japonais ont déjà pu démontrer : le réseau ne doit pas circonscrire l'usage. Les SMS sont devenus attractifs en France quand les 3 opérateurs GSM se sont interconnectés, l'opérateur Japonais NTT DoCoMo réalise le plus gros de son volume de données avec les sites non officiels, extérieurs à son portail.

En bref, les opérateurs mobiles doivent admettre que les mythiques killer-apps n'ont pas fait leurs preuves : ils n'auront jamais l'éventail de services définitif pour entraîner une adoption massive. L'appropriation d'un service, par l'entremise d'un objet aussi personnel que le mobile, provient d'abord du fait que la proposition faite dessine un horizon apparemment non structurant. Il est vital d'offrir un vaste choix où chaque consommateur peut se donner la chance d'y trouver ses propres repères et valeurs. Et pour cela, l'i-mode Japonais nous enseigne que la première étape est d'ouvrir son marché pour y voir une variété de services aussi grande que possible. Il nous montre aussi que pour initier de tels usages, il faut simplifier au maximum la proposition initiale d'un service et de cibler en priorité un public jeune, privilégiant l'accessibilité plutôt que la richesse du contenu (et donc sa complexité)

C'est donc avec un public souple et disposé à une adoption rapide que le marché de l'Internet mobile ainsi que ses acteurs apprendront la maturité et les particularismes de consommation. Dans cette première phase, le contenu n'est que secondaire, évitons le déterminisme et la technologie pour la technologie. Finalement, n'est-ce pas là, le métier des télécoms?

Yann ROUSSE (yrousse@zepocketeer.com)

Consultant indépendant, Yann ROUSSE accompagne les entreprises dans leur stratégie internet mobile (wap, sms, mms, bluetooth, gprs, umts)
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