Triaaangles

13 juin 2014 à 15h42
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Citation :

''Comme je n'aimais pas trop me plier aux règles, le seul moyen de les éviter était de créer ma propre structure. Mais on a toujours des comptes à rendre.”



  • Nom : Triaaangles
  • Activité : vente de produits personnalisés et réseau social d'artistes
  • Création : novembre 2012
  • Localisation : Aix-en-Provence
  • Fondateurs : Julien Cardillo
  • Effectifs : 7 associés
  • Mise de départ : 50 000 euros
  • Clients : particuliers
  • Modèle économique : commission sur les ventes de 15%
  • Chiffre d'affaires : 100 000 euros en 2013
  • Equilibre : oui
  • Salaire du patron : assez pour payer les charges
  • Levée de fonds : cherche 730 000 euros
  • Concurrents : Spreadshirt, TheKase, Raaad
  • Projets : développer la partie sociale du site Web et ouvrir des boutiques


L'art d'afficher des vaches à chapeau


Qu'est-ce qui peut pousser un ingénieur chez Eurocopter à tout plaquer pour monter son site de t-shirts et bidules personnalisés ? Art, passion, liberté ? Julien a franchi le pas un peu pour tout ça.


Pantalon retroussé, barbe taillée, chignon centré, voix posée et sourire accordé, tel est Julien, fondateur de Triaaangles, avec trois « a». Mains dans les poches, tout roule pour sa boutique en ligne de t-shirts personnalisés qui fédère une communauté de 400 artistes et, depuis l'été 2013, a même pignon sur rue - un an et demi plus tôt que prévu ! Elle se situe à Aix-en-Provence, où vit cet ingénieur passé deux ans par Eurocopter.

Julien fait partie de ces entrepreneurs qui se lancent seuls, l'idée sous le bras, et on verra. « Penser, planifier et créer sont les trois mots qui m'animent, j'ai donc choisi d'en faire mon métier », aime-t-il à se décrire. Entre deux modélisations de business models, workshops et beta testings chez son ancien employeur, Julien joint le geste à la parole en 2011 et créée Paparazzi Timewatch, une marque de montres personnalisées.

Drogue et perquisition


En novembre 2012, et sans cesser de vendre ses toquantes d'acier, de silicone, de LED et pas chères (50 euros), Julien se lance dans Triaaangles, sur un modèle assez proche de Raaad. La triple répétition de la lettre « a », d'abord. Les t-shirts, surtout. Avec leur vache à chapeau, vélo à citron ou carré turquoise clamant sa couleur : « Cher Pantone, ceci est du putain de turquoise. » Le fameux sociotype fourre-tout du hipster appréciera.

Ces créations, qui n'ont rien d'ineffable, sont l'oeuvre d'artistes à qui la société offre de s'exprimer au travers de plusieurs supports comme des pulls, des coques d'iPhone, des sacs en toile et même des toiles. Mollo quand même. L'année dernière, l'un d'eux a présenté, à Aix, sa nouvelle coque de téléphone. Dessus : l'inscription « Weed », (« chanvre »). Oh ?

Une référence botanique que ne goûta pas la gendarmerie. Elle perquisitionna la boutique, devenue un lieu d'incitation à la fumette, saisit cinq coques, ou autant de pièces à conviction, Julien dut se rendre au poste dare-dare, le journal La Provence relaya l'info : « Feuilles de cannabis et trafic de... coques ! » à Aix-en-Provence. Tout un programme. Une tempête de verre d'eau. Même pas assez puissante pour fouetter un chaton.

Et une pizzeria ?


La start-up est plutôt bien ancrée dans le sol aixois, campée sur 100 000 euros de chiffre d'affaires en 2013. À la fin 2014, la société consolidera ses appuis avec une deuxième boutique sur les docks de Marseille. Paris est évidemment dans le viseur de Julien qui espère franchiser son concept. Le chemin parcouru en deux ans est tout à fait honorable.

Triaaangles démarre en 2012 avec 30 000 euros d'apport personnel et 20 000 euros de « love money » - c'est de l'argent donné par la famille ou les amis par amour pour la personne qui court le risque entrepreneurial et non par calcul d'une rentabilité financière de court terme et de diversification du risque - ce qui, entendons-nous bien, n'est pas une maladie.

Ses amis et son père lui apportent chacun 5 000 euros. « Je leur ai présenté le projet, ce que ça allait apporter et cela les a séduit », explique-t-il. Ce qui fera mouche : « C'est nouveau, ça comporte une dimension locale et ça fait appel à des artistes. » Fort de ces capitaux, le plan de Julien consiste maintenant à doubler la mise avec le levier de sa banque. Improbable.

« Le business plan était béton, le dossier était béton, tout était béton », rage encore Julien, qui essuie le refus net de l'établissement financier. C'était courru d'avance, non ? Une banque ! Le connaissant - pas tant que cela en fait mais il en a l'air -, il a vraiment dû bien s'y préparer. Mais ainsi va le monde et quatorze ans après l'an 2000, la bulle, les start-up, les « dot com », tous n'ont pas repris leurs esprits. Les Internets font peur.

Quand même, on sent Julien un peu blasé. Plus que pour l'histoire de l'incitation à la consommation de substances illicites sur les coques pour iPhone. « Quand je suis arrivé avec mon projet Internet et que je leur ait dit que j'allais vendre des t-shirts personnalisés en ligne... », se remémore-t-il. « Les banques sont frileuses sur ce sujet, elles veulent du concret. Une pizzeria aurait été plus facile à financer ! » Il eut finalement assez.

Avec la moitié de ce qui était inscrit sur le plan d'affaires, c'est ceinture. « Quoiqu'on dise, il faut des fonds pour créer une entreprise. » Heureusement, les amis de Julien l'aident aussi en nature. Benoît par exemple est développeur et lui donne un sérieux coup de pouce pour bâtir la plateforme Web. Seul à la barre, le créateur de Triaaangles prend beaucoup d'idées autour de lui, écoute, échange et se challenge.

J'étais tout seul


« Tout le monde » le conforte dans son idée de projet, ce qui le rassure. Ses parents, dont la mère est infirmière et le père rédacteur en chef d'une revue hippique, lui demandaient seulement d'avoir un diplôme en poche « pour rebondir en cas d'échec ». Cette part du contrat est remplie, et doublement. Car, avant de se lancer, Julien enquille un master de gestion des affaires à l'IAE d'Aix. Cela lui apporte un bagage technique. Le reste, le management des hommes par exemple, comme pour tous, c'est « sur le tas ».

Les premiers jours, ça fait bizarre. Julien se souvient : « J'étais tout seul, face à moi-même et mon envie d'entreprendre. Il n'y avait personne pour me guider. On se pose plein de questions. Est-ce que je fais ça ? Qu'est-ce que je dois faire aujourd'hui ? Mais je ne suis jamais en « bad ». Je prends les échecs de manière positive car j'ai la chance de vivre de ce que j'aime. »

Quand on porte un projet en solo il faut assumer. Julien se transforme en couteau suisse afin de limiter les coûts liés à l'externalisation ou au recrutement. L'entrepreneur s'en accommode bien. « J'ai toujours aimé fabriquer des objets, mais des objets fonctionnels, pour mon appartement, dit-il, quand je pratiquais du tennis par exemple j'étais allé jusqu'à acheter une machine pour faire le cordage moi-même. »

Il se rend aussi tout seul à Shenzhen en Chine, où il a acheté les machines. « Je travaille avec le fournisseur pour améliorer le processus de fabrication, et nous décidons des nouvelles collections », assure-t-il. Petit entrepreneur, il aspire à grossir mais fuit la standardisation. C'est pourquoi la production, elle, est bien assurée à Aix-en-Provence.


Thomas Pontiroli
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