Live Japon: les robots aussi vont chez le dentiste

27 mars 2010 à 00h03
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Des robots, on en voit beaucoup au Japon, mais des robots réellement fonctionnels, non expérimentaux, beaucoup moins, hormis sur les chaînes industrielles. C'est donc sans grande illusion que l'on est allé cette semaine au centre médico-universitaire Showa à Tokyo afin de faire connaissance avec un robot-cobaye pour apprentis arracheurs de dents. Ce n'est pas le premier du genre, et du coup on ne s'attendait pas à être autrement surpris. On avait tort.

Le robot qui nous fut présenté est pour le coup réellement utilisé pour entraîner les futurs dentistes. Cet être artificiel réagit à la douleur, parfois même violemment, lorsque malencontreusement l'inexpérimenté étudiant en dentisterie fait riper sa fraise à côté des dents: aïe.

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Allongée sur le fauteuil du cabinet, la souffre-douleur artificielle, appelée Hanako Showa, endure toutes les fautes commises par des débutants lors de leurs premières interventions. Elle est humanoïde de la tête aux pieds, surtout aux niveaux facial et buccal. Sa bouche est en effet pleine de dents et capteurs qui correspondent aux zones sensibles. A l'instar des humains, elle remue la langue, salive et parle, répondant intelligemment aux questions du dentiste, grâce à un dispositif de reconnaissance et synthèse vocales. Elle est reliée à un ordinateur qui contrôle un compresseur pour actionner les mouvements de la mâchoire, de la tête, d'un bras, etc. Elle se débat sans prévenir, bref, se comporte comme un humain malmené par un charlatan.

En cas de douleur en effet, Hanako gémit, dit "j'ai mal", tourne brusquement la tête, écarquille les yeux, ferme la bouche sans crier gare ou bien jette son bras en arrière, gestes risqués tant pour elle que pour le futur dentiste. "Si vous ressentez une douleur, levez la main gauche s'il vous plaît", lui répète-t-il pourtant. Lorsque l'intervention dure trop, elle fatigue et a du mal a maintenir sa bouche grande ouverte. Différents cas pathologiques peuvent être programmés pour servir de base d'exercice. Les chercheurs ont même imaginé, pour plus de réalisme, un matériau qui donne l'impression de saigner. Il n'est cependant apparemment pas utilisé dans la version qui nous a été présentée.

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Pourquoi un tel androïde est-il jugé nécessaire, une simple tête ne ferait-elle pas l'affaire?

Non, assure le professeur Kotaro Maki de l'Université Showa. "Le nombre d'incidents recensés lors des actes dentaires est plus de deux fois plus important la première année d'exercice que la deuxième, ce qui prouve que la formation initiale des dentistes ne permet pas d'acquérir les compétences réellement requises en cabinet", explique M. Maki. Il manque selon lui aux jeunes étudiants la pratique, pour lever le pied illico afin de stopper les instruments et les écarter à temps de la bouche du patient agité. L'autre lacune concerne l'aptitude à communiquer avec la personne souffrante, souligne M. Maki.

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"Avec ce robot, les apprentis peuvent répéter les différentes opérations et multiplier les échecs, de ce fait ils acquièrent de l'expérience", insiste le professeur. Les robots-cobayes sont selon lui une solution sur laquelle le Japon a tout intérêt à prendre de l'avance. "Cela fait des années que les pilotes d'avion s'entraînent dans des simulateurs qui recréent de façon extrêmement réaliste diverses situations de crise. Pourquoi devrions-nous nous contenter en dentisterie de vulgaires têtes de mannequin inanimées", argue-t-il.

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Hanako, conçue avec un laboratoire de l'Université Waseda et l'entreprise de robotique Tmsuk, est la troisième génération d'androïde imaginée par le professeur, et de loin la plus aboutie. Mise à contribution pour les examens, elle subit les gestes plus ou moins adroits de quelque 90 étudiants, alors que les autres rares modèles expérimentaux existants ne passent qu'entre quelques mains, selon M. Maki. "Avec ce robot, on se sent proche de la réalité. Contrairement aux moyens auparavant utilisés, Hanako réagit spontanément, comme le ferait une vraie patiente", témoigne un étudiant, Shugo Haga.

Il y a deux ans et demi déjà, nous avions déjà pu voir un autre robot destiné à la formation de dentistes. Il s'agissait alors d'un prototype, présenté lors d'une exposition internationale dans la banlieue de Tokyo. Répondant au nom de "Simroïd", il avait les traits d'une jeune femme aux cheveux longs, vêtue d'un pull rose et d'un pantalon blanc. "Simroïd" savait alors aussi dire "ça fait mal" et froncer les sourcils lorsque le praticien manquait sa cible ou touchait une zone sensible.

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Simroïd

Tatsuo Matsuzaki, un des responsables de la société Kokoro qui a mis au point le système électronique et l'enveloppe humanoïde, expliquait lui aussi que le robot avait été conçu pour servir de cobaye aux étudiants en chirurgie dentaire. "Simroïd présente un tel réalisme que les apprentis dentistes vont pouvoir mesurer les réactions des patients et être ainsi capables d'améliorer leur technique en la considérant non comme un objet mais comme un être humain", prétendait-il alors. Il semble cependant que son utilisation en soit restée au stade expérimental.

Naotake Shibui, professeur à l'Ecole de médecine japonaise de Tokyo, avait cependant intégré le robot humanoïde dans ses cours, estimant que "Simroïd" pouvait réellement aider les dentistes à "apprendre à communiquer avec les patients". "La technique des soins est importante mais il est également utile de percevoir l'angoisse des patients et d'y répondre", justifiait-il alors. Connaissant la propension des étudiants pour les plaisanteries, les ingénieurs avaient également prévu de doter la jeune femme d'un capteur placé sur la poitrine qui permettait de détecter tout geste déplacé.

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