Google joue une partie serrée dans la « guerre des serveurs IA », et son nouveau pari tient en une personne : Amin Vahdat, ingénieur brillant et pourtant quasi inconnu du grand public. Derrière les flamboyantes annonces de modèles IA, c’est ce stratège de l’ombre qui est chargé de faire tourner la gigantesque machine technique du groupe.

Depuis plus de quinze ans, cet architecte de l’infrastructure façonne les entrailles techniques de Google, ces salles pleines de machines qui décident de la vitesse, du coût et même de l’empreinte carbone de l’intelligence artificielle maison. Alors que tout le monde commente les performances de Gemini ou la course aux puces, la direction du groupe choisit de placer Vahdat directement sous la responsabilité de Sundar Pichai. Quand un PDG confie la « plomberie » de son empire numérique à un seul homme, c’est qu’il y voit bien plus qu’un simple gardien de serveurs.
Amin Vahdat, vedette de l'IA chez Google
Amin Vahdat n’a rien de la star de conférence, mais son parcours ferait pâlir plus d’un dirigeant de la Silicon Valley, même si lui préfère manifestement les tableaux blancs aux caméras. Chercheur reconnu avec des centaines de publications, ancien professeur dans plusieurs universités américaines, il rejoint Google en 2010 avec une obsession discrète : faire parler ensemble des millions de machines comme si elles n’en formaient qu’une seule.
Sous sa houlette, Google a bâti une succession de processeurs spécialisés pour l’IA, les TPU, dont la dernière génération affiche une puissance de calcul estimée à plus de 40 exaflops, de quoi nourrir des modèles massifs comme Gemini 3 sans dépendre entièrement de puces externes. Dans le même temps, l’entreprise a multiplié les paris sur des processeurs ARM maison pour ses centres de données, afin de proposer un meilleur rapport puissance-coût et une consommation électrique en baisse, un point crucial à l’heure où la facture énergétique des géants du numérique affole les compteurs.
Vahdat ne s’arrête pas aux puces. Il supervise aussi les réseaux internes maison, ces toiles de fibres capables de déplacer des quantités astronomiques de calcul et de données entre les serveurs, condition indispensable pour entraîner des modèles IA géants. C’est ce patient travail sur les fondations qui permet aujourd’hui à Google de parler sérieusement de ses propres puces IA face à NVIDIA, alors qu’il n’y a encore pas si longtemps, le groupe apparaissait comme un simple suiveur sur ce terrain.
La nouvelle arme de Google dans la guerre des serveurs IA
Pourquoi cette promotion maintenant, alors que son travail irrigue Google depuis des années déjà ? Parce que la bataille a changé de nature : ce ne sont plus seulement les algorithmes qui font la différence, mais la capacité à bâtir des centres de données taillés sur mesure pour l’IA, du processeur jusqu’au réseau en passant par la manière de planifier les calculs. Dans cette optique, donner à Vahdat un rôle stratégique officiel revient à dire au marché que l’infrastructure devient l’arme principale de Google.

Cette mise en avant arrive au moment où le groupe affiche fièrement les performances de Gemini 3 et aligne des investissements colossaux dans ses centres de données, tout en montrant qu’il peut s’affranchir partiellement des puces NVIDIA pour certains entraînements. Face à cela, NVIDIA hausse le ton et promet que ses propres puces gardent une avance confortable sur celles de Google, signe que la rivalité ne se joue plus seulement dans les laboratoires, mais aussi dans la communication et l’image de solidité technologique.
Et, pour couronner le tout, un acteur comme Meta regarde désormais de très près l’offre de puces IA de Google, ce qui suffirait déjà à donner quelques sueurs froides aux partenaires historiques de la maison de Menlo Park. On comprend alors pourquoi Sundar Pichai choisit de placer en première ligne cet ingénieur discret : si Google parvient à convaincre d’autres géants de confier leurs charges d’IA à son infrastructure, le groupe ne gagnera pas seulement la « guerre des serveurs IA », il s'offrira aussi une voie dorée vers ce qui s'annonce être l'un des business les plus juteux des prochaines années.
Source : Tech Crunch