Les clauses de confidentialité ajoutées aux signatures électroniques semblent protéger les échanges professionnels. Pourtant, leur efficacité juridique reste limitée. Vous en insérez peut-être sans savoir ce qu'ils apportent réellement.

Clause de confidentialité par e-mail : valeur juridique ou simple formule ? ©Shutterstock
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Pour fluidifier vos échanges avec vos clients, fournisseurs, conseils ou collaborateurs, vous faites circuler au quotidien des documents sensibles par e-mail via votre service de messagerie sécurisée dédié. Les données financières, les contrats en cours, les stratégies commerciales circulent par e-mail. Pour protéger ces informations, vous ajoutez une mention en bas de vos messages : « Ce message est confidentiel et destiné uniquement à son destinataire » en guise de clause de confidentialité.

Cette pratique vous semble naturelle. Elle rassure, elle professionnalise. Mais elle interroge aussi. Cette clause possède-t-elle une réelle valeur juridique ? Peut-elle vous protéger en cas de litige ? Les réponses sont plus nuancées que ce que suggère l'omniprésence de ces formules dans les communications professionnelles.

Notre Code civil reconnaît la valeur probante des écrits électroniques depuis 2000. Les e-mails peuvent constituer des preuves recevables devant les tribunaux. Cependant, ajouter une clause de confidentialité ne suffit pas à créer une obligation juridique contraignante pour un tiers qui recevrait le message par erreur.

Un disclaimer qui rassure mais qui n'engage pas juridiquement

On appelle disclaimer un petit texte qu’on glisse à la fin d’un e-mail pour limiter les risques juridiques pour l’organisation qui l’envoie. À cette précaution peuvent s’ajouter, selon les cas, quelques mentions commerciales, marketing ou des notes imposées par la réglementation locale. En français clair, « disclaimer » correspond tout simplement à une « exclusion de responsabilité légale » ou plus communément « clause de non-responsabilité ».

Et contrairement à ce que l'on peut penser, les disclaimers n'ont pas d'impact juridique concret et n'offrent aucune exclusion de responsabilité. Cette affirmation tranche avec la croyance selon laquelle ces mentions protègent automatiquement l'expéditeur. En France, aucune loi n'impose d'ajouter un disclaimer à vos e-mails professionnels. La pratique s'est généralisée par mimétisme, sans que le cadre juridique ne suive réellement. Vous ne pouvez pas échapper à votre responsabilité en cas d'erreur dans un e-mail grâce à un simple disclaimer. Vous ne pouvez pas non plus forcer quelqu'un à détruire un message ou lui imposer une obligation de confidentialité juste en l'écrivant. Ces mentions n'ont pas de valeur probante devant un tribunal.

S’ils restent si courants, c’est parce qu’ils installent un rappel de prudence qui fonctionne plutôt bien. Une sorte d'alerte le destinataire sur la nature des informations partagées et invite à les manipuler avec soin. Dans les milieux dans lesquels la confidentialité est une exigence quotidienne, cette mention fonctionne comme une marque de sérieux. Devant un juge, elle peut attester que l’entreprise prend la question au sérieux, sans pour autant constituer un bouclier légal.

Quand la clause de confidentialité possède une vraie force contraignante

En revanche, la situation change radicalement quand la confidentialité s'inscrit dans un contrat signé entre deux parties. Un contrat de travail, un accord commercial ou une convention-cadre peuvent inclure des engagements précis : ne pas divulguer certaines données, limiter l’usage d’informations stratégiques ou protéger des procédés internes.

Ces clauses sont reconnues et appliquées. Un salarié qui viole son devoir de confidentialité peut être sanctionné, et un partenaire contractuel peut être poursuivi. Les contenus concernés peuvent être très variés : listes de clients, procédés industriels, éléments financiers, projets en développement. Les entreprises intègrent donc systématiquement ce type de clause lorsque des informations sensibles circulent, même ponctuellement.

Ce qui distingue une clause de confidentialité dans un e-mail d'une vraie clause contractuelle

Un disclaimer d'e-mail et une clause de confidentialité contractuelle ne produisent pas les mêmes effets juridiques. Le premier est une mention unilatérale ajoutée par l'expéditeur, sans accord préalable du destinataire. Le second résulte d'un engagement mutuel formalisé par écrit et signé par les deux parties. Cette différence fondamentale explique pourquoi l'un reste informatif quand l'autre devient contraignant.

Pour qu'une clause de confidentialité soit valable juridiquement, elle doit respecter plusieurs conditions. Elle désigne précisément les informations couvertes par la confidentialité. Elle définit les obligations de chaque partie. Elle fixe une durée d'engagement, courte ou longue, après la fin du contrat. Elle prévoit des sanctions en cas de violation. Sans ces éléments, la clause peut être considérée comme trop vague ou abusive.

Vous avez peut-être déjà envoyé ou reçu un e-mail qui contenait cette clause de confidentialité : « Ce message est confidentiel et destiné uniquement à son destinataire » - ©Ken stocker / Shutterstock

Les risques concrets de ne pas protéger vos échanges professionnels

L'absence de cadre pour protéger les informations sensibles expose votre entreprise à plusieurs risques. Une fuite de données confidentielles peut survenir car le destinataire ignore qu'il doit respecter une obligation de discrétion. Un salarié peut divulguer des informations stratégiques sans mesurer la gravité de son acte, simplement car aucun document ne définissait clairement ce qui devait rester confidentiel.

Le vide juridique complique aussi les sanctions. Difficile de poursuivre quelqu'un qui a failli à une obligation qui n'était pas clairement établie. Les tribunaux apprécient au cas par cas, mais une entreprise qui n'a rien formalisé se retrouve en position de faiblesse. Si nous allons plus loin que l'aspect juridique, les conséquences opérationnelles peuvent être lourdes. Vos concurrents accèdent à votre savoir-faire. Vos clients apprennent que leurs données n'étaient pas protégées. Votre réputation se dégrade. Le coût financier d'une telle situation dépasse largement celui de la mise en place de protections contractuelles adaptées.

Comme on l'a vu, les e-mails peuvent constituer des preuves en justice. Les échanges de courriels entre deux entreprises concernant les termes d'un accord peuvent démontrer la nature et l'existence de cet accord. Cette reconnaissance de la valeur probante des e-mails renforce l'importance d'y associer des engagements contractuels clairs sur la confidentialité, plutôt que de se contenter d'un disclaimer sans portée.

Des exemples de formulations qui apportent une vraie information

Si vous souhaitez ajouter un disclaimer à vos e-mails malgré ses limites juridiques, certaines formulations restent plus efficaces que d'autres. Elles doivent rester concises, claires et informatives. Voici ce qu'un disclaimer standard peut contenir : l'indication que le message est destiné uniquement au destinataire prévu, la demande de supprimer le message en cas de réception par erreur, le rappel que toute diffusion non autorisée est interdite, la mention que l'entreprise ne peut être tenue responsable des virus éventuels.

Pour les secteurs réglementés, des mentions supplémentaires s'avèrent nécessaires. Si vous dirigez un cabinet juridique, alors vous préciserez que les communications entre avocat et client sont couvertes par le secret professionnel. Un établissement de santé indiquera pour sa part que le message peut contenir des informations protégées par le secret médical. Une entreprise soumise au RGPD ajoutera un lien vers sa politique de confidentialité et rappellera les droits des personnes concernées.

Ces formulations n'ont pas de valeur contraignante, mais elles remplissent trois fonctions utiles. Elles sensibilisent le destinataire au caractère sensible des informations. Elles montrent que votre entreprise a mis en place des procédures pour protéger les données. Elles peuvent constituer un élément à charge contre un tiers qui utiliserait sciemment des informations reçues par erreur et marquées comme confidentielles.

Formaliser les engagements dans des accords écrits reste la seule protection efficace

Pour une protection solide, il n’existe pas d’alternative que de mettre noir sur blanc les engagements de confidentialité. Contrats de travail, accords commerciaux, conventions de partenariat ou accords de non-divulgation -NDA-lors de négociations : toutes ces formules clarifient le périmètre d’usage des informations.

Un NDA bien rédigé précise la nature des données couvertes, les exceptions, les limites d’utilisation et les sanctions. Il protège les projets sensibles, les innovations techniques ou les discussions stratégiques.

N'hésitez pas à renforcer davantage la valeur probante des échanges en procédant à l’archivage sécurisé des e-mails importants et à l’utilisation d’une signature électronique qualifiée.

Les disclaimers restent utiles comme signal de professionnalisme et d'anticipation des risques

Même avec leur portée limitée, les disclaimers conservent un rôle dans l’image que projette une organisation. Ils montrent que le sujet n’est pas ignoré et complètent les autres mesures internes.

Les entreprises équipées de solutions d’envoi massif automatisent ces mentions pour assurer cohérence et simplicité de mise à jour. Une charte d’usage de l’email vient souvent prolonger ce dispositif en définissant les bonnes pratiques, les informations autorisées et les comportements attendus.

Les organisations qui anticipent établissent un cadre clair pour l’accès aux boîtes mail, notamment lors des absences ou des départs. Sans règles préalables, certaines pratiques peuvent contrevenir au RGPD.

N'oubliez pas que les e-mails peuvent également contenir un virus transmis par négligence, et qu'un accord contractuel conclu sans intention formelle ou une prise de position engageant l’entreprise peuvent déclencher un litige.

En associant clauses contractuelles, outils internes, formation et bonnes pratiques, vous vous assurez de limiter la casse en cas de souci. Le disclaimer n’est alors qu’une petite pièce dans un ensemble plus large et plus cohérent.