La France et l'Ukraine ont signé lundi une lettre d'intention historique pour l'acquisition d'avions Rafale, jusqu'à 100 potentiellement. Ce contrat placerait Kiev au premier rang des clients export de l'avion de chasse français.

L'Ukraine va faire l'acquisition massive de Rafale de Dassault ces prochaines années. © Serge Goujon / Shutterstock
L'Ukraine va faire l'acquisition massive de Rafale de Dassault ces prochaines années. © Serge Goujon / Shutterstock

Volodymyr Zelensky n'a pas hésité à parler d'« accord historique ». Reçu ce lundi 17 novembre par Emmanuel Macron sur la base aérienne de Villacoublay, le président ukrainien a signé une lettre d'intention portant sur l'achat futur de jusqu'à 100 Rafale, accompagnés de systèmes de défense antiaérienne SAMP-T et de drones. Un engagement qui survient alors que Kiev subit de nouvelles frappes russes massives et traverse une période délicate sur le front.

L'Ukraine en passe de devenir le premier client export du Rafale français

Avec ces 100 appareils Dassault, l'Ukraine détiendrait la deuxième flotte mondiale de Rafale, derrière les 225 exemplaires de l'armée française. Surtout, Kiev détrônerait les Émirats arabes unis (80 appareils), l'Inde (62) et l'Égypte (55) pour s'imposer comme premier client export du chasseur tricolore. Une perspective qui redore le blason de Dassault Aviation, dont le 300ème Rafale est sorti des chaînes de production récemment.

Mais restons lucides, cette lettre d'intention ne constitue pas une commande ferme. La facture oscillerait entre 10 et 15 milliards d'euros, selon les estimations de l'Élysée. Une somme colossale qui soulève immédiatement la question du financement pour un pays en guerre largement tributaire de l'Union européenne ces dernières années. De son côté, la présidence française assume pleinement de vouloir « mettre l'excellence française en matière d'industrie d'armement au service de la défense de l'Ukraine ».

Sur le tarmac de Villacoublay, industriels et militaires ont présenté au dirigeant ukrainien non seulement le Rafale et son armement, mais aussi le système antiaérien SAMP-T nouvelle génération, choisi notamment par le Danemark récemment. L'objectif de l'opération reste de protéger le ciel ukrainien face à l'agression russe, qui a tué au moins trois personnes dans la région de Kharkiv encore ce week-end.

Kiev n'aura pas tout de suite ses Rafale

Paris aura en tout cas fait évoluer sa doctrine, puisqu'au début du conflit, Emmanuel Macron craignait qu'un transfert d'avions de combat n'entraîne une escalade incontrôlable. Le président posait alors des conditions strictes : pas de frappes en territoire russe, pas de fragilisation des capacités françaises. Le tournant est arrivé le 6 juin 2024, avec l'annonce publique du transfert de plusieurs Mirage 2000-5F. Une décision concrétisée début 2025 lorsque Sébastien Lecornu, alors ministre des Armées, a confirmé le 6 février la livraison des premiers appareils. Six au total sont prévus d'être cédés, selon les rapports budgétaires.

En ce qui concerne les Rafale, comme le rappelle l'amiral Jean-Louis Vichot, ancien chef de mission militaire française auprès de l'Otan, sur BFMTV, « ils ne les auront pas tout de suite, ne serait-ce parce qu'il faut former les mécaniciens, les pilotes et parce qu'on a déjà du mal à avoir suffisamment de Rafale pour nous-mêmes ». Dassault Aviation anticipe néanmoins cette demande croissante en augmentant sa cadence de production jusqu'à trois avions par mois dès 2026, avec une ambition de quatre appareils par mois en 2028-2029.

La France prend donc toute sa part à la stratégie d'armement tous azimuts menée par Zelensky. Fin octobre, le dirigeant ukrainien avait déjà signé une lettre d'intention pour acquérir 100 à 150 avions de chasse Gripen suédois. Le leader ukrainien espère constituer une flotte de 250 nouveaux appareils grâce à des « discussions parallèles avec les Suédois, les Français et les Américains ». Après Villacoublay, le président Macron et lui se sont rendus au mont Valérien pour visiter l'état-major de la « force multinationale Ukraine », qui implique 35 pays et est prête à intervenir dès un éventuel cessez-le-feu.