Sous couvert de placements en cryptomonnaies, un réseau organisé a détourné des millions à travers l’Europe. Une affaire qui illustre la longévité de ces arnaques, malgré des méthodes désormais connues.

Cinq suspects ont été arrêtés lors d’une opération coordonnée au niveau européen, pilotée par Eurojust à la demande de l’Espagne et du Portugal, avec le soutien opérationnel d’Europol. Le principal mis en cause est accusé d’avoir orchestré une fraude massive via de fausses plateformes d’investissement en cryptomonnaies, siphonnant plus de 100 millions d’euros depuis 2018.
Promesses de gains, pertes assurées
Les victimes pensaient placer leur argent sur des plateformes d’investissement solides, au design soigné et aux promesses de rendements rapides. En réalité, une partie des fonds était immédiatement détournée vers des comptes bancaires en Lituanie, utilisés pour blanchir l’argent. Et lorsqu’elles tentaient de récupérer leurs mises, de nouveaux frais venaient gonfler la facture avant que les sites frauduleux ne disparaissent définitivement. Pour certains investisseurs, la perte a été totale.
L’arnaque a tourné pendant des années grâce à un réseau structuré couvrant 23 pays, impliqués à la fois dans le recrutement de victimes et dans le transit des flux financiers. Au total, plus de 100 personnes ont été flouées en Allemagne, en France, en Italie ou encore en Espagne, pour un préjudice estimé à plus de 100 millions d’euros.
Pour y mettre fin, les autorités ont mené début septembre une opération concertée qui a mobilisé l’Espagne, le Portugal, l’Italie, la Roumanie et la Bulgarie, avec le soutien des équipes spécialisées de Lituanie. Cinq perquisitions ont permis de saisir des comptes bancaires et divers actifs financiers, et d’arrêter les cinq suspects, dont le principal auteur présumé, poursuivi pour fraude à grande échelle et blanchiment d’argent.

Pourquoi ces arnaques continuent de faire mouche
De cette histoire, on retiendra surtout la facilité avec laquelle ces types de fraudes continuent de se développer, alors même qu’on en connaît désormais bien les ficelles. Les fausses plateformes empruntent les codes visuels de sites financiers respectables, promettent des gains rapides et s’appuient sur la complexité technique des cryptomonnaies pour brouiller les repères. Quand vient le moment de retirer l’argent, l’espoir de limiter les pertes pousse souvent les victimes à verser de nouveaux frais, avant que le site disparaisse et que leurs placements s’évaporent.
Au printemps dernier, la police espagnole révélait même une variante encore plus sournoise. Des deepfakes de personnalités locales servaient de caution à de prétendus placements en cryptomonnaies. Plus de deux cents personnes s’y étaient laissées prendre, pour un préjudice évalué à 19 millions d’euros. Quelques mois plus tard, Europol mettait également la main sur un réseau d’une ampleur inédite. Structuré autour de centres d’appels multilingues et de sociétés écrans, il avait attiré près de 5 000 victimes et détourné plus de 540 millions d’euros.
Des affaires qui rappellent à quel point l’argument du rendement rapide continue de faire mouche. Le marché des cryptomonnaies est volatil, mais il peut aussi être extrêmement lucratif, et c’est précisément ce double aspect qui nourrit les illusions de gains faciles. C’est ce qui permet aux escroqueries en ligne de prospérer, mais aussi ce qui, dans le monde réel, a déjà conduit à des violences visant des investisseurs ou des responsables de services crypto, enlevés, rançonnés, parfois même mutilés pour accéder à leurs avoirs.
Raison de plus pour rester prudent, vérifier la légitimité des plateformes d’investissement, ne pas céder à la précipitation et se méfier des promesses tapageuses. Si une offre paraît trop belle pour être vraie, c’est qu’elle l’est probablement.
Source : Eurojust