Le régulateur américain des communications attaque frontalement l’application extraterritoriale du Digital Services Act (DSA). Dans un courrier adressé aux principaux acteurs du numérique, la Federal Trade Commission (FTC) avertit que certaines obligations européennes ne sauraient être valables si elles compromettaient la liberté d’expression ou la sécurité des citoyens américains.

Tech américaines : Washington ordonne la résistance face aux règles européennes ©Shutterstock
Tech américaines : Washington ordonne la résistance face aux règles européennes ©Shutterstock
Proton Business SuiteProton Business Suite
8.7/10

Offre partenaire

Des solutions simples et chiffrées pour protéger votre entreprise

Protection avancée des e-mails, des calendriers, des mots de passe, du réseau… de votre entreprise grâce à la suite d'applications professionnelles sécurisées.

Offre partenaire

DSA : une loi liberticide selon les États-Unis

Adressée à treize entreprises, dont Google, Meta, Amazon, Microsoft et Apple, la lettre de la FTC s’ouvre par une référence claire au Premier amendement de la Constitution américaine. Andrew Ferguson, président de l’autorité, affirme que les plateformes en ligne, comme Twitter, Facebook ou Reddit, jouent un rôle central dans le débat public, et que tout affaiblissement du droit d’expression imposé par une réglementation étrangère serait inacceptable. Selon l'autorité américaine, les pratiques de modération sont trop restrictives pour les internautes américains.

Pour mémoire, le Digital Service Act encadre les propos qui peuvent être tenus sur de telles plateformes :

"La notion de “contenu illicite” devrait être comprise comme se référant à des informations, quelle que soit leur forme, qui, en vertu du droit applicable, sont soit elles-mêmes illicites, comme les discours haineux illégaux ou les contenus à caractère terroriste et les contenus discriminatoires illégaux, soit rendues illicites par les règles applicables en raison du fait qu’elles se rapportent à des activités illégales."

Visiblement bien rangé du côté de Donald Trump, Andrew Ferguson ne se prive pas de tacler l'ancien président Joe Biden et ajoute :

"Non seulement des Américains ont été censurés et bannis des plateformes pour avoir exprimé des opinions et des convictions non partagées par une petite élite de la Silicon Valley, mais l’administration précédente a également agi activement pour favoriser cette censure."

Le chiffrement au cœur de la confrontation

Et puis, il y a l'épineuse question du chiffrement de bout en bout. Ce procédé garantit que seuls l’émetteur et le destinataire d’une messagerie ont accès aux contenus échangés, en excluant les fournisseurs de services ou les autorités. Pour la FTC, promettre un service sécurisé sans recourir au chiffrement lorsqu’il s’impose revient à tromper les utilisateurs. À l’inverse, affaiblir volontairement ce mécanisme pour répondre à des obligations étrangères pourrait être considéré comme une pratique déloyale.

Or, on le sait, pas moins de 32 pays en Europe - dont la France - rêvent de faire interdire le chiffrement au sein des messageries. Ce mécanisme de sécurité les empêcherait de mener à bien leurs enquêtes sur des organisations criminelles. Europol, notamment, a plusieurs fois poussé pour l'entrée en vigueur d'une loi spécifique allant dans ce sens.

On ne peut s'empêcher de souligner le discours hypocrite de la FTC puisque selon le Cloud Act américain, les autorités judiciaires des États-Unis sont en mesure de pouvoir accéder à des données stockées à l’étranger. Est-il également nécessaire de rappeler les pratiques de surveillance massive mises en place par la NSA ou le FBI ? Quoi qu'il en soit, si les GAFAM affaiblissent leur chiffrement en Europe, les agences de renseignement américaines seraient donc désavantagées.

En attendant, les tensions montent entre les deux blocs. Donald Trump a vivement critiqué l'amende de 2,95 milliards d'euros infligée à Google par l'Union européenne pour ses pratiques anticoncurrentielles dans la publicité en ligne. Le président américain a menacé d’imposer des sanctions commerciales à l’Europe si ce type de mesures n’était pas abandonné.

Source : Wired