Des chercheurs ont compilé et analysé les données de plus de 2 000 supernovas pour mesurer l’expansion de l’Univers. Certains résultats ne collent pas avec ce que prédit la théorie d’Einstein.

- Les chercheurs ont analysé 2 373 supernovas pour mesurer l'expansion de l'Univers, révélant des résultats inattendus.
- Les données ne confirment pas clairement l'accélération de l'expansion cosmique, remettant en question certaines théories.
- Bien que l'énergie noire ne soit pas exclue, les preuves d'une accélération constante sont moins solides qu'attendu.
C’est un ensemble de données sans précédent. Le Dark Energy Survey et le Supernova Legacy Survey ont regroupé leurs observations pour établir le catalogue le plus vaste jamais constitué de supernovas de type Ia, ces étoiles qui explosent toujours à la même intensité. Ce type d’objet céleste joue un rôle clé pour mesurer les distances dans l’Univers. Grâce à lui, on peut estimer si l’expansion cosmique accélère, ralentit ou reste constante.
Depuis les années 1990, une majorité de chercheurs s’accorde pour dire que l’Univers est en expansion accélérée, sous l’effet de l’énergie noire. Mais les dernières mesures, publiées dans The Astrophysical Journal, contredisent ce scénario.
Les données récoltées n’indiquent pas forcément une accélération de l’expansion
Pour cette étude, les chercheurs ont rassemblé un corpus de 1 499 supernovas observées depuis le sol et de 874 autres repérées par le télescope spatial Hubble. L’ensemble couvre une période de 10 milliards d’années, soit une grande partie de l’histoire de l’Univers. Ces données ont ensuite été combinées à d’autres mesures précises de la structure du cosmos. Le but est de comparer ce que l’on observe et ce que prédisent les modèles issus de la relativité générale.
Problème : les observations s’écartent légèrement des prédictions, et pas dans le sens attendu. L’accélération de l’expansion ne saute pas aux yeux. « Nous ne pouvons pas dire avec certitude que l’Univers est en expansion accélérée », explique Dillon Brout, chercheur à l’université de Boston et membre du Dark Energy Survey. Même prudence du côté de Daniel Scolnic (Université Duke) et Mathew Smith (Université de Southampton), qui ont participé à l’étude. Tous insistent sur l’ampleur du travail réalisé, mais aussi sur le fait que cette divergence mérite d’être examinée sans tirer de conclusion hâtive.
Le physicien Saul Perlmutter, colauréat du Nobel en 2011 pour la découverte de cette accélération, a aussi commenté les résultats. Il parle d’une recherche « excitante », mais note que l’écart avec le modèle standard reste très léger. D’autres chercheurs, comme Éric Linder (Berkeley Lab) ou Adam Riess (Université Johns Hopkins), restent eux aussi attentifs, sans écarter la possibilité d’un simple biais statistique.

Certains résultats n’excluent plus une expansion linéaire de l’Univers
L’équipe a comparé les mesures à trois scénarios distincts. Dans le premier, l’expansion s’accélère sous l’effet de l’énergie noire. Dans le second, elle ralentit. Le troisième propose une vitesse d’expansion constante. En croisant les données, le modèle d’accélération n’est pas sorti grand vainqueur, contrairement à ce que l’on attendait. Le modèle linéaire donne des résultats presque aussi convaincants.
Cela ne signifie pas que l’énergie noire n’existe pas. Mais les auteurs soulignent que les preuves d’une accélération constante, si elles existent, ne sont pas aussi solides qu’on le croyait. En fait, le bruit statistique, la marge d’erreur, et le fait que la distance des supernovas observées reste parfois difficile à estimer avec précision.
L’analyse ne remet pas à plat l’ensemble des travaux menés depuis vingt-cinq ans. Elle montre plutôt qu’en accumulant les observations avec rigueur, certaines hypothèses autrefois dominantes doivent peut-être être ajustées. Le débat reste ouvert.
Malgré tout, le scénario proposé par Einstein en 1917, la fameuse constante cosmologique, reste compatible avec les données. Même si l’expansion n’accélère pas aussi vite que prévu, l’idée d’une force qui agit à grande échelle pour contrecarrer la gravité n’est pas remise en cause. Ce principe reste l’un des piliers du modèle standard. Il pourrait juste être un peu plus subtil que ce que l’on pensait jusqu’ici.
Source : Berkeley Lab, The Astrophysical Journal, Space.com