Brian Armstrong, Coinbase : "être conforme nous coûte très cher"

23 octobre 2014 à 08h14
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Coinbase est le leader mondial des portefeuilles de bitcoin et il vient de s'ouvrir à 18 pays européens, dont la France. De passage à la Maison du Bitcoin à Paris, son PDG et fondateur, Brian Armtrong, est revenu pour Clubic Pro sur sa vision du marché et sur les atouts de sa plateforme pour les marchands.

Où en est Coinbase en 2014 ?

Coinbase recense à ce jour 1,7 million de clients, ce qui nous permet de revendiquer 24% de parts de marché des portefeuilles de bitcoins. Nous dénombrons aussi 1,9 millions de portefeuilles, 37 000 marchands et 6 000 applications de développeurs. Au cours de l'année dernière, nous avons bouclé dix contrats avec des sociétés à plus de 1 milliard de chiffre d'affaires comme PayPal et Overstock. Nous avons décuplé le volume de transactions en un an seulement. Quant à notre chiffre d'affaires, il s'affiche lui aussi en forte croissance.


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Brian Armstrong, PDG de Coinbase - Crédit : Bloomberg.


En quoi êtes-vous meilleur que les autres ?

En fait nous avons des concurrents dans trois domaines : les portefeuilles pour les clients, les solutions de paiement pour les marchands et le kit de développement pour les développeurs. Nous sommes les seuls à proposer une offre aussi complète. Nous avons les consommateurs et les marchands sur la même plateforme, ce qui permet de proposer un paiement en seulement deux clics. Autre chose : nous pouvons autoriser les débits ce qui est pratique pour les dépenses récurrentes. Nous sommes les seuls à faire cela.

Qu'apportez-vous à un marchand ?

Un commerçant qui choisit Coinbase comme système de paiement ajoute 1,7 million de clients potentiels, correspondant aux personnes détenant un portefeuille. Ensuite, nous proposons des frais inférieurs à ce qu'ils paient pour les cartes bancaires, et décroissants selon le volume, ce qui intéresse les sociétés à faible marge. Enfin, nous savons que beaucoup de ventes se font à l'international mais que 10% des paiements par carte sont refusés pour des raisons de sécurité. Avec le bitcoin et Coinbase, ces paiements seront acceptés.

A-t-on tourné la page de Mt.Gox ?

Mt.Gox appartenait à la première génération de plateforme de bitcoins. Beaucoup de sociétés de cette ère ont d'ailleurs disparu aujourd'hui, et laissé la place à des services plus fiables, qui dialoguent avec des banques et qui ont des investisseurs connus à leur capital, ce qui est un gage de confiance. La sécurité, avec le multi-signature et la publication de comptes annuels, rassure aussi. Depuis que le prix s'est effondré en décembre 2013, après la bulle, le prix du BTC s'est équilibré et est bien remonté, on ne s'y attendait pas.



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Comment garantissez-vous la sécurité ?

Près de 98% des données sont stockées hors-ligne, séparées en plusieurs parties, chiffrées en AES-256 et copiées sur des clés USB FIPS-140 et sur du papier. Concrètement, une donnée est séparée en dix parties, chacune répartie chez des personnes différentes. Pour la restaurer, il faut le consensus de cinq personnes au moins - comme dans les films lorsqu'on voit deux personnes tourner deux clés en même temps pour lancer une attaque nucléaire. Ces données sont stockées dans des serveurs à différents endroits géographiques.

Western Union est-il un concurrent ?

Beaucoup de nos clients utilisent Coinbase pour transférer de l'argent entre particuliers à l'étranger, c'est un très bon système pour cela, car les commissions que nous prélevons sont vraiment inférieures. De ce point de vue, nous sommes un concurrent de Western Union. Mais j'ai entendu qu'ils s'intéressaient également au bitcoin, alors là, nous serions comme partenaires. Mais pour l'instant, nous n'avons rien à annoncer avec eux.

La France est-elle un gros marché pour vous ?

Parmi les 18 nouveaux pays dans lesquels nous venons de lancer Coinbase, la France est la plus populaire. En seulement trois semaines, nous avons déjà enregistré plus de 12 000 inscriptions. Comme aux Etats-Unis à ses débuts, le profil de ces personnes correspond presque tout le temps à un homme de 25 à 35 ans et intéressé par les technologies et la finance. Mais les choses changent aux Etats-Unis, il y a 20% de femmes.

Quel est votre rapport avec la législation, les Etats ?

Nous entretenons un dialogue avec chaque Etat en adoptant une posture humble, sans dire ce qu'il faut faire ou ne pas faire. Nous préférons écouter ce qu'ils ont à dire, et répondre à leurs questions. Encore une fois, les choses ont changé en deux ans et on sent les mentalités évoluer à mesure que la compréhension du bitcoin grandit. Pour autant, cela demande un énorme travail de mise en conformité. Leurs craintes essentielles sont la protection des utilisateurs et la prévention contre le blanchiment d'argent. Huit personnes se chargent de cela chez Coinbase. Nous avons déjà dépensé 2 millions de dollars pour s'assurer de notre conformité.



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Comment luttez-vous contre le blanchiment ?

Nous souscrivons à un programme anti-blanchiment, ce qui est le cas en France. Ainsi nous avons accès à la liste des personnes suspectées par les autorités. De cette façon, et comme nous obligeons nos utilisateurs à s'identifier avec leur carte d'identité et leur photo, nous pouvons potentiellement les retrouver. Plus les personnes achètent de gros montants (au-dessus de 2 000 euros par exemple) et plus le contrôle est accru.

Depuis juin, le BTC baisse. Est-ce un désintérêt ?

Le prix est passé de plus de 650 dollars à environ 380 aujourd'hui, mais cela ne dénote pas du tout un désintérêt car nous voyons le nombre d'utilisateurs augmenter ! Le bitcoin est dans une phase de plateau, ce qu'il connaît pour la troisième fois. Cela fait suite à une forte hausse, et c'est un phénomène normal. Ce que nous remarquons c'est qu'à chaque cycle, la volatilité décroît. Elle était de 200% la première fois, de 100% maintenant. Plus les gens apprennent le bitcoin et plus le prix a tendance à se stabiliser et à rassurer.

Finalement, n'est-ce pas juste un effet de mode ?

Il y a dix ans, ma mère me garantissait que jamais elle n'utiliserait de carte bancaire pour payer sur Internet. Aujourd'hui, elle fait du shopping en ligne toutes les semaines. Ce que je veux dire c'est que ce que l'on considère comme normal un jour peut changer. Comme l'e-mail contre le courrier papier, le bitcoin est plus rapide, plus souple, moins cher... S'il ne remplacera pas les autres devises, au moins les complètera-t-il.

Le monde de la finance veut-il du bitcoin ?

Un chiffre illustre cela : 300 millions de dollars ont été investis par des fonds de capital risques, et autres, dans le bitcoin. C'est autant qu'en 1999 dans le secteur Internet au global. Plusieurs fonds d'investissement proposent par ailleurs à leurs clients d'acheter des bitcoins. A New York, la Bitcoin License a vu le jour pour l'encadrer, mais je la trouve un peu forte. Wall Street est leader dans la finance, ça n'est pas surprenant.

Quels sont vos objectifs à venir ?

Nous sommes maintenant implantés dans 19 pays, mais nous en visons 30. Comme aux Etats-Unis, nous souhaitons attirer en Europe dix marchands au chiffre d'affaires supérieur au milliard de dollars en 2015. Sur le plan des crypto-devises, seul le bitcoin est réellement porteur à ce jour. Si une monnaie virtuelle alternative (« altcoin ») devient intéressante, nous n'excluons pas de saisir l'opportunité.





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