La Coalition for App Fairness interpelle les dirigeants européens et dénonce l'inertie d'Apple. Malgré une décision de non-conformité au Digital Markets Act en avril et une amende de 500 millions d'euros, le géant californien maintiendrait des frais qui contournent les obligations légales.

En avril dernier, la Commission européenne a estimé qu'Apple n'était pas en conformité avec le DMA. Il semblerait que la firme de Cupertino n'en soit pas réellement affectée. La Coalition for App Fairness, qui regroupe des sociétés comme Deezer, Proton et Threema, adresse une lettre ouverte à la présidente Ursula von der Leyen pour dénoncer ce qu'elle qualifie de "mépris flagrant" envers la régulation. Le cœur du litige concerne les frais : alors que le règlement impose aux géants de la technologie de laisser les développeurs proposer des paiements externes sans commission, Apple facture jusqu'à 20% sur ces transactions.
L'amende de 500 millions n'a rien changé
En avril dernier, la Commission avait jugé Apple non conforme et l'avait condamnée à 500 millions d'euros. Officiellement, le groupe a proposé de nouvelles conditions en juin. Officieusement, les développeurs assurent que rien n'a changé sur l'essentiel. La coalition redoute en outre que les nouvelles conditions annoncées pour janvier 2026 ne constituent une nouvelle tentative de contournement. L'incertitude règne : huit mois après la sanction, personne ne sait précisément quelles règles gouverneront les applications à partir de l'an prochain.
Ce flou stratégique paralyserait l'industrie, selon les signataires. Les développeurs et investisseurs français comme européens se verraient obligés de renoncer à de nouveaux projets faute de visibilité sur les coûts. Selon la coalition, Apple, qui a fait appel de son amende, tirerait avantage de cette situation en gardant l'industrie "en otage".
Les États-Unis sont moins tolérants
Outre-Atlantique, ce n'est pas la même histoire. Après le procès intenté par Epic Games, les tribunaux ont ordonné à Apple de permettre aux développeurs de communiquer librement sur leurs offres externes. Les Américains peuvent désormais proposer des paiements alternatifs sans frais. La Cour d'appel du 9e circuit a récemment précisé que les frais imposés par Apple sur les liens externes doivent se limiter aux seuls coûts justifiés et vérifiables. L'argument d'Apple portant sur les frais liés à la sécurité ou la confidentialité n'est donc plus valable.
Les signataires demandent alors pourquoi les consommateurs et développeurs européens accepteraient un sort moins favorable. L'UE a pourtant été pionnière en adoptant le DMA en premier. Or, c'est du côté américain que les avancées concrètes se matérialisent pendant que Bruxelles négocie avec une entreprise qui semble ignorer ses propres règles.
La coalition avertit que sans une application stricte du DMA, le règlement deviendra un exercice administratif coûteux sans réel impact. Les signataires affirment :
Une application stricte du DMA bénéficiera non seulement aux développeurs du monde entier, mais renforcera aussi la position concurrentielle de l'Europe sur la scène numérique mondiale. En garantissant des conditions équitables, une véritable application du règlement permettra aux développeurs européens de rivaliser et de croître à l'échelle globale, tout en attirant les talents du monde entier pour investir en Europe. Sans cela, le DMA aura échoué à créer des marchés numériques plus compétitifs – un véritable gâchis.