Et si le secret d’Intel ne résidait plus dans ses puces, mais dans la boîte qui les contient ? Le fondeur de Santa Clara, un temps boudé, revient sur le devant de la scène en attirant Apple et Qualcomm, non pas pour sa gravure de pointe, mais pour son savoir-faire quasi artisanal en matière d’emballage de puces.

Le packaging avancé d'Intel illustré. © Intel
Le packaging avancé d'Intel illustré. © Intel

On croyait l’histoire déjà écrite. Après quelques déconvenues pour placer son fameux procédé de gravure en 18A, Intel semblait jouer les seconds rôles face à l’ogre taïwanais TSMC. Pourtant, dans les coulisses de la Silicon Valley, un tout autre jeu se prépare. Apple et Qualcomm, deux clients aussi prestigieux qu’exigeants, frappent à la porte d’Intel. La surprise ? Ils ne viennent pas pour les processeurs, mais pour quelque chose de bien plus subtil : l’art de l’assemblage.

Quand la miniaturisation atteint ses limites

Cette valse-hésitation traduit une réalité que l'industrie ne peut plus ignorer : les progrès dans la course à la miniaturisation ralentissent. Graver des transistors toujours plus petits devient un exercice de funambule aux rendements décroissants. La solution ? Empiler et assembler des puces spécialisées, venues d'horizons divers, pour créer des systèmes complexes. Intel avait flairé le filon il y a plusieurs années et possède aujourd'hui un atout maître : ses usines de packaging ne croulent pas sous les commandes, contrairement à celles de TSMC qui suffoquent.

Foveros empile les puces à la verticale grâce à des connexions traversant le silicium, réduisant drastiquement les distances que doivent parcourir les données. Plus besoin d'aligner les composants côte à côte comme des soldats, on les superpose désormais comme des crêpes, avec un gain spectaculaire en bande passante. EMIB, de son côté, joue dans la catégorie 2.5D en intégrant des micro-ponts de silicium directement dans le substrat. Résultat ? Des semaines gagnées en fabrication et des coûts allégés.

La carte géographique dans la manche

Pour Apple et Qualcomm, l'équation dépasse la simple prouesse technique. TSMC règne en maître sur le packaging avancé, mais ses lignes de production tournent à plein régime. Les commandes phénoménales pour les puces d'intelligence artificielle saturent les capacités taïwanaises. Parallèlement, les tensions géopolitiques autour de Taïwan rendent séduisante l'idée d'une alternative américaine.

"La course à la finesse de gravure s’essouffle, la loi de Moore est en berne… Une fois ce constat fait, quand on s'appelle Apple ou Qualcomm, on cherche la performance ailleurs." (Campus d'Intel en Arizona) © Intel
"La course à la finesse de gravure s’essouffle, la loi de Moore est en berne… Une fois ce constat fait, quand on s'appelle Apple ou Qualcomm, on cherche la performance ailleurs." (Campus d'Intel en Arizona) © Intel

Intel exploite des sites en Arizona, au Nouveau-Mexique et en Malaisie. Cette géographie diversifiée constitue une police d'assurance non négligeable pour des entreprises cherchant à échapper à la dépendance envers un unique fournisseur. Le fondeur propose même de migrer les designs existants de TSMC vers ses propres technologies, un passage en douceur qui séduit dans un secteur où requalifier un produit peut prendre des mois.

L'heure de la revanche ?

Intel a rebaptisé sa stratégie « system-level foundry », délaissant le modèle classique pour offrir un menu complet : silicium, emballage, logiciels et optimisation système. Pour Apple, qui conçoit déjà ses propres processeurs séries M et A, l'opportunité d'accéder à des capacités d'intégration supérieures sans tout miser sur TSMC mérite réflexion. Qualcomm, avec ses Snapdragon et ses nouvelles ambitions sur PC, flaire la même aubaine.

Le timing s'avère astucieux. Microsoft pourrait commander des puces Maia 2 chez Intel, validant ainsi le sérieux de la démarche. Pendant que le fondeur américain peinait à transformer ses innovations en contrats sonnants et trébuchants, voilà qu'une porte s'entrouvre. Comme quoi, en technologie, savoir emballer peut parfois rapporter plus gros que savoir graver. Intel a peut-être trouvé son second souffle là où personne ne l'attendait vraiment.

Source : The Verge

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