Le géant japonais a-t-il perdu la tête en vendant toutes ses actions NVIDIA au sommet de sa gloire ? À moins qu'il ne s'agisse d'un coup de maître pour financer une ambition encore plus démesurée, quitte à frôler l'ironie.

C'est l'histoire d'un divorce qui fait jaser dans la Silicon Valley. SoftBank, le mastodonte de l'investissement, a discrètement liquidé sa participation de 5,8 milliards de dollars dans NVIDIA. Un geste qui ressemble à un abandon en rase campagne, alors que le fabricant de puces est au firmament, porté par une frénésie pour l'intelligence artificielle qui semble ne connaître aucune limite.
L'art de se financer... avec l'argent des autres
Sur le papier, la manœuvre est purement comptable. SoftBank a un besoin criant de liquidités pour tenir ses promesses. Le groupe doit verser 22,5 milliards de dollars pour porter son engagement dans OpenAI à 30 milliards, et finaliser le rachat du concepteur de puces Ampere Computing pour 6,5 milliards. Une petite fortune à trouver en un temps record. Pour remplir les caisses, on n'hésite donc pas à vendre les bijoux de famille. Même si le bijou en question est un NVIDIA plus étincelant que jamais. La direction parle d'une décision « pratique », une façon polie de dire que la fin justifie les moyens.
Pourtant, cette explication laisse un arrière-goût de comédie. Car le projet phare d'OpenAI, ce fameux « Stargate » à 500 milliards de dollars, tournera massivement grâce aux puces... NVIDIA. Vendre ses actions pour financer un projet qui enrichira celui dont on vient de se séparer ? Il fallait y penser. On frôle le génie, ou l'absurdité.
Un air de déjà-vu et le spectre de la bulle
Ce retrait spectaculaire n'a pas manqué de donner quelques sueurs froides aux marchés, ravivant les débats sur une IA qui serait en pleine bulle spéculative. D'autant que certains oiseaux de mauvais augure, comme le célèbre Michael Burry (oui, celui du film The Big Short), parient déjà des fortunes sur la chute de l'empire NVIDIA. Avec une valorisation qui a crevé le plafond des 5 000 milliards de dollars, le géant des semi-conducteurs a de quoi donner le vertige. SoftBank jouerait-il la prudence, flairant l'odeur du brûlé avant les autres ? C'est une possibilité, d'autant que l'avertissement sur la folie IA a déjà été lancé par plusieurs experts.

L'autre hypothèse, plus taquine, serait celle d'un mauvais gag qui se répète. En 2019, le groupe avait déjà vendu toutes ses parts de NVIDIA juste avant sa folle ascension, passant à côté d'un gain potentiel de plus de 200 milliards de dollars. Une erreur que Jensen Huang, le patron de NVIDIA, ne manque jamais de rappeler à son ami Masayoshi Son, le fondateur de SoftBank. Alors, SoftBank est-il un visionnaire qui anticipe la fin de la fête, ou un joueur malchanceux qui quitte la table au pire moment ? En misant tout sur OpenAI, dont une faillite aurait un impact colossal, Masayoshi Son fait un pari d'une audace folle. Il se place au centre d'un écosystème interdépendant, un château de cartes aussi brillant que fragile.
Les prochains mois diront si le groupe japonais a eu le nez creux ou s'il vient de commettre, pour la seconde fois, une erreur de calendrier monumentale. Le feuilleton ne fait que commencer.
Source : Tech Radar