Par l'intermédiaire de Clara Chappaz, l'État français a annoncé, mardi, avoir assigné la plateforme Kick en justice après la mort de Jean Pormanove. La ministre de l'Intelligence artificielle et du Numérique promet de mettre fin au « Far West » des plateformes de streaming.

Un peu plus d'une semaine après le drame qui a secoué l'internet français, la riposte s'organise. Irritée par Kick, la plateforme qui hébergeait les violences et même la mort en direct de Raphaël Graven alias Jean Pormanove, l'État a décidé d'assigner le service australien au civil, de lancer une enquête pénale pour plateforme illicite, outre la promesse de réformes profondes du gouvernement. La ministre Clara Chappaz a d'ailleurs réuni différentes autorités de contrôle mardi 26 août pour opérer une bascule dans la régulation des contenus extrêmes.
Avec Kick dans le viseur, l'État français contre-attaque sur tous les fronts
La ministre chargé du Numérique affichait sa détermination sans détour mardi soir. « Kick est mon combat et j'assigne la plateforme en justice », a-t-elle martelé, en ayant indiqué avoir convoqué le même jour tout l'arsenal régulateur français à Bercy, de l'ARCOM à la CNIL, en passant par divers services ministériels. La stratégie de la ministre ? Une assignation de Kick devant le tribunal judiciaire pour stopper net les contenus dangereux. C'est presque du jamais-vu dans le monde des nouvelles technologies.
Au pénal et en parallèle, le parquet de Paris a lancé une enquête contre Kick pour « fourniture en bande organisée de plateforme en ligne illicite ». Concrètement, la justice accuse Kick d'avoir sciemment hébergé et diffusé des contenus violents illégaux. Les sanctions encourues sont lourdes : jusqu'à dix ans de prison et un million d'euros d'amende. L'OFAC, unité spécialisée dans la cybercriminalité, a été chargée de mener l'enquête. Avec comme message lancé aux plateformes que tolérer la violence devient un crime.
Cette offensive judiciaire s'appuie sur une loi récente du 13 juin 2025, qui a renforcé les sanctions pénales contre les plateformes violant le Digital Services Act (DSA), le règlement européen sur les services numériques. Avant cette loi, violer le DSA entraînait surtout des amendes administratives. Maintenant, c'est un délit pénal. Et Kick devient le premier cas d'application majeur de cette nouvelle législation. Les autorités veulent manifestement créer un précédent dissuasif pour tout le secteur du streaming. Et à juste titre !
Le gouvernement veut mettre fin à la monétisation de la violence
Clara Chappaz pense au futur et ne compte pas s'arrêter là. Mission d'inspection pour débusquer les failles, relance de l'Observatoire de la haine en ligne par l'ARCOM, et future « réserve citoyenne du numérique » prévue par la loi SREN… C'est tout un dispositif de surveillance participative qui se dessine. Les citoyens seront de vraies « vigies numériques », selon les mots de la ministre elle-même.
L'épineuse question du business model est aussi dans le collimateur. Comment peut-on monétiser l'humiliation d'un homme jusqu'à sa mort ? Depuis juillet, les députés Arthur Delaporte et Stéphane Vojetta planchent sur l'encadrement de l'économie des créateurs. Car derrière le drame individuel se cache un système économique où les clics et les dons par milliers récompensent l'escalade dans l'horreur.
« Remettre de l'ordre dans le Far West numérique », voilà l'ambition affichée par Clara Chappaz. Cette mobilisation gouvernementale inédite – ARCOM, CNIL, Justice, Intérieur, Culture réunis – sonne comme un ultimatum. Les plateformes qui pensaient pouvoir jouer avec les limites de la dignité humaine au nom du divertissement découvrent que l'État français a décidé de reprendre la main. Il était temps.