La Cour suprême allemande remet en question la légalité des bloqueurs de publicité. Une décision qui pourrait bouleverser notre manière de naviguer sur internet, tout du moins outre-Rhin.

En Allemagne, une affaire oppose depuis plus de dix ans l'éditeur Axel Springer à Eyeo, créateur d'Adblock Plus. La Cour fédérale allemande a partiellement annulé une décision favorable aux bloqueurs, en demandant au passage un réexamen approfondi de potentielles violations du droit d'auteur. Cette bataille juridique pourrait faire de l'Allemagne le deuxième pays après la Chine à interdire ces extensions essentielles.
Les bloqueurs de publicité dans le viseur de la justice allemande
La décision du 31 juillet dernier marque un tournant inquiétant dans cette saga judiciaire, qui fait même réagir Mozilla. Jusqu'ici, les tribunaux allemands avaient majoritairement validé la légalité des extensions bloquant les publicités, considérant qu'elles ne faisaient que permettre aux utilisateurs de choisir comment afficher les pages web sur leur navigateur.
La Cour suprême demande maintenant aux tribunaux inférieurs d'examiner précisément quelles parties du code des sites web sont modifiées. Elle questionne si ce code bénéficie d'une protection au titre du droit d'auteur et dans quelles conditions une telle interférence pourrait être justifiée légalement.
Mozilla tire justement la sonnette d'alarme dans son billet. La fondation compare l'usage d'un bloqueur à l'action de zapper pendant les publicités télévisées. En somme, pour elle, c'est un droit dont chacun peut jouir ou non. L'organisation souligne ainsi l'absurdité de considérer comme une violation du copyright ce qui relève simplement du choix de l'utilisateur sur son propre appareil.
Une menace pour la liberté numérique et la cybersécurité
Les implications dépassent d'ailleurs le simple blocage publicitaire, puisqu'elles touchent directement notre sécurité en ligne. Les extensions de navigateur nous protègent contre le phishing, le tracking invasif, les codes malveillants et les tentatives d'empreinte numérique qui compromettent notre vie privée quotidiennement.
Un navigateur incapable de filtrer le contenu qu'il affiche deviendrait une porte ouverte aux cybermenaces. Les bloqueurs sont encore vus comme un rempart essentiel contre ces risques, en ce qu'ils permettent aux internautes de personnaliser leur expérience, tout en renforçant leur protection contre les contenus potentiellement dangereux.
L'affaire retourne maintenant devant les juridictions inférieures pour des investigations complémentaires. Le verdict définitif pourrait prendre encore deux ans, laissant planer une épée de Damoclès sur l'avenir du web ouvert et de l'autonomie des utilisateurs en Europe.