La bataille judiciaire qui oppose Epic Games à Apple prend une nouvelle dimension : Y Combinator, pépinière de géants du numérique, vient de monter au créneau pour dénoncer la « taxe » de l’App Store. Le soutien inattendu de cet accélérateur pèse lourd dans la balance et ravive un affrontement déjà riche en rebondissements.

- Y Combinator soutient Epic Games contre la commission de 30% d’Apple, dénonçant un frein à la rentabilité des apps et au financement des startups.
- La justice américaine a déjà contraint Apple à assouplir certaines règles; Epic a réintroduit des liens de paiement externes sur iOS.
- L’affaire pourrait pousser vers des alternatives (PWA, paiements externes) et influencer régulations comme le DMA, impactant tout l’écosystème mobile.
Depuis plusieurs années, Epic Games conteste les 30% prélevés par la boutique d’apps d’Apple, accusant le groupe de verrouiller son écosystème. Plusieurs décisions de justice ont déjà contraint Cupertino à assouplir ses règles, sans toutefois modifier la commission jugée prohibitive. L’entrée en scène de Y Combinator, fort de centaines de licornes passées par ses bancs, rebat les cartes et expose plus que jamais l’enjeu pour l’ensemble des jeunes pousses mobiles.
Un poids lourd du financement : Y Combinator monte au front
Créé en 2005, Y Combinator a forgé la réussite de plateformes aussi célèbres qu’Airbnb ou Stripe. Son amicus brief décrit une commission de 30% comme un frein direct à la rentabilité des applications. L’incubateur estime qu’une telle ponction empêche les nouveaux entrants d’atteindre la rentabilité nécessaire pour lever des fonds.
En qualifiant la politique tarifaire d’Apple d’« obstacle structurel », l’accélérateur adresse un message clair à la communauté venture capital. Financer une start-up mobile signifierait désormais parier sur un modèle amputé d’un tiers de ses revenus. Ce constat pourrait rediriger des capitaux vers des solutions web ou multi-plateformes, échappant à l’environnement iOS.
Y Combinator affirme déjà constater un regain d’intérêt pour les projets mobiles depuis les récentes injonctions judiciaires imposées à Apple. La possibilité pour un développeur de rediriger ses utilisateurs vers un paiement externe sans crainte de représailles change la donne économique. Les créateurs d’apps à faible marge (jeux, éducation ou services créatifs) voient dans cette brèche une opportunité de croissance durable.

Apple face à une jurisprudence qui s’épaissit
Au printemps, la justice américaine a rappelé Apple à l’ordre pour avoir restreint la mention de moyens de paiement tiers, malgré un jugement de 2021. Cupertino avait alors introduit un prélèvement de 27% sur les achats externes, tentative vite retoquée par la cour d’appel. Ce contournement a renforcé l’argument selon lequel la firme abuse de sa position dominante.
Apple évalue à plusieurs milliards de dollars l’impact potentiel d’une ouverture totale aux paiements directs. Les revenus générés par l’App Store dépassent déjà ceux de grands éditeurs de jeux, faisant du service une vache à lait difficile à sacrifier. La Cour estime pourtant que la valeur ajoutée apportée par la plateforme ne justifie pas un tel pourcentage, surtout pour des transactions entièrement réalisées hors écosystème.
Le retour de Fortnite sur iOS, après des années d’exclusion, illustre l’érosion progressive du contrôle d’Apple. Epic Games a pu y réintroduire des liens de paiement extérieurs, test grandeur nature des nouvelles règles. Cette réapparition sonne comme un avertissement : d’autres éditeurs pourraient suivre, menaçant la rente historique de la marque à la pomme.
Quelles répercussions pour l’écosystème mobile ?
En Europe, le Digital Markets Act oblige déjà Apple à autoriser des boutiques tierces. Les jeunes pousses françaises, jusque-là bridées par les frais, évaluent désormais la faisabilité d’offres freemium plus compétitives. L’écosystème local espère profiter d’un climat réglementaire plus favorable pour attirer des financements transatlantiques.
Le débat relance l’intérêt pour les Progressive Web Apps, accessibles via un simple navigateur et contournant les stores. Certains développeurs misent aussi sur des systèmes d’abonnement directs, inspirés des plateformes de streaming. Ces alternatives, encore minoritaires, pourraient gagner du terrain si la commission d’Apple demeure inchangée.
La coalition formée autour d’Epic Games réunit désormais Microsoft, Meta, X et Match Group : autant d’acteurs dénonçant la même barrière économique. Si la justice confirmait une limitation stricte des commissions, Google Play ou même les marketplaces d’e-commerce pourraient être invités à revoir leurs pratiques. L’enjeu dépasse donc largement la sphère du jeu vidéo pour toucher l’ensemble du commerce numérique.
Source : MacRumors