La Commission européenne a dévoilé, vendredi, un arsenal renforcé contre la fraude à la TVA. Le Parquet européen et l'Office européen de lutte antifraude vont pouvoir échanger en temps réel leurs données avec les États membres.

L'Europe s'attaque enfin aux fraudeurs fiscaux qui lui volent des dizaines de milliards chaque année. © PawelKacperek / Shutterstock
L'Europe s'attaque enfin aux fraudeurs fiscaux qui lui volent des dizaines de milliards chaque année. © PawelKacperek / Shutterstock

L'Union européenne passe à l'offensive pour débusquer et faire tomber les fraudeurs à la TVA. Ce vendredi 14 novembre 2025, Bruxelles a dévoilé sa stratégie pour en finir avec ceux qui échappent encore trop facilement aux contrôles. La fraude carrousel à elle seule coûte jusqu'à 32,8 milliards d'euros par an aux contribuables européens. Pour essayer de maîtriser le phénomène, la Commission mise sur une arme redoutable, à savoir le partage massif et instantané d'informations fiscales entre autorités et pays.

Un partage d'informations fiscales en temps réel pour traquer la fraude

La nouvelle proposition de la Commission établit enfin une base juridique claire pour l'échange d'informations entre le Parquet européen, l'Office européen de lutte antifraude (OLAF) et les États membres. Concrètement, ces institutions pourront désormais consulter instantanément les données relatives à la TVA. Un changement majeur qui devrait permettre, selon Bruxelles, « une évaluation rapide des enquêtes en matière de fraude à l'échelle de l'UE ».

Le cœur du dispositif repose sur la déclaration numérique en temps réel des échanges transfrontaliers, introduite dans le cadre du paquet « TVA à l'ère numérique ». Cette numérisation va transformer la surveillance fiscale en Europe. Les États membres obtiendront ainsi « les informations précieuses dont ils ont besoin pour intensifier la lutte contre la fraude à la TVA, en particulier la fraude carrousel ». La fraude carrousel est un montage où des entreprises fictives échangent des biens pour détourner la TVA et disparaître avant de payer.

Les chiffres rappelés par l'UE sont vertigineux. Cette fraude carrousel à elle seule représente entre 12,5 et 32,8 milliards d'euros de pertes annuelles pour l'UE. Mais ce n'est qu'une partie du problème. L'écart total de TVA – c'est-à-dire tout l'argent que l'Europe devrait collecter mais ne perçoit pas – s'élevait à 89,3 milliards d'euros en 2022. Un gouffre financier que Bruxelles veut enfin combler.

Le numérique au service de la lutte contre les organisations criminelles

Au-delà des montants astronomiques, la proposition de la Commission vise à créer des canaux de communication directs entre tous les acteurs. Le Parquet européen, l'OLAF et Eurofisc (le réseau européen de fonctionnaires nationaux spécialisés) pourront en effet coordonner leurs enquêtes transfrontières et « partager des renseignements critiques en temps réel ». Les outils de coopération libéreront les échanges sécurisés d'informations fiscales.

Bruxelles veut que « les activités frauduleuses puissent être rapidement identifiées, arrêtées et poursuivies ». Des solutions numériques, nouvelles et existantes, vont être pleinement exploitées pour sécuriser les échanges. L'idée sera de créer un environnement commercial équitable. Un enjeu d'autant plus important que la fraude carrousel, rappelle Bruxelles, « est fréquemment orchestrée par des organisations criminelles ».

La balle est maintenant dans le camp du Conseil et du Parlement européens, qui devront approuver la proposition. Les modifications entreront en vigueur après leur publication au Journal officiel de l'UE. C'est en tout cas un signal fort envoyé, alors que la France a justement adopté, le 6 novembre, son propre fichier national pour traquer les comptes bancaires suspects.