La nouvelle loi du 6 novembre 2025 crée un fichier national des comptes bancaires suspects pour lutter contre la fraude. La Banque de France centralisera ces informations partagées entre établissements financiers.

Pour essayer d'endiguer l'explosion de la fraude bancaire, la France a décidé de renforcer son arsenal législatif. La loi du 6 novembre 2025, publiée le lendemain au Journal officiel, instaure un dispositif inédit. Un fichier centralisé, qui recense les comptes jugés douteux, fait son apparition et sera accessible aux banques ainsi qu'aux prestataires de paiement. L'objectif est de détecter et bloquer les fraudeurs avant qu'ils ne frappent.
Un fichier centralisé pour partager les informations sensibles et débusquer les fraudeurs
Le FNC-RF, voilà un petit nom qui devrait retenir votre attention. Ce « Fichier National des Comptes signalés pour Risque de Fraude » n'est autre que la pièce maîtresse du nouveau dispositif voté. Son rôle consiste à rassembler les références bancaires des comptes détectés par les systèmes internes de surveillance des établissements. On parle ici d'une mutualisation qui permettra enfin aux acteurs financiers de croiser leurs alertes et de repérer les profils louches.
La Banque de France hérite de la gestion de ce fichier, d'ailleurs entièrement financé par les contributions du secteur bancaire, l'État n'y met pas un sou. Les Urssaf pourront aussi alimenter cette base en remontant les comptes suspects de fraude sociale. Un maillage serré qui devrait compliquer sérieusement la vie des escrocs habitués à jongler entre plusieurs établissements pour brouiller les pistes.
Évidemment, un tel fichier soulève des questions de protection des données. Pour respecter le RGPD, l'accès au FNC-RF sera strictement limité à un nombre restreint de personnes. La CNIL devra également rendre un avis sur les règles de collecte, de conservation et de consultation des données. Des garde-fous indispensables pour éviter les dérives et garantir les droits des citoyens.
Le fichier des chèques irréguliers renforcé pour lutter contre la falsification
Cette nouvelle loi se base sur le droit européen désormais en vigueur. Depuis le 9 octobre 2025, les pays de la zone euro doivent proposer un service gratuit de vérification des coordonnées bancaires. En juin 2023, Bruxelles avait publié une proposition de règlement prévoyant justement ce type de partage d'informations entre prestataires de paiement sur les comptes suspects.
La France joue donc les pionniers en créant son fichier par anticipation. Le texte renforce aussi le fichier national des chèques irréguliers, déjà géré par la Banque de France. La nouveauté, c'est que les banques émettrices devront systématiquement signaler tout chèque rejeté pour falsification ou contrefaçon. Les établissements pourront également consulter ce fichier lors d'un encaissement de chèque.
L'Observatoire de la sécurité des moyens de paiement intégrera des indicateurs de performance du FNC-RF dans son rapport annuel. De quoi mesurer l'efficacité réelle du dispositif. Un décret d'application devra par ailleurs préciser les modalités de fonctionnement du fichier des chèques irréguliers. La mise en œuvre concrète se dessine donc progressivement. Et la machine anti-fraude, elle, est en marche.
Côté secteur privé aussi, les initiatives se multiplient. Il y a quelques jours, nous apprenions que Mastercard lançait sa solution « Threat Intelligence », fruit de son partenariat avec Recorded Future. Durant six mois de tests, la plateforme a identifié près de 9 500 sites e-commerce compromis, pour environ 120 millions de dollars de fraudes potentielles interceptées. Public et privé se remuent contre la fraude, et c'est tant mieux.