La Commission européenne a indiqué jeudi avoir une enquête contre Google pour violation potentielle du Digital Markets Act, le DMA. Elle soupçonne une politique qui pénalise les médias dans les résultats de recherche.

Google est de nouveau dans le viseur de Bruxelles. Ce jeudi 13 novembre 2025, la Commission européenne a officiellement communiqué pour annoncer l'ouverture d'une procédure officielle contre la firme de Mountain View, accusée de bafouer les règles du jeun numérique du Vieux continent. L'enquête cible la « politique d'abus de réputation de site » qui rétrograderait les médias d'information lorsqu'ils monétisent leurs contenus à l'aide de partenaires commerciaux.
Google accusé de pénaliser les médias et leur référencement
Au cœur du problème, on retrouve donc ce que Bruxelles appelle la « politique d'abus de réputation de site » de Google. Concrètement, quand un média publie des articles sponsorisés ou du contenu créé par ou avec des partenaires commerciaux pour générer des revenus, Google considère cela comme une tentative de manipulation de ses algorithmes. La sanction serait immédiate, et le site descendrait dans le classement des résultats de recherche, perdant ainsi une partie cruciale de son autorité, mais aussi et surtout de son audience.
Il ne faut pas oublier que depuis septembre 2023, Google Search, donc le moteur de recherche, est officiellement classé comme « contrôleur d'accès » par la Commission, c'est-à-dire qu'il a l'obligation de respecter le Digital Markets Act, la législation sur les marchés numériques, et ce, depuis mars 2024. Ce statut impose au géant américain d'appliquer des conditions transparentes, équitables et non discriminatoires dans son classement. Manifestement, l'Europe estime que ce n'est pas le cas avec cette politique qui frappe les éditeurs.
Pour la Commission, le problème est beaucoup plus large qu'une querelle technique. C'est toute la liberté économique des médias qui est en cause. Un éditeur peut-il décider librement de ses sources de revenus (publicités, contenus sponsorisés, partenariats) sans que Google le sanctionne dans son référencement ? Ou doit-il se plier aux exigences du moteur de recherche pour rester suffisamment visible ?
Bruxelles se donne douze mois pour conclure son enquête
Bruxelles veut donc taper du poing sur la table. À commencer par Teresa Ribera, vice-présidente exécutive de la Commission européenne. « Nous enquêterons pour nous assurer que les éditeurs de nouvelles ne perdent pas des revenus importants à un moment difficile pour l'industrie », déclare-t-elle ce jeudi. Sa collègue Henna Virkkunen, en charge de la souveraineté technologique, de la sécurité et de la démocratie, enfonce le clou en parlant de protéger « le pluralisme des médias et notre démocratie », rien que ça.
Qu'on se le dise, l'enquête prendra du temps. D'abord, la Commission va enquêter pendant un an maximum. Si elle trouve des preuves que Google viole les règles, elle lui dira ce qu'elle lui reproche et Google pourra se défendre ou changer ses pratiques. Attention, à la décharge de l'entreprise au moteur de recherche, rappelons qu'enquête ne veut pas automatiquement dire condamnation. Mais historiquement, quand Bruxelles attaque un géant de la tech, ça finit rarement bien pour l'entreprise visée. Et Google, condamnée à 3 milliards d'euros d'amende par l'Europe encore en septembre, en sait quelque chose.
Les sanctions encourues sont importantes. Si Google est reconnu coupable, l'amende pourrait atteindre 10% de tous les revenus mondiaux d'Alphabet sur un an, soit des milliards d'euros. En cas de nouvelle violation, ce pourcentage passerait à 20%. Et si Google persiste, Bruxelles dispose du pouvoir de forcer la vente de certaines activités, ou d'interdire toute acquisition future. Difficile de faire plus dissuasif.
« Malheureusement, l'enquête annoncée aujourd'hui sur nos efforts anti-spam est totalement malavisée et risque de nuire à des millions d'utilisateurs européens », a réagi le directeur scientifique de Google Search, Pandu Nayak. « Si nous autorisions ce comportement — laisser les sites utiliser des tactiques douteuses pour améliorer leur classement, au lieu d'investir dans la création de contenu de haute qualité — cela permettrait aux acteurs malveillants de supplanter les sites qui n'utilisent pas ces tactiques de spam, et cela dégraderait la recherche pour tous », a-t-il ajouté. La réponse du berger à la bergère.