La plateforme chinoise Shein est accusée d'avoir vendu des poupées à caractère pédocriminel. Le ministre de l'Économie, Roland Lescure, menace désormais d'interdire l'accès au site en cas de récidive.

À quelques heures de l'ouverture de son premier magasin physique au BHV parisien, le géant Shein, qui a poussé Disneyland Paris à claquer la porte du célèbre bâtiment, est pris dans un nouveau scandale. Le 31 octobre, la Répression des fraudes a signalé à la justice avoir fait une découverte glaçante, en l'occurrence des poupées sexuelles d'apparence enfantine en vente sur la plateforme. Haute de 80 centimètres, brune aux cheveux tressés, l'une d'elles était vendue plus de 200 euros avec un descriptif sans équivoque et des commentaires d'acheteurs. En réaction, le gouvernement menace de bannir Shein de France.
Shein évoque des défaillances majeures de ses contrôles
Que s'est-il passé du côté de Shein ? La plateforme de fast-fashion ultra-populaire reconnaît des « défaillances majeures ». Un euphémisme qui masque mal le dysfonctionnement des systèmes de contrôle du géant chinois. Dès le 1er novembre, la plateforme a retiré les produits et lancé une enquête interne. Son porte-parole a tenté de rassurer. « Nous prenons cette situation extrêmement au sérieux. Ce type de contenu est totalement inacceptable et va à l'encontre de toutes les valeurs que nous défendons », a-t-il indiqué.
Mais le ver est dans le fruit du modèle économique lui-même. Comme Amazon ou Aliexpress, Shein s'appuie massivement sur des vendeurs tiers. La moitié des produits proposés quotidiennement aux 23 millions de clients français échappe donc au contrôle direct de l'entreprise. Le système de marketplace privilégie par définition la vitesse et les volumes, au détriment de la modération et d'une surveillance complète des produits mis en vente, ce qui a permis à ces objets pédocriminels de trouver des acheteurs.
Le problème va d'ailleurs au-delà de Shein, puisqu'un produit identique a été débusqué sur Aliexpress avant d'être retiré dans la nuit du 2 au 3 novembre. Amazon traîne lui aussi ce boulet depuis des années. En 2022, la justice française avait condamné un trentenaire de Dieppe pour l'achat d'une poupée similaire sur le site américain.
La France hausse le ton et menace ouvertement Shein
Sur le plateau de BFMTV ce lundi 3 novembre, Roland Lescure n'a pas tergiversé. Le ministre de l'Économie l'affirme : en cas de récidive ou si les objets ne disparaissent pas sous 24 heures, il demandera l'interdiction pure et simple de l'accès de Shein au marché français. « Ces objets horribles, ils sont illégaux » ajoute-t-il, en annonçant en parallèle une enquête judiciaire.
Sarah El Haïry, haute-commissaire à l'Enfance, ne compte pas en rester là. Elle annonce vouloir convoquer toutes les grandes plateformes de commerce en ligne. Elle se fixe l'objectif d'obtenir les fichiers des acheteurs français, donc leur identité, comme le réclame aussi l'association Mouv-Enfant. « Les gens qui ont acheté ces poupées ont utilisé leur carte de crédit, ils se sont fait livrer à leur domicile ou à leur bureau », rappelle-t-elle, pointant les « entourloupes » de sites masquant leurs descriptions pour échapper aux filtres. Les VPN ont aussi été pointés du doigt.
La diffusion de contenus pédopornographiques expose ses auteurs à sept ans de prison et 100 000 euros d'amende. Mais Shein fait face à un second chef d'accusation, qui est l'absence de filtrage efficace pour protéger les mineurs qui naviguent sur son site. Ce manquement peut ajouter trois ans de prison et 75 000 euros d'amende supplémentaires.
