Le MF19, métro de nouvelle génération, est entré en service ce 16 octobre sur la ligne 10 à Paris. Climatisé, connecté et éco-conçu, il préfigure la transformation de la moitié du réseau francilien, qui prendra plusieurs années.

Bienvenue à bord du MF19, en photo jeudi matin lors de la célébration de son arrivée sur la ligne 10 © Île-de-France Mobilités
Bienvenue à bord du MF19, en photo jeudi matin lors de la célébration de son arrivée sur la ligne 10 © Île-de-France Mobilités

Les habitués de la ligne 10 ont découvert un métro d'un autre genre ce jeudi. Les MF67 vieillissants laissent leur place au modèle MF19, un concentré de technologies qui va progressivement remplacer les anciennes rames sur huit des lignes parisiennes. Avec des écrans d'information en temps réel, la climatisation et même des prises USB, en plus d'intercirculation totale, les rames du MF19 incarnent l'ambition d'Île-de-France Mobilités de hisser le réseau francilien au rang des plus modernes du monde.

Le détail des innovations du nouveau métro parisien

À quoi ressemble le MF19 ? La climatisation embarquée est peut-être la nouveauté la plus attendue par les usagers de la ligne 10 notamment. La ventilation réfrigérée met fin à des décennies de voyages étouffants en période estivale particulièrement. Mais le confort du MF19 va bien au-delà. L'éclairage LED diffuse une lumière naturelle qui rompt avec l'ambiance des anciennes rames. Les sièges, disponibles dans des versions fixes ou rabattables selon les configurations, arborent des couleurs vives (rouge, bleu et vert) qui dynamisent l'intérieur.

Toujours à bord, l'information voyageur fait un bond de géant. Des écrans dispatchés un peu partout affichent en temps réel la prochaine station, les correspondances disponibles, les perturbations éventuelles et les sorties. Vous n'avez plus besoin de tendre l'oreille pour comprendre un message sonore parasité. Les ports USB, intégrés aux parois, permettent enfin de recharger téléphones et tablettes pendant le trajet. Voilà autant de petits détails qui, mine de rien, changent la vie des trajets quotidiens.

La conception « boa » à intercirculation intégrale est un autre atout du MF19. Sur toute la longueur de la rame, c'est-à-dire entre 61 et 77,5 mètres selon les versions à quatre ou cinq voitures, les voyageurs circulent librement d'un bout à l'autre. Cette fluidité retrouvée réduit les attroupements aux portes, et permet une meilleure répartition dans le train. Pour l'accessibilité, les portes élargies facilitent l'entrée des personnes à mobilité réduite, tandis que des espaces leur sont spécifiquement réservés. La vidéoprotection généralisée vise aussi à renforcer le sentiment de sécurité.

Le métro MF19 et ses premiers passagers © Île-de-France Mobilités
Le métro MF19 et ses premiers passagers © Île-de-France Mobilités

Deux versions pour s'adapter aux besoins de chaque ligne

Île-de-France Mobilités et la RATP ont développé deux configurations distinctes du MF19. Vous pouvez monter à bord d'une version « confort », destinée aux lignes 3, 10 et 12, avec 146 places assises (102 fixes et 44 rabattables,) pour une capacité totale de 586 voyageurs, extensible à 828 aux heures de pointe. Cette disposition rappelle notamment celle du MP14 qui équipe la ligne 11.

La version « capacitaire », elle, cible les lignes ultra-fréquentées, à savoir les lignes 7, 8 et 13. Elle réduit les places assises à 122 (90 fixes et 32 rabattables) au profit de l'espace debout, et peut atteindre 844 voyageurs au plus fort de l'heure de pointe, contre 592 en conditions normales. La RATP et Île-de-France Mobilités voient ces deux versions comme une réponse aux quatre secondes de retard prises en station à cause de voyageurs bloquent les portes et font perdre l'équivalent d'un train par heure sur la ligne. La fluidité des montées-descentes devient donc un paramètre de performance du réseau.

C'est un sacré changement parisien, car jusqu'ici, chaque ligne disposait d'un matériel spécifique. Le MF19 adopte une approche standardisée sur huit lignes, ce qui permet de générer d'importantes économies en conception, ingénierie et maintenance. Le train peut même basculer d'une conduite manuelle à une conduite automatique, de quoi anticiper les futures automatisations du réseau.

Un chantier à 7 milliards d'euros étalé sur une décennie

C'est Île-de-France Mobilités qui finance intégralement ce programme, estimé à 7 milliards d'euros, répartis entre 3 milliards pour les 410 trains commandés à Alstom, et 4 milliards pour moderniser l'ensemble de l'écosystème, c'est-à-dire les ateliers de maintenance, les infrastructures et les systèmes d'exploitation. La ligne 10 inaugure d'ailleurs un déploiement qui s'étalera jusqu'en 2033.

D'ici l'été 2027, les 30 rames MF67 de la ligne 10 seront entièrement remplacées. Les lignes 7bis, 3bis et 13 suivront jusqu'en 2027, avant les lignes 12 et 8 entre 2028 et 2029, puis les lignes 3 et 7 entre 2031 et 2033. Au final, 50% des lignes du métro parisien circuleront avec ce matériel nouvelle génération. Quelque 600 millions de voyageurs annuels en bénéficieront.

Autre aspect positif du MF19, le freinage 100% électrique et l'éclairage LED permettent de réduire de 25% la consommation énergétique par rapport aux anciennes rames. Sur un réseau qui transporte chaque jour des millions de passagers, ces gains environnementaux acquièrent une dimension concrète. Le freinage électrique améliore également la capacité à freiner lors des arrivées en station, contribuant à la régularité du service.

Une prouesse technique qui transforme tout le réseau

Neuf mois d'essais intensifs ont permis de valider les performances du matériel, avec trois trains tests circulant sur la ligne 10 et d'autres lignes du réseau. Les équipes ont à la fois testé l'assistance à la conduite, l'information voyageurs et les systèmes de sécurité. En parallèle, la RATP a lancé un vaste programme de modernisation des infrastructures.

Les ateliers de maintenance en font partie. À Vaugirard, pour la ligne 12, l'atelier actuel est en train d'être reconstruit, le tout en maintenant l'exploitation quotidienne. Saint-Fargeau, qui entretiendra les 62 rames des lignes 3, 3bis et 7bis, sera équipé d'une passerelle à altimétrie variable. Les équipes de maintenance pourront intervenir sur les toitures et façades des trains.

Nouvel aperçu du M19 © Île-de-France Mobilités

La ligne 7 voit son atelier historique de Porte de Choisy, construit en 1931 puis modernisé dans les années 1970, remplacé par un site ultramoderne à La Courneuve, capable d'entretenir les rames des lignes 7 et 10. La ligne 8 disposera d'un nouvel atelier à Créteil Valenton qui pourra accueillir jusqu'à 22 rames. Sur la ligne 13, une extension de l'atelier de Châtillon intégrera un nouveau hall à quatre voies équipé de heurtoirs mobiles pour fluidifier les opérations, avec toutes les normes environnementales comme la récupération de chaleur, l'isolation et les toitures végétalisées.

La signalisation fait aussi sa révolution. Le déploiement du système Octys, fourni par Alstom, accompagne l'arrivée du MF19. Ce système de contrôle et pilotage automatique, déjà opérationnel sur les lignes 5, 6, 9 et 11, permet d'envisager des renforts d'offre. Pour la ligne 13, ultra-saturée aux heures de pointe, Île-de-France Mobilités prévoit carrément l'automatisation totale d'ici 2035. Des MF19 en conduite automatique circuleront alors avec un passage de train en moyenne toutes les 90 secondes. Cette automatisation, confiée à Siemens Mobility pour un montant d'1,4 milliard d'euros, nécessitera l'installation de portes palières sur l'ensemble des quais, qui sécuriseront les stations et réduiront les incidents techniques.

Une mobilisation industrielle sans précédent

Pour ce chantier titanesque, Alstom mobilise plus de 2 300 collaborateurs répartis sur huit sites français. Le constructeur a ouvert récemment une nouvelle ligne de fabrication à Valenciennes. Car les équipes sont mobilisées pour poursuivre les livraisons selon le calendrier prévu. Du côté de la RATP, les conducteurs et techniciens suivent des formations spécifiques sur ce matériel nouvelle génération, qui est un véritable saut technologique par rapport aux MF67, MF77 et MF88 actuellement en service.

Pour la première fois depuis 40 ans, des rames de métro arrivent à Paris par voie ferrée, plutôt que par camion. Les Ateliers de la Villette, directement reliés au réseau ferré national, reçoivent carrément des trains complets depuis Valenciennes. Cela évite le démontage-remontage habituellement nécessaire. Les rames qui ne peuvent être acheminées aux Ateliers de la Villette rejoignent temporairement l'atelier de Bobigny (ligne 5) en attendant la mise en service du nouveau hall de maintenance de Châtillon pour la ligne 13.

Cette mise en service du MF19 marque en tout cas le début d'une transformation profonde du métro parisien. D'ici 2033 ou 2034, la moitié des lignes circulera avec ces trains nouvelle génération, ce qui validera l'ambition portée depuis 2016 par Île-de-France Mobilités de faire du réseau francilien une référence mondiale en matière de transport urbain moderne, accessible et durable.