SAP, l'éditeur allemand de logiciels d'entreprise, annonce un investissement majeur sur dix ans pour développer son infrastructure cloud européenne. Pour l'entreprise de Walldorf, il s'agit de mieux concurrencer les géants américains du secteur tout en se positionnant sur la souveraineté numérique de l'UE.

SAP repositionne sa stratégie cloud avec une initiative d'envergure européenne. L'entreprise allemande engage plus de 20 milliards d'euros sur dix ans pour construire une offre de cloud souverain entièrement opérée depuis l'Europe.
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Une réponse technique aux contraintes réglementaires
L'architecture proposée par SAP repose sur trois composants distincts. La première solution, SAP Cloud Infrastructure, s'appuie sur un réseau propriétaire déployé dans les centres de données européens de l'entreprise. De cette manière, l'ensemble des données clients demeurent physiquement et juridiquement dans l'Union européenne.
La seconde option, SAP Sovereign Cloud On-Site, installe l'infrastructure directement dans les centres de données des clients tout en conservant l'exploitation technique sous la responsabilité de SAP. Cette modalité vise les environnements les plus sensibles où le contrôle physique local constitue une exigence absolue.
Le troisième volet concerne Delos Cloud, la filiale allemande détenue intégralement par SAP et certifiée par le BSI, l’Office fédéral de la sécurité des technologies de l’information allemand. Bien que cette solution utilise la technologie Azure de Microsoft, SAP maintient le contrôle opérationnel complet, et cela inclut la gestion des mises à jour de sécurité et l'isolation réseau.
Thomas Saueressig, membre du directoire de SAP, précise que cette approche répond à quatre dimensions de souveraineté : données, opérationnelle, technique et juridique. D'ailleurs, pour éliminer tout risque de compromission, l'entreprise recrute exclusivement des techniciens européens pour la mise en place et la gestion de ces infrastructures.
Un positionnement face aux géants américains
SAP entend répondre directement aux hyperscalers américains qui dominent actuellement le marché européen du cloud. Amazon Web Services a lancé son European Sovereign Cloud avec une première région en Allemagne, tandis que Microsoft développe ses solutions Sovereign Public Cloud et National Partner Clouds.
L'investissement de SAP se décompose entre l'infrastructure matérielle, notamment les processeurs graphiques nécessaires aux applications d'intelligence artificielle, la recherche et développement, et les équipes opérationnelles locales.
Et le pari semble déjà gagné pour SAP puisque l'entreprise accueille le groupe allemand Hensoldt, spécialisé l'électronique militaire et dans la défense. Étant donné la nature sensible de ses activités, ce dernier a préféré migrer vers cette nouvelle infrastructure plutôt que d'adopter une solution américaine soumise au Cloud Act et au Patriot Act.
Si cet investissement de 23 milliards d'euros est colossal, SAP n'est toutefois pas le chevalier blanc européen. L'entreprise emploi 17 000 personnes aux États-Unis et sous la pression de l'administration Trump, elle annonçait, en mai dernier, renoncer à plusieurs de ses mesures d’inclusion et de diversité, notamment à son objectif d’atteindre 40% de femmes parmi l’ensemble de ses employés. L'année dernière, le groupe supprimait 8000 postes, soit 8% de sa masse salariale, tout en renforçant massivement ses investissements dans le domaine de l'intelligence artificielle. Une stratégie que Microsoft a mise en place cet été.