Will et Holly Alpine ont quitté Microsoft en 2024 pour protester contre les contrats de l'entreprise avec l'industrie pétrolière. Le couple dénonce l'usage de l'IA pour augmenter la production de combustibles fossiles.

- Will et Holly Alpine ont quitté Microsoft en 2024 pour dénoncer son partenariat avec l'industrie pétrolière.
- Ils ont fondé l'Enabled Emissions Campaign pour alerter sur les émissions de CO2 générées par ces contrats.
- Malgré l'engagement de Microsoft à devenir "carbon negative", ses émissions ont augmenté de 23,4 % entre 2020 et 2024.
Will et Holly Alpine travaillaient dans les divisions les plus sensibles de Microsoft. IA responsable pour lui, développement durable pour elle. Ils participaient aux groupes internes qui voulaient verdir la firme de Mountain View. Leurs alertes répétées n'ont jamais rien donné. Début 2024, le couple démissionne et crée l'Enabled Emissions Campaign pour dénoncer les liens entre Microsoft et le pétrole. Microsoft s'engage à devenir « carbon negative » d'ici à 2030, mais l'entreprise aide en parallèle les pétroliers à produire plus. Ces « émissions facilitées » n'apparaissent nulle part dans les bilans carbone officiels.
Des employés consciencieux poussés vers la sortie
Le couple se raconte dans Business Wire.
Will, 36 ans, explique sa frustration : « J'étais inquiet de voir que les outils que j'aidais à construire étaient utilisés par de mauvais acteurs, et je m'inquiétais du manque de responsabilité ». Holly, elle, avait travaillé 10 ans chez Microsoft. Dix ans à essayer de changer les choses de l'intérieur.
Le couple finit par comprendre une chose. Ils auront plus d'impact dehors que dedans. « Nous avions fait tout ce que nous pouvions de l'intérieur de manière constructive, et personne d'autre ne faisait pression de l'extérieur », dit Holly.
La démission a un prix. Fini les salaires confortables de la tech. Le couple réduit ses dépenses, achète d'occasion, participe à l'économie du partage. Leur choix de ne pas avoir d'enfants évite « les dépenses liées à l'éducation », précise Holly. Will ajoute qu'en tant qu'ingénieur, il se débrouille bien en bricolage.
Will et Holly demandent des « lignes rouges ». Interdire les contrats IA destinés à augmenter la production de combustibles fossiles, par exemple. Mais lever des fonds pour leur campagne reste compliqué. « Beaucoup de gens ne savent même pas que ce travail existe », explique Holly. Un donateur anonyme leur permet de tenir financièrement.
L'administration Trump complique tout. Le président a retiré les États-Unis de l'accord de Paris et supprimé des aides aux énergies propres. « Nous avons assisté à un recul des engagements climatiques, partiellement causé par la course à la suprématie de l'IA », observe Will.

Des promesses climatiques battues en brèche par les contrats pétroliers
En 2019, Microsoft annonce qu'une filiale d'ExxonMobil prévoit d'« augmenter sa production jusqu'à 50 000 barils équivalent pétrole par jour d'ici à 2025 » grâce à ses technologies cloud, IoT et machine learning. Cette production supplémentaire génère 6,35 millions de tonnes de CO2 par an, d'après la Green Web Foundation. Plus de la moitié de l'empreinte carbone totale que Microsoft déclarait en 2019, sur un seul contrat.
« Ces augmentations d'émissions ne sont comptées dans aucun rapport de Microsoft », dénonce Holly.
Microsoft n'est pas seul. Amazon travaille avec des foreurs pour simuler leur production et maximiser les rendements. Google avait des liens similaires mais s'est retiré en 2020 après des protestations d'employés.
L'intelligence artificielle générative bouscule davantage les chiffres. Un rapport Barclays de 2020 chiffre les gains possibles : 10 à 15 % de production fossile en plus. L'IA réduit les coûts et améliore les taux de récupération.
Dernier paradoxe. Microsoft s'engage à devenir « carbon negative » d'ici à 2030, mais ses émissions ont grimpé de 23,4 % entre 2020 et 2024. « Microsoft ne peut pas prétendre vouloir être carbon negative tout en aidant les majors pétrolières à augmenter leur production », attaque Holly.
Source : Business Insider