Apple a décidé d'ouvrir les vannes publicitaires de l'App Store. Plus d'une seule annonce au sommet des recherches, mais plusieurs publicités dispersées dans les résultats. Une décision qui transforme la vitrine logicielle d'iOS en terrain de chasse pour annonceurs, et tant pis pour l'expérience utilisateur.

Rappelez-vous l'époque où Apple fustigeait les pratiques publicitaires intrusives de ses concurrents. Cette posture morale semble bien lointaine aujourd'hui. Le géant californien, celui-là même qui limite le pistage publicitaire des applications tierces au nom de la vie privée, décide maintenant de saturer son propre magasin d'applications avec des annonces payantes. La contradiction serait presque comique si elle n'illustrait pas un virage commercial assumé. À partir de 2026, les 800 millions d'utilisateurs hebdomadaires de l'App Store verront leur expérience de recherche transformée en catalogue publicitaire.
Apple joue avec les règles qu'elle impose aux autres
L'App Store va désormais proposer plusieurs emplacements publicitaires glissés entre les résultats organiques, sans position fixe. Exit le repère visuel unique en haut de page. Les annonces surgissent où bon leur semble, selon un système d'enchères que seul Apple contrôle. Les développeurs paieront au clic ou à l'installation, sans pouvoir choisir où leur publicité apparaît. Une opacité qui contraste avec les exigences de transparence qu'Apple impose à son écosystème.
Ce qui fascine dans cette manœuvre, c'est le timing. Pendant qu'Apple parade en défenseur de la confidentialité avec son App Tracking Transparency, elle construit méthodiquement sa propre régie publicitaire. Les données des utilisateurs ? Inaccessibles aux développeurs, mais parfaitement exploitables par la maison mère. Le message est clair : la protection de la vie privée, c'est surtout protéger son monopole publicitaire.

Pour les studios indépendants qui misaient sur la qualité de leur application pour émerger naturellement dans les recherches, la nouvelle est brutale. Chaque nouvel emplacement publicitaire repousse les résultats organiques vers le bas ou noyé entre des inserts, de quoi perdre l'utilisateur. Sans budget marketing conséquent, autant disparaître. Apple transforme progressivement l'App Store en système de péage où seuls ceux qui paient accèdent à la visibilité. Les utilisateurs, eux, perdent cette possibilité de découvrir des pépites méconnues noyées sous les applications sponsorisées, et des sélections éditoriales comme les Awards de cette année ne suffiront pas à sauver les meubles.
Les petits développeurs pris au piège de la guerre des enchères
Apple déploiera ces nouveaux emplacements sur les appareils équipés d'iOS et iPadOS 26.2 en 2026. Pas besoin de consentement utilisateur, pas de paramètre pour désactiver cette profusion publicitaire. L'écosystème fermé d'Apple montre là son vrai visage : un jardin clos où le propriétaire décide seul des règles, même quand elles contredisent ses propres discours. Les 60% de taux de conversion sur les annonces en première position expliquent cette frénésie. Pourquoi se priver d'une telle manne financière ?
Cette expansion publicitaire tombe mal pour Apple. Les régulateurs européens et américains scrutent déjà de près les pratiques monopolistiques de la marque. Multiplier les emplacements publicitaires sur une plateforme où Apple est juge, partie et concurrent pourrait bien attirer l'attention des autorités. Mais visiblement, Cupertino estime que les gains immédiats valent le risque réglementaire.
La trajectoire est tracée : Apple a choisi de transformer ses services en machines à publicité. Ce qui semblait impensable il y a quelques années devient la norme. Pour les utilisateurs iOS, cela signifie une expérience progressivement polluée par des contenus sponsorisés. Pour les développeurs, une dépendance accrue aux budgets publicitaires contrôlés par Apple. Et pour le champion autoproclamé de la vie privée, un écart grandissant entre le discours et la réalité.
Source : 9to5mac