Microsoft enfile sa plus belle cape de sauveur et nous promet que sa future « superintelligence » sera parfaitement dressée et au service de l'humanité. Une déclaration d'intention presque touchante, à l'heure où la Silicon Valley semble surtout vouloir créer des génies numériques sans se soucier de la notice.​

C’est promis, juré, l’intelligence artificielle de Microsoft ne réduira pas l’humanité en esclavage. © Shutterstock
C’est promis, juré, l’intelligence artificielle de Microsoft ne réduira pas l’humanité en esclavage. © Shutterstock

Alors que la course à l'Intelligence Artificielle Générale ressemble de plus en plus à une partie d'apprentis sorciers, Microsoft tente de se démarquer en jouant la carte de la vertu. Mustafa Suleyman, le grand manitou de l'IA chez Microsoft, a annoncé la création d'une équipe dédiée à une superintelligence « humaniste ». L'objectif affiché : s'assurer que ces futurs cerveaux synthétiques surpuissants restent bien sagement dans leur niche, sous notre contrôle total. Une belle promesse qui sonne presque comme une excuse après les récentes turbulences avec son partenaire OpenAI.

La bonne parole selon Saint Microsoft…

Sur le papier, le plan de Microsoft a tout pour plaire. Suleyman nous dessine les contours d’une intelligence artificielle qui obéirait à trois nouvelles lois de la robotique, version 2025. Premièrement, pas question qu’elle puisse s’améliorer toute seule à l’infini. Deuxièmement, elle ne doit jamais se fixer ses propres buts. Enfin, et c’est le plus croustillant, elle devra toujours nous parler dans un langage que nous, pauvres humains, pouvons comprendre. Finis les dialogues obscurs entre machines dans leur jargon mathématique indéchiffrable.​

Pour y parvenir, Microsoft se dit prêt à un sacrifice : brider volontairement les performances de ses modèles. « Nous allons renoncer à l’efficacité », clame Suleyman, pour être absolument certains de garder le contrôle. C’est un discours qui détonne dans la Silicon Valley, où chaque pourcent de performance supplémentaire sur les benchmarks est célébré comme une victoire. En choisissant cette voie, Microsoft semble vouloir nous rassurer : non, Skynet n’est pas pour demain, du moins, pas si ça vient de chez eux.

… Et la réalité sur le terrain

Cette belle profession de foi se heurte cependant à une réalité un peu plus têtue. Suleyman lui-même l’admet avec une franchise désarmante : personne ne sait vraiment comment maîtriser une superintelligence une fois qu’elle existera. Cette déclaration prend une saveur particulière alors que les relations entre Microsoft et son partenaire historique OpenAI se sont notablement rafraîchies. Redmond semble vouloir tracer sa propre voie, peut-être pour ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier, surtout si celui-ci risque d’exploser.​

Le calendrier reste pour le moins prudent. Il faudra attendre « un an ou deux » avant de voir les premiers résultats concrets de cette équipe. On nous promet bien une « superintelligence médicale » d’ici trois ans, mais sans plus de détails sur la recette miracle. Au fond, la grande question reste entière. Peut-on vraiment créer une entité surpuissante tout en lui demandant poliment de ne pas utiliser toute sa force ? L’approche de Microsoft est louable, mais elle ressemble un peu à vouloir construire une voiture de course en lui demandant de ne jamais dépasser les 50 km/h. On attend de voir si le moteur ne finira pas par s’emballer.

Source : The Register