Gilles RAYMOND : "in-fusio est le leader européen du jeu mobile"

19 février 2003 à 00h00
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JB - Gilles RAYMOND, bonjour. Depuis notre dernier entretien en 1999, comment se porte In-Fusio?

GR - Bonjour. La réponse ne peut être que positive ! In-Fusio a débuté l'année 2002 avec la volonté d'être présent sur les 5 principaux marchés européens. Un an plus tard, nous pouvons dire que nous avons dépassé cet objectif puisque non seuleument nous travaillons avec le leader et/ou le challenger de chacun des marchés français, italien, allemand, espagnol et anglais, mais nous nous sommes également implantés en Chine, le plus grand marché du Monde, où nous avons une couverture nationale pour la transmission de SMS et de téléchargement data. Nous avons de plus renforcé nos alliances avec des constructeurs comme Alcatel, Panasonic, Sagem, Siemens, Philips, Mitsubishi et nous annoncerons prochainement de nouveaux accords avec des constructeurs asiatiques pour qu'ils intégrent notre technologie de téléchargement de jeux sur leurs terminaux.

JB - Quel est le métier d'In-Fusio ? Editer ou diffuser des jeux pour téléphones mobiles ?

GR - Nous sommes avant tout un fournisseur de services aux opérateurs. Notre métier est de leur offrir une solution complète dédiée au jeu sur téléphone mobile. Cette solution intègre :
- Une solution technologique : serveur, côté opérateur, et moteur de jeux, sur le terminal (ExEn). Nous travaillons également sur des technologies comme celles du 3410 de Nokia, premier téléphone Java d'entrée de gamme.
- Un catalogue de jeux : Nous fédérons et nous accompagnons les éditeurs développeurs de Jeux Vidéo et les ayants-droit détenteurs de licence (éditeurs de jeux vidéos et sociétés d'entertainment tels qu'Universal).
- Du conseil : C'est la face cachée de l'iceberg mais elle permet de proposer le meilleur catalogue de jeux, de séduire de nouvelles populations de joueurs et même de joueuses, d'optimiser la consommation de données. C'est un rôle comparable à celui de chef de rayon dans une grande surface.

JB - Qui est votre client ? L'opérateur ou le client qui télécharge un jeu ?

GR - Nous nous situons dans une relation "B to B to C". Nous sommes payés par l'opérateur mais notre rémunération intègre un intéressement aux résultats, ce qui nous pousse à avoir une excellente connaissance du consommateur final. Nous pourrions faire une analogie avec un centre serveur dans l'économie du Minitel. Nous touchons des revenus de la part de l'opérateur mais nous devons également reverser de l'argent aux ayants droits tout en optimisant le service.

JB - In-Fusio existe depuis plus de 5 ans. Ne craignez vous pas d'avoir dépensé beaucoup d'énergie pour évangéliser le marché ?

GR - C'est précisemment la mission du pionnier d'évangéliser le marché mais il faut relativiser l'ampleur de la tâche. Au total, nous n'avons rencontré qu'une vingtaine de grands comptes comme les opérateurs ou les constructeurs de terminaux et le travail d'évangélisation du grand public est fait par ces derniers.

Aujourd'hui, In-Fusio compte plus de 1.500.000 utilisateurs ayant payé pour télécharger un jeu et nous revendiquons la position de leader, au moins au niveau européen et peut-être mondial. Nous ne regrettons donc pas d'être partis les premiers !

JB - Que pensez vous de la stratégie de sociétés françaises comme Gameloft, plus proche du métier d'éditeur ?

GR - La presse a souvent présenté GameLoft comme un concurrent d'In-Fusio mais je pense que nos deux activités sont complémentaires. Ils ont une stratégie de véritable éditeur et bénéficient des synergies avec Ubisoft. Contrairement à In-Fusio, dont la technologie ExEn équipe depuis des annéesde nombreux modèles de téléphones, GameLoft a préféré s'orienter vers la technologie Java, dont beaucoup espèrent - vainement selon nous - qu'elle sera un standard unique! Nous restons néanmoins ouverts à toute collaboration avec eux pour diffuser leurs jeux via nos partenaires.

JB - Quel est la taille du parc de téléphones compatibles Java ou ExEn ? Quelles sont les prévisions pour 2005 ?

GR - Aujourd'hui, nous évaluons le parc de téléphones compatibles ExEn à 3 millions de terminaux. Le volume de téléphones compatibles Java J2ME repose essentiellement sur les ventes du Nokia 3410 qui représente environ 1 million de terminaux en Europe.

A l'horizon 2005, si nous faisons des analogies avec le WAP, près de 50% des téléphones mobiles seront en mesure de télécharger un jeu ce qui devrait représenter entre 500 millions et 1 milliard de terminaux. C'est tout simplement le plus gros marché de tous les temps en matière de jeux vidéo ! Chaque année, il se vend environ 500 millions de téléphones mobiles contre environ 25 millions de consoles de poche et 12 millions d'ordinateurs de poche.

JB - Quelle proportion des propriétaires d'un téléphone ExEn utilise vos jeux ?

GR - Sur les téléphones à écran couleur équipées d'ExEn, nous avons mesuré un taux de pénétration de 65% de personnes qui acceptent de payer pour jouer mais le chiffre est encore plus élevé quand les jeux sont gratuits. Chez l'opérateur britannique O² qui utilise le J2ME sur Nokia 3410, ce taux chute à 12% car l'interface est bien moins intuitive que ExEn. Avec notre solution, le téléchargement et l'installation d'un jeu se fait en 3 clics et l'impact sur le revenu de l'opérateur est immédiat.

JB - In-Fusio a testé le jeu en réseau en HDML, WAP ou SMS à la fin des années 90. Comptez vous explorer à nouveau cette piste ?

GR - Nos jeux sont déjà multi-joueurs en temps réel mais nous restons tributaires de la qualité des réseaux. Nous comptons présenter quelque chose en milieu d'année.

JB - Sur la N-Gage Nokia ou le SPV, les jeux seront probablement commercialisés sur des cartes SD. Le téléchargement ne permet pas de gagner assez d'argent ?

GR - Ce système de "cartouche" s'explique pour différentes raisons
- Les jeux offerts sur la N-Gage ou le SPV font plusieurs mégaoctets et leur temps de téléchargement serait un peu trop long pour un utilisateur
- Les opérateurs ne peuvent ou ne veulent toujours pas toujours facturer autre chose que de la voix ou des messages. L'éditeur doit donc se rabattre sur un canal de distribution traditionnel
- Le téléchargement marque une rupture dans la culture commerciale et c'est toujours un frein pour les différents acteurs de la chaîne de valeur. Néanmoins, nous avons la conviction que ce mode de commercialisation est antagoniste de la culture du téléphone mobile. Le consommateur veut un accès instantané au jeu, où qu'il se trouve, sans avoir à se déplacer dans un magasin. Il faut effectivement apprendre à composer avec le système de facturation de l'opérateur et c'est justement tout le savoir faire d'In-Fusio qui permet d'augmenter les revenus. Il est par exemple possible de découper un jeu et de le vendre en "plusieurs morceaux" au fur et à mesure de la progression du joueur.

JB - Quel regard portez vous sur le lancement de la N-Gage de Nokia et l'arrivée d'éditeurs comme Sega ou Eidos sur le marché ?

GR - L'arrivée de Seiga ou Eidos est une bonne nouvelle car cela donne une réalité au marché du jeu "mobile". Nous les invitons à travailler avec nous pour envisager le téléchargement de leurs jeux et pour bénéficier de notre connaissance du marché.

Sur la N-Gage, je ne connais pas les projections commerciales de Nokia mais je pense que ce produit restera un marché de niche. En imaginant qu'elle prenne 25% de parts de marché à la GameBoy de Nintendo, cela ne représentera que 6 ou 7 millions d'unités par an sur un demi-milliard d'unités, et à condition bien sûr que son prix reste raisonnable.

JB - Après votre levée de fonds de décembre, la prochaine étape, c'est la bourse ?

GR - Nos investisseurs sont là pour réaliser une plus value mais la bourse est un moyen de financement, pas une fin. Nous pouvons également envisager un partenariat industriel pour renforcer notre position sur le marché du jeu mobile. Notre objectif est d'être le fournisseur de la chaîne jeux des portails des principaux opérateurs cellulaires en Europe et en Chine.

JB - Quel regard portez vous sur le marché du téléphone mobile en ce début d'année 2003 ?

GR - C'est "back to reality". Les grands rêves technologiques comme l'UMTS sont remis en question dans leurs délais voire dans leurs principes et les opérateurs se focalisent désormais sur les services à valeur ajoutée comme les jeux ou les sonneries.

JB - Quel serait votre mot de conclusion ?

GR - Pour conclure sur la question du jeu mobile, je dirais qu'après les espoirs de standardisation du marché en 2001, 2003 sera certainement l'année de la fragmentation entre différentes solutions. On peut par exemple citer Vodafone Class, la solution retenue par Vodafone pour son portail Live ou encore i-appli, le Java de DoCoMo pour son i-mode, sans parler des solutions de Nokia, de Microsoft, le J2ME et bien sûr la technologie ExEn d'In-Fusio.

Le jeu mobile est en tout cas devenu un véritable marché qui compte déjà des millions de joueurs, y compris des femmes (c'est nouveau pour cette activité) et qui attire les plus grands opérateurs, les plus grands constructeurs et de nombreux éditeurs. In-Fusio a été à l'origine de cette révolution et nous comptons bien en profiter.

JB - Monsieur Gilles Raymond, je vous remercie.

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