Tout louer, ne plus rien posséder

29 mai 2015 à 18h31
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L'éditorial de Anicet Mbida, rédacteur en chef de Clubic Pro.
« Dans 25 ans, l'idée de propriété paraîtra totalement démodée, car toute l'économie sera fondée sur la location ». Cette prophétie, on la doit à Jeremy Rifkin, essayiste américain, auteur de « L'âge de l'accès » publié en 2000. Force est de constater combien il avait vu juste. Même dans le numérique, la location tend à devenir le modèle dominant.

Louer plutôt qu'acheter, la logique a toujours été implacable pour des biens utilisés épisodiquement : voiture, vélo, ski ou même des accessoires de mode. Désormais, la location concerne aussi des produits utilisés au quotidien : ordinateurs, tablettes ou téléviseurs. L'argument est simple, on paie l'usage, pas la propriété de l'objet. Ce qui permet de suivre les évolutions technologiques sans avoir à racheter un appareil.

Le smartphone a marqué une rupture, autant dans modèle économique que le vocabulaire. On ne loue plus, on « s'abonne à un service ». Financement de l'appareil, accès au réseau, communications, tout est mélangé pour ne payer qu'un petit montant... pendant 24 mois. Désormais, l'objectif consiste à installer l'utilisateur dans une logique de paiement perpétuel pour s'assurer des revenus réguliers. Toutes les entreprises adorent les revenus récurrents - surtout celles cotées en bourse. Ils donnent un flux de liquidité constant, impossible à garantir avec l'achat ponctuel classique.

Avec des biens immatériels, on se retrouve prisonnier

Pas étonnant donc que la « location perpétuelle » devienne le modèle à suivre pour les offres numériques. Celles fondées sur le cloud évidemment : Spotify, Netflix, DropBox, etc. Mais également des logiciels traditionnels comme Creative Suite d'Adobe ou Office de Microsoft, désormais vendus par abonnement. On accède à la musique, aux documents, aux vidéos tant que l'on paie. Mais tout disparaît une fois l'abonnement interrompu.

Ce n'est qu'un début. Car tout devient service. HP vient par exemple de lancer Instant Ink, un « service de remplacement de cartouches d'encre » ; une autre location perpétuelle qui ne dit pas son nom. Sans parler des objets connectés, futur Eldorado des loueurs. Une fois relié à internet, un frigo, une caméra ou un lecteur de glycémie devient plus facile à transformer en « service » et donc à vendre par abonnement.

Regardez votre relevé mensuel, la part des paiements récurrents ne fait qu'augmenter. Nous multiplions les abonnements pour n'être plus propriétaires de rien. D'aucuns diront : « se sentir libre, c'est tout avoir, sans rien posséder ». S'il s'agit d'une maison de vacances, peut-être. Mais avec des biens immatériels, 100% numériques, je me sens plutôt prisonnier.

Anicet Mbida

On me présente souvent comme le vétéran de l'informatique et des nouvelles technologies. Ma plus grande fierté ? Avoir gagné le concours des "Deux Lignes" d'Hebdogiciel dans les années 1980 et d’avoir...

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On me présente souvent comme le vétéran de l'informatique et des nouvelles technologies. Ma plus grande fierté ? Avoir gagné le concours des "Deux Lignes" d'Hebdogiciel dans les années 1980 et d’avoir développé des jeux pour UbiSoft quand ils étaient encore installés à Créteil dans le Val de Marne. C’est totalement par hasard que j’ai bifurqué journaliste informatique en 1994, dans un titre de presse professionnelle qui plus est (01 Informatique). Une formidable expérience qui m’a permis de commenter toutes les transformations de ces vingt dernières années et d’interviewer les plus grands : Steve Jobs, Bill Gates, Andy Grove, John Chambers, Larry Ellisson, etc. Ce qui me passionne ? L’impact social des technologies : la façon dont Internet a changé notre façon de draguer, d’acheter, de s’informer ou de se distraire. Ce portable, dernier objet que l'on regarde avant de se coucher, le premier au réveil. C’est probablement pourquoi j’ai créé la chronique Culture Geek sur BFM TV en 2009. Et même si certains ne me connaissent aujourd'hui qu'à travers ce miroir grossissant de la télévision, l’essentiel de mon métier, de mon ADN, a toujours été lié à la presse écrite. Hier comme rédacteur en chef adjoint de 01Net et de 01 Business et Technologies, aujourd'hui comme Rédacteur en Chef de Clubic Pro. N’hésitez pas à me contacter. J’essaie, dans la mesure du possible, de répondre à tout le monde.

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