Marissa Mayer : une femme qui a toujours eu du nez

11 décembre 2015 à 09h29
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Femme d'affaires avertie, Marissa Mayer n'a pas peur des défis. Après une carrière exemplaire chez Google, elle se lance dans la périlleuse mission de redresser les comptes de Yahoo. Une tâche, dont elle a peut être sous-estimé la difficulté.

Mise à jour : cette semaine, Marissa Mayer a à nouveau fait parler d'elle. En effet, le Wall Street Journal a indiqué que la PDG de Yahoo allait quitter l'entreprise et a annoncé le montant de ses indemnités. Nous vous proposons, pour l'occasion, de redécouvrir son parcours.

Marissa Mayer, femme forte du numérique, est connue pour avoir passé treize années à divers postes au sein de Google, contribuant à faire de la start-up californienne le géant que l'on connaît. En 2012, elle reprend les rênes de Yahoo pour s'atteler à la lourde tâche de remettre l'ancien fleuron du Web sur la voie de la croissance. Mais trois ans après sa prise de poste, elle fait face à de vives critiques au sein même de son équipe, et son avenir à la tête du groupe semble désormais incertain.

Réputée pour son sens du design, Marissa Mayer est de ces personnes qui aiment sortir de leur zone de confort : « Je n'aime pas me reposer sur (mes) lauriers (...) le plus intéressant, c'est ce qui arrivera après » déclarait-elle à la presse dès 2008. Un état d'esprit qui l'a conduite jusqu'au succès, en choisissant les bonnes sociétés. A tel point qu'elle devient rapidement la 36e femme la plus riche des États-Unis, avec une fortune estimée à 380 millions de dollars.

Fille d'un ingénieur et d'une enseignante en Art, elle naît le 30 mai 1975 à Wausau, dans le Wisconsin. Elève modèle, elle grandit en pensant devenir médecin, mais développe une passion pour l'informatique durant ses études à Stanford. En master, elle fait donc le choix de se spécialiser dans un domaine en devenir, à savoir l'intelligence artificielle. Son talent : avoir du « nez » pour trouver la société ou la technologie qui sera en pointe dans le futur. Marissa Mayer va ainsi développer ce goût tout au long de sa carrière.

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Suite à l'obtention de son diplôme, la jeune femme reçoit pas moins de quatorze offres d'emploi. Elle les rejette toutes, ou presque. La dernière retient son attention. Elle émane d'une petite start-up de dix-neuf employés nommée... Google. Ses fondateurs, Larry Page et Sergey Brin, cherchent quelqu'un pour diriger les équipes en charge de l'interface utilisateur et des serveurs web.

Des débuts spectaculaires chez Google

À l'issue d'un quiz sur l'intelligence artificielle, réalisé par les deux fondateurs de Google dans la salle de conférence de leur jeune société, c'est-à-dire une table de ping-pong, Marissa Mayer devient la première femme ingénieure du groupe.

Durant ses treize années à Mountain View, elle travaille sur de nombreux produits dont Gmail, Google Maps (Earth et Street View aussi), Google News ou Google Images, entre autres. Mais surtout, la dirigeante apporte sa patte à l'apparence de Google. Grande amatrice de mode et d'art, ses talents pour le design lui confèrent une renommée dans son milieu professionnel et contribuent au succès de Google.

Elle occupera divers postes au sein de la firme, dont celui de designer, évidemment, mais aussi chef de produit. À terme, elle deviendra vice-présidente en charge de la recherche et de l'expérience utilisateur. Enfin, elle prendra la responsabilité des services de localisation de Google et de Maps.

Son ascension est rapide mais va connaître un brusque coup d'arrêt. Larry Page, devenu PDG en 2011, lui refuse une promotion. Des rumeurs affirment qu'il s'agirait d'une question de rancœur, puisque ces derniers sont restés en couple pendant trois ans. Quoi qu'il en soit, Marissa Mayer n'ira pas plus loin chez Google et accepte le poste de PDG de Yahoo, une année plus tard seulement.

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Yahoo, l'école de la difficulté

Lorsqu'elle prend la tête de l'entreprise, Yahoo a 700 millions d'utilisateurs uniques par mois, mais ce chiffre décroît dangereusement. La firme a vu défiler cinq PDG en cinq ans et aucun d'entre eux n'est parvenu à inverser la tendance. Du côté des marchés financiers, le cours de l'action rechute.

Pour redresser la barre, Marissa Mayer mise sur la mobilité, la vidéo, les réseaux sociaux ou encore la publicité native. Elle se lance également dans une stratégie basée sur les rachats de start-up. Des dizaines de structures plus ou moins grandes entreront dans le giron de Yahoo. Parmi elles, la firme acquiert Tumblr, pour plus d'1 milliard de dollars.

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Crédits : Glamour

Marissa est active et les médias lui permettent de développer une image forte auprès du grand public. A tel point que des magazines hors de la sphère informatique s'intéressent à elle. Vogue et Glamour mettront ainsi la patronne sur leur couverture, à grands renforts de poses lascives. Aux yeux des non-initiés, la dirigeante marche véritablement sur l'eau. A la tête d'un géant du Web, femme forte et respectée tout en conservant sa personnalité, elle incarne la « self-made woman » dans toute sa splendeur.

Coté coulisses, la réalité est toute autre. La personnalité de Marissa Mayer est décriée en interne. En 2013, elle est déjà dans le viseur de certains employés pour ses pratiques de micro-gestion intensive. Il lui est reproché de redescendre trop souvent sur certains détails de projets en cours, pourtant sous la responsabilité d'autres managers. Pire, des messages internes à Yahoo montrent que la patronne du groupe a établi un processus permettant de faire une revue d'effectifs tous les trimestres. Durant cette étape, un classement des employés est fait en fonction de plusieurs paramètres. Cette classification pouvait ensuite permettre de supprimer certains postes.

Malgré ces critiques inhérentes à toute forte personnalité, la dirigeante paie en interne les conséquences de sa refonte d'une partie des services de la société. Côté business, le cours des actions du groupe remonte et les mouvements de Marissa Mayer semblent donner quelques résultats. Seulement, les finances de Yahoo patinent toujours et la patronne admet que le retour à la croissance sera plus long que prévu. La punition ne se fait pas attendre très longtemps : en six mois, les actions de la firme ont chuté de 24 %.

Plus dure la chute ?

La femme d'affaires poursuit sa stratégie de remettre Yahoo à flot. Forte de ses convictions, un iceberg s'approche dangereusement, celui de la scission des activités de la firme. Yahoo est coupé en deux. D'un côté figurent les actifs détenus dans l'e-commerçant chinois Alibaba (15 %), de l'autre les activités historiques de la société (portail d'actualités, recherche, messagerie, régie publicitaire...).

Le choix est radical mais nécessaire pour que Yahoo continue sa mutation. De son côté, Marissa Mayer est parvenue à jouer en eaux troubles. Si la PDG n'a certes par remis à flot la société, le conseil d'administration a maintenu sa confiance sur le motif qu'elle est parvenue, encore une fois, à anticiper les virages technologiques. En misant clairement sur une stratégie articulée autour du mobile et de la publicité, la dirigeante a momentanément sauvé sa place.

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Décriée ou adulée, Marissa Mayer est une personnalité forte. Son parcours démontre qu'elle dispose des qualités pour dénicher les perles technologiques, mettre en oeuvre des stratégies pour remonter la pente et défendre sa position lorsqu'elle est attaquée. De quoi faire taire ses détracteurs, pour un temps seulement.

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