Les créanciers d'Altice France, actionnaires à 45% du groupe et de l'opérateur SFR, ont comme Patrick Drahi jugé l'offre de rachat d'Orange, Bouygues Telecom et Free insuffisante.

Dans son bras de fer pour valoriser au maximum son opérateur SFR, Patrick Drahi peut compter sur le soutien de… ses créanciers, qui pour sauver le milliardaire de la dette ont mis la main sur 45% du capital d'Altice France il y a quelques mois. Comme l'homme d'affaires, les co-actionnaires n'ont pas caché leur scepticisme après avoir découvert l'offre de 17 milliards d'euros déposée par Orange, Bouygues Telecom et Free. Ensemble, ils espèrent faire monter les enchères.
Les créanciers haussent le ton face à une offre décevante du trio Orange-Free-Bouygues
Les créanciers seniors ne mâchent pas leurs mots, peut-on dire. Détenteurs de 45% du capital d'Altice France depuis la restructuration de la dette, ils estiment que la proposition du trio Orange-Free-Bouygues manque d'ambition. « C'est une proposition très basse en termes de prix, ils ne la trouvent pas très sérieuse », confie au Figaro un proche de ces créanciers, sans la juger indécente pour autant.
Cette position commune ne doit rien au hasard. Les créanciers et le fondateur d'Altice, Patrick Drahi, partagent désormais les mêmes intérêts financiers. « Nous sommes complètement alignés, c'est lui qui gère », explique un proche des co-actionnaires. La stratégie se résume à faire grimper les enchères, et cela tombe bien, Patrick Drahi cherche manifestement à maximiser la valeur de son opérateur au carré rouge.
Le rejet collectif de l'offre des trois concurrents de SFR nourrit une rumeur. Certains pensaient en effet que le trio avait communiqué publiquement et de façon presque insistante pour court-circuiter Drahi, et s'adresser directement aux créanciers. Raté. Ces derniers ne comptent pas jouer ce rôle et préfèrent laisser l'homme d'affaires mener la danse, du moins pour l'instant.
Le calendrier joue contre Patrick Drahi dans la vente de SFR
L'accord de restructuration signé en mars a des conséquences aujourd'hui dans le processus de vente de SFR. Patrick Drahi dispose d'une autonomie pour les transactions en dessous de 3 milliards d'euros, mais au-delà, les créanciers détiennent un droit de véto. Détail intéressant, à partir d'une valorisation d'Altice à 23,6 milliards d'euros, le milliardaire peut se passer de leur aval. Un seuil qui lui offre le champ libre, même s'il n'est pas encore à porter de tir.
Les créanciers espèrent que Drahi saura tirer davantage de valeur tout de même. Car au final, tous les acteurs sont financièrement intéressés par une vente. « À partir d'un certain niveau de prix, il peut toucher un très bon premium. Les créanciers veulent maximiser leur investissement. Les intérêts sont donc alignés », résume un proche des porteurs de dette. L'offre actuelle reste en deçà du jackpot espéré.
Mais le temps presse. Tant que Patrick Drahi respecte ses échéances de remboursement (la première significative arrive en 2027), les créanciers le laissent aux commandes. Ils savent que l'opportunité de consolidation n'est pas éternelle. À l'approche de la présidentielle, ce dossier aux lourdes conséquences sociales et économiques pourrait cette fois devenir politiquement ingérable. Le compte à rebours est lancé.
Sources : Le Figaro, Clubic