Google annonce officiellement son premier partenariat nucléaire concret avec l'implantation d'un réacteur de 50 MW dans le Tennessee d'ici 2030. Cette alliance tripartite avec Kairos Power et la Tennessee Valley Authority marque le franchissement d'un cap décisif pour l'industrie tech américaine.

L'électricité produite alimentera directement les centres de données Google situés dans le comté de Montgomery au Tennessee et celui de Jackson en Alabama. © Shutterstock
L'électricité produite alimentera directement les centres de données Google situés dans le comté de Montgomery au Tennessee et celui de Jackson en Alabama. © Shutterstock
L'info en 3 points
  • Google, Kairos Power et la TVA signent un accord pour implanter le réacteur Hermes 2 de 50 MW dans le Tennessee d'ici 2030.
  • Le réacteur Hermes 2 utilisera la technologie à sels fondus de Kairos (SMR basse pression) validée par un permis NRC en novembre 2024.
  • Google finance le projet avec Kairos pour sécuriser une énergie décarbonée destinée à ses data centers, potentiel jusqu'à 500 MW d'ici 2035.

L'appétit énergétique croissant des centres de données pousse les géants technologiques vers des solutions d'approvisionnement électrique toujours plus audacieuses. Après Meta qui avait déjà exprimé son intérêt pour l'atome en décembre dernier, c'est au tour de Google de concrétiser ses ambitions nucléaires. L'accord signé cette semaine avec Kairos Power représente un tournant majeur dans la stratégie énergétique des entreprises de la Silicon Valley.

L'Alliance du Tennessee : un pacte aux allures de manifeste

L'accord est historique : pour la première fois aux États-Unis, un fournisseur d'électricité, la Tennessee Valley Authority (TVA), s'engage à acheter l'énergie produite par un réacteur nucléaire avancé de génération IV. Ce contrat tripartite verra naître d'ici 2030 le réacteur Hermes 2, d'une capacité de 50 MW, destiné à alimenter les très gourmands centres de données de Google dans la région. C'est une concrétisation majeure pour une technologie qui peinait jusqu'ici à trouver son modèle économique.

Le projet repose sur les réacteurs modulaires compacts (Small Modular Reactors ou SMR) de la start-up californienne Kairos Power. Leur particularité est d'utiliser une technologie à sels fondus fonctionnant à basse pression, ce qui simplifie grandement la conception et la sécurité par rapport aux centrales traditionnelles. L'obtention d'un permis de construire de la part du régulateur américain (NRC) dès novembre 2024 a validé la maturité du concept, ouvrant la voie à ce partenariat sans précédent.

Le choix d'Oak Ridge, dans le Tennessee, est tout sauf un hasard. La région est connue pour avoir hébergé un autre projet nucléaire, celui-ci bien plus funeste. En s'installant sur le site même du projet Manhattan, qui donna naissance à la première bombe atomique, Google ancre son projet dans l'histoire. Hier secret militaire, le lieu devient aujourd'hui la vitrine d'un nucléaire civil qui se veut au service de la nouvelle économie numérique.

Un nouveau paradigme pour l'ère numérique

Plus encore que la technologie, c'est le montage financier qui interpelle. Fini, le modèle où le contribuable ou le consommateur paient les surcoûts et les retards, fréquents dans le nucléaire. Ici, Google et Kairos Power assument l'intégralité du risque financier, la TVA n'agissant que comme un client final qui garantit un débouché à l'électricité produite. Ce modèle pourrait bien devenir la norme pour financer les réacteurs de demain.

Cette annonce catalyse l'émergence d'un nouveau modèle de développement nucléaire aux États-Unis.  © Google
Cette annonce catalyse l'émergence d'un nouveau modèle de développement nucléaire aux États-Unis. © Google

Cette prise de risque s'explique par une urgence : la consommation électrique de l'IA explose. On estime qu'une simple requête via un agent conversationnel est dix fois plus énergivore qu'une recherche Google classique, et la demande des data centers américains pourrait tripler d'ici la fin de la décennie. Face à ce mur énergétique, les géants du web n'ont d'autre choix que de sécuriser une production d'énergie massive, stable et décarbonée.

Ce premier réacteur de 50 MW n'est d'ailleurs qu'une mise en bouche. L'accord global avec Kairos Power porte sur une capacité allant jusqu'à 500 MW à l'horizon 2035. La manœuvre fait écho aux ambitions de Meta, qui cherche également à s'assurer plusieurs gigawatts de puissance nucléaire pour ses propres infrastructures. La course à l'atome est bel et bien lancée dans la Silicon Valley.

Source : CNBC