Un moteur de recherche écologique pour piloter le navigateur le plus utilisé au monde… sans le racheter ? C’est le pari un peu fou d’Ecosia, qui propose à Google de lui confier la gestion de Chrome pendant dix ans, en reversant une partie des bénéfices à des projets climatiques.

- Ecosia propose à Google de gérer Chrome dix ans sans le racheter, en pilotant le navigateur au quotidien.
- La proposition inclut une fondation indépendante, la conservation des droits d'Alphabet et le reversement d'une part des profits au climat.
- L'offre survient alors que Chrome est ciblé par le régulateur américain ; d'autres acteurs, dont Perplexity, ont aussi manifesté leur intérêt.
L’idée peut sembler audacieuse, mais elle s’inscrit dans une stratégie soigneusement élaborée. Ecosia, qui finance la reforestation grâce aux revenus publicitaires de son moteur de recherche, a soumis à Google une proposition inédite. Plutôt que de racheter Chrome, l'entreprise allemande propose d’en assurer la gestion pendant dix ans, au sein d’un système de gouvernance partagée dans lequel elle prendrait en charge le pilotage opérationnel du navigateur, sans en devenir propriétaire ni remettre en cause les droits de Google.
Chrome confié à une fondation indépendante ?
Suivant ce modèle, Ecosia suggère que Chrome soit placé sous l’égide d’une fondation juridiquement distincte, spécialement créée pour accueillir le projet. Alphabet resterait pleinement propriétaire du navigateur et en conserverait l’intégralité des droits de propriété intellectuelle, mais délèguerait à l’entreprise allemande le développement, l’exploitation et l’orientation stratégique pour une durée de dix ans.
Le moteur de recherche entend ainsi repenser la gouvernance du web à grande échelle, en montrant qu’un outil aussi central que Chrome peut fonctionner selon des principes éthiques, sans dépendance directe aux intérêts publicitaires. La proposition prévoit par ailleurs de réinvestir une partie des profits de Chrome dans des projets climatiques, sous la supervision d’Ecosia, tandis que le reste serait reversé à Google, en compensation de cette délégation.
Google n’a pour l’instant pas réagi à cette offre, mais Ecosia espère provoquer un débat plus large sur la manière dont sont administrées les infrastructures majeures du web, entre modèle propriétaire et gouvernance partagée.
Un navigateur très convoité, sous pression réglementaire
On rappellera que la proposition d’Ecosia intervient dans un contexte où Chrome attise les convoitises comme rarement auparavant, alors que le navigateur fait l’objet de pressions croissantes de la part des autorités américaines. Le département de la Justice accuse Google de maintenir un monopole illégal sur la recherche en ligne, en partie grâce à son contrôle sur Chrome, utilisé par plus de trois milliards de personnes. Une telle position pourrait, à terme, forcer Alphabet à se séparer du navigateur ou à l’isoler dans une entité juridiquement distincte.
Évidemment, Google continue de rejeter catégoriquement cette idée, estimant que Chrome fait partie intégrante de son écosystème et qu’il serait difficile de l’en détacher sans conséquence technique. Ce qui n’a pas empêché certains acteurs de commencer à se positionner, au cas où le gâteau viendrait à être découpé.
OpenAI et Perplexity ont été les premiers à faire part de leur intérêt pour Chrome, chacun cherchant à renforcer sa présence dans la recherche web à l’heure où les interfaces conversationnelles redéfinissent les usages. Quelques semaines plus tard, Yahoo, qui planche déjà sur un nouveau navigateur basé sur Chromium, s’est invité dans les discussions, considérant qu’un rachat de Chrome serait le moyen le plus rapide de tripler ses parts de marché dans la recherche, sans repartir de zéro.
Début août, Perplexity est finalement passée à l’offensive avec une offre de rachat de 34,5 milliards de dollars. Un montant largement supérieur à sa propre valorisation, mais que l’entreprise voit comme un moyen de s’implanter durablement dans la recherche web tout en donnant un coup d’accélérateur à son navigateur Comet.
Avec sa proposition non marchande, Ecosia détonne, c'est le moins que l'on puisse dire. L’idée ne fera sans doute pas plier Google, mais elle a le mérite d’introduire un peu plus de diversité dans la manière dont on pense l’accès au web. Et peut-être même de faire un peu de bien au débat.
Source : Reuters
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