À peine lancé, déjà abandonné. Kapitano, une interface moderne pensée pour simplifier l'utilisation de l’antivirus ClamAV sur Linux, ne sera pas maintenu plus longtemps.

- Kapitano, une interface graphique pour ClamAV sur Linux, est abandonnée après seulement deux mois d'existence.
- Le développeur, zynequ, a cessé le projet suite à des accusations jugées infondées de diffusion de logiciel malveillant.
- Le code source est public, laissant la communauté libre de reprendre ou modifier l'application selon ses besoins.
Kapitano n’aura pas tenu deux mois. Lancé début juin, ce scanner de virus open source pour Linux vient d’être officiellement archivé par son développeur. L’application, qui proposait une interface GTK4/libadwaita permettant d’exploiter le moteur ClamAV en mode graphique, avait pourtant reçu un accueil favorable sur Codeberg et Flathub. Un abandon précipité qui laisse à nouveau un vide dans la catégorie des outils de sécurité accessibles, notamment pour les utilisateurs et utilisatrices de Linux peu familiarisés avec le terminal.
Des accusations jugées infondées et un développeur démotivé
C’est dans un dernier message publié sur Codeberg que le développeur, connu sous le pseudonyme zynequ, a confirmé la fin du projet. Accusé de diffuser un logiciel malveillant, il déplore que la discussion ait rapidement tourné aux attaques personnelles, dans un contexte déjà tendu : Kapitano était développé en solo, sur son temps libre, sans financement ni relais technique.
L’annonce n’a d’ailleurs pas tardé à susciter des réactions circonspectes, en particulier sur Reddit, où plusieurs internautes ont relevé des éléments troublants après avoir examiné de près le profil du compte à l’origine des accusations. Créé le jour même de l’incident, sans activité antérieure ni participation visible à d’autres projets, il semble avoir été ouvert dans le seul but de cibler le développeur. Difficile, pour le moment, de dire s’il s’agissait d’une simple prise de bec ou d’une tentative délibérée de déstabilisation, mais l’effet a été immédiat.
Une décision regrettable pour plusieurs internautes, qui soulignent que Kapitano facilitait réellement l’accès à l’analyse antivirus pour les profils moins techniques. L’application permettait en effet d’utiliser ClamAV sans passer par la ligne de commande, en proposant une interface graphique pour lancer des analyses ponctuelles sur des fichiers ou dossiers. Un usage de niche, certes, mais qui répondait à un besoin bien identifié, en particulier sur les config dual boot Linux-Windows ou manipulant des fichiers partagés.

Un symptôme de la dure loi de l’open source
Qu’un énième projet open source se casse les dents sur une affaire de développeur isolé, c’est triste, mais ce n’est pas vraiment surprenant. Kapitano rejoint une longue liste d’outils utiles portés à bout de bras, avant de s’effondrer faute de soutien.
En novembre dernier, une étude publiée sur arXiv (plateforme de prépublications scientifiques hébergée par l’Université Cornell) révélait que 89 % des 36 000 projets open source analysés avaient, au moins une fois, perdu leur développeur ou équipe principale – le plus souvent au cours des trois premières années. Dans la grande majorité des cas, ces départs scellaient la fin du projet, 73 % n’arrivant pas à désigner de nouveau mainteneur.
C’est aussi le sort qu’avait connu ClamTk en 2024, autre tentative d’interface graphique pour ClamAV, abandonnée après des années de développement solitaire, et que Kapitano entendait justement remplacer par une solution accessible, pensée pour simplifier les analyses ponctuelles sur Linux.
L’application sera bientôt retirée de Flathub, mais continuera de fonctionner sur les systèmes sur lesquels elle est installée, tant que le runtime restera compatible. De son côté, le code source a été publié dans le domaine public sous licence The Unlicense, ce qui signifie que n’importe qui peut le reprendre, le modifier et le redistribuer sans condition. À charge désormais pour la communauté de décider si elle souhaite, ou non, lui redonner vie, ou s’en inspirer.