Les Chevaliers De Baphomet : Le Manuscrit De Voynich

Nerces
Spécialiste Hardware et Gaming
12 décembre 2003 à 10h03
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Charles Cecil est l'une des figures les plus reconnues du jeu d'aventure PC. Après avoir développé trois titres mémorables pour Virgin Interactive (Lure Of The Temptress, Beneath A Steel Sky et Toonstruck), il s'est attelé à ce qui figure maintenant parmi les plus célèbres sagas : Les Chevaliers De Baphomet. Les histoires de George Stobbart et Nicole Collard ont été d'immenses succès et leur troisième aventure était évidemment très attendue par les fans du monde entier.

Charles Cecil avait toutefois inquiété pas mal de monde en annonçant que le concept avait été largement revu, l'interface complètement refondue et la réalisation graphique passablement transformée. Si l'on ne partage pas forcément la vision qu'a Charles Cecil de l'aventure moderne, on peut surtout se demander si ces changements ne risquaient pas d'envoyer tout le projet dans le mur ? Les Chevaliers De Baphomet ne risquaient-ils pas de perdre tout ce qui faisait leur charme ?


Jamais deux sans trois...

Sous-titrée Le Manuscrit De Voynich, cette nouvelle aventure signée Revolution Software reprend quelques six ans plus tard les personnages principaux de la saga des Chevaliers De Baphomet. Entre temps, Charles Cecil et son équipe ont développé le moyennement convaincant In Cold Blood mais depuis plus de trois ans, c'est bien sur l'aventure que nous testons aujourd'hui qu'ils ont travaillé. Une aventure qui est évidemment l'occasion de retrouver à quelques kilomètres l'un de l'autre nos héros : George Stobbart et Nicole Collard. A quelques kilomètres en effet, car pendant une petite partie du jeu il faudra contrôler à tour de rôle nos deux protagonistes. La distance ne les empêchant évidemment pas de se trouver très rapidement dans le pétrin !

George avait rendez-vous avec un scientifique en plein Congo mais l'avion de son ami Harry est endommagé par une tempête un peu trop soudaine pour être bien honnête. Les réacteurs prennent feu (enfin dans la vidéo c'est deux fois le même qui prend feu mais bon), l'atterrissage se fait avec les moyens du bord et il faut bientôt aider le gars George à sortir de l'avion alors que celui-ci est coincé sur une falaise et penche dangereusement vers le vide. A Paris, la situation de Nico n'est guère plus confortable. Alors qu'elle se rendait à ce qui promettait d'être une petite entrevue tranquille avec un gentil allumé passionné d'informatique, elle se retrouve tour à tour en présence d'un cadavre, d'une fausse brune armée d'un magnum 44 et enfin de la police de notre chère capitale.

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Tout en finesse graphique, l'introduction comporte une étrange erreur de "script" : c'est deux fois le même moteur qui tombe en panne ?!


La mort du "point & click" ?

Il semble donc que l'aventure démarre sur les chapeaux de roue pour nos deux compères et le joueur est tout de suite dans le bain... Enfin presque tout de suite car il doit d'abord s'habituer à cette nouvelle interface censée, si l'on en croit Charles Cecil, mettre à mort le "point & click". Autant le dire tout de suite : on n'est loin du compte ! En fait de mort du "point & click", l'ami Charles Cecil voulait sûrement parler du passage au "tout-console". Il est compréhensible qu'étant donné la taille respective des marchés console et PC, il soit plus rentable pour une société de développer en priorité pour les machines de Microsoft, Nintendo et Sony mais de là à servir aux joueurs PC un gameplay très clairement fait pour être utilisé au gamepad, il y a un pas que Revolution Software ne s'est pas gêné pour franchir. Je m'emporte, je m'emporte et je ne vous explique même pas le pourquoi de mon Kourou (NDLR : ah, non, celui-là c'est en Guyane)... Je disais donc de mon cou roux (NDLR : non, toujours pas, essaye encore)... Grrrmmmbl... De mon courroux ? (NDLR : oui, tu y es !).

Détaillons donc plus avant cette nouvelle interface qui élimine totalement l'emploi de la souris, périphérique bien rare sur console. Les personnages se dirigent au clavier où le pavé fléché simule la croix des gamepads et les touches Q, S, D et Z remplacent les boutons. Ne soyons pas de mauvaise fois et après quelques dizaines de minutes, une grande partie des joueurs se sera fait à cette interface de contrôle. Une grande partie ? Oui, c'est une partie du problème. Même après plusieurs heures de jeu, il se trouve encore des utilisateurs pour être complètement coincés par ces commandes finalement pas si évidentes en particulier pour les joueurs que l'utilisation du clavier rebute complètement. Messieurs les développeurs, sachez que même sur PC, on trouve des joueurs qui ne s'adonnent pas au FPS tous les jours. Les joueurs que le clavier ne rebutent pas peuvent donc continuer tranquillement leur aventure ou plutôt leurs aventures puisque comme nous l'avons dit, il faut s'occuper de l'un puis de l'autre des deux héros. Sortir George de son pétrin n'est pas bien sorcier et sa courte histoire au Congo est surtout un moyen de présenter les choses.

Elle permet de repérer les objets à ramasser, les éléments du décor que l'on peut manipuler et les interactions possibles avec les personnages. Même les moins habitués au genre comprennent ainsi très rapidement comment tout fonctionne d'autant que George est là pour indiquer la marche à suivre avec des petites phrases très précises. Cette première étape terminée et alors qu'on est encore très loin d'imaginer la suite de l'histoire, il faut s'occuper de Nico. Elle doit pour sa part trouver un moyen d'entrer chez le petit gars avec qui elle censée s'entretenir. Celui-ci est donc mort et après une rapide fouille de la salle de séjour, notre jolie Nico se trouve nez à nez avec une dénommée Petra, tueuse professionnelle de son état. La scène cinématique qui nous restitue cette rencontre est interactive c'est à dire qu'il faut la suivre attentivement car à un moment donné, le joueur devra intervenir pour appuyer sur une touche et sortir son alter ego du pétrin. La cinématique en question est d'ailleurs aussi réussie graphiquement qu'elle n'est ratée du point de vue de la mise en scène : le bras de Nico semble mesurer près de deux mètres et la position de la demoiselle après le premier coup de feu est pour le moins étrange.

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George et Nico forment un couple toujours aussi réussi et leurs dialogues sont très amusants


De drôles d'épisodes "Tomb Raider"

Cette cinématique achevée, Ms. Collard (Nico quoi) doit commencer son enquête et découvrir l'identité de la tueuse... Hélas après simplement quelques petites questions posées à droite et à gauche, la jeune femme se fait interpeller par la police et emmener au poste. Cet événement regrettable pour Nico est surtout prétexte à un nouveau changement de personnage et l'occasion pour le joueur de reprendre en main George. Rassurez-vous, ce passage d'un personnage à l'autre ne dure pas trop longtemps. Très vite, les deux héros découvrent qu'un certain Susarro est derrière leurs enquêtes respectives et cette piste les conduit bien vite vers un théâtre parisien abandonné depuis cinq longues années. L'aventure progresse ainsi régulièrement. Les phases de promenades / découverte d'objets classiques pour ce genre de jeux sont cependant entrecoupées de petites séquences cinématiques comme celle que nous décrivions précédemment et on notera également la présence de nombreux "puzzles". Dans la tête des développeurs, ces séquences avaient certainement pour but de rompre la monotonie des traditionnels jeux "point & click". S'il est indiscutable que certains joueurs apprécieront, il est à peu près aussi sûr que de nombreux autres trouveront ça proprement stupide et inutile de vous dire que je fais partie de cette seconde catégorie.

L'idée d'apporter de petites touches pour rafraîchir et dépoussiérer le concept du "point & click" n'était pas du tout mauvaise bien au contraire, mais il fallait sans doute le faire autrement. L'interactivé présente dans les séquences cinématiques rappellera les plus vieux joueurs aux souvenirs de l'ancêtre Dragon's Lair. Ce n'est certes pas difficile d'appuyer sur la bonne touche au bon moment mais cela n'apporte strictement rien au jeu ! On se fait surprendre presqu'à chaque fois mais comme le jeu reprend simplement au début de la séquence, le deuxième passage est dans 99% des cas le bon. De la même manière, les "puzzles" proposés tout au long de l'aventure sont presque tout le temps des déplacements de caisses dans le plus pur style Tomb Raider. On pousse, on tire, on grimpe, on repousse, on retire, on se trompe, on recommence... Rapidement pénible et sans intérêt. Alors qu'il suffisait de faire jouer le personnage avec une seule caisse de temps à autre, c'est presque à un Légo virtuel que nous invitent les développeurs ! Je vous ferais grâce des séquences "infiltration" qui cette fois rappelle une mauvaise imitation du concept de Metal Gear... Non, vraiment les tentatives de diversification du gameplay se soldent dans une majorité des cas par un échec. Il est sûrement des joueurs qui apprécieront mais pour ma part quand je suis sur un jeu d'aventure, j'aime faire de l'aventure pas du Sokoban !

Alors heureusement, il reste une histoire bien construite, des dialogues le plus souvent agréables à suivre et parsemés de touches d'humour qui font mouche. On appréciera d'ailleurs le soin apporté à la justesse de ces dialogues : selon les questions posées (ou non posées) à un personnage, celui-ci ne répondra pas tout à fait les mêmes choses. Hélas, cette aspect aventure réellement de qualité est gâchée par deux choses. Tout d'abord, tout est beaucoup trop facile. J'en conviens, il n'y a pas grand chose de plus frustrant que de rester bloqué bêtement sans savoir quoi faire pour avancer, mais il ne fallait tout de même pas exagérer dans l'autre sens ! Ici, les objets ou éléments utiles sont tous signifiés par une petite étoile... Pire, les personnages sont constamment à nous dire ce qu'il faut faire pour avancer ! Avec une telle facilité, on met bien vite en évidence le second défaut de l'aventure : sa longueur. Pensez donc qu'il ne faut pas plus de 8-9 heures pour en venir à bout quand le premier volet des Chevaliers De Baphomet devait bien en demander 25-30... Alors bien sûr, on appréciera le travail des graphistes qui se sont cassé la tête pour nous offrir des plans vraiment splendides et très variés. Bien sûr, on se délectera de la musique toujours très belle, souvent magnifique. Mais avouons également que nous sommes tout de même bien loin du compte... Bien loin de justifier les quelques trois années de travail d'une équipe très expérimentée, d'autant que le jeu est entâché de fréquents et très gênants retour au bureau de Windows !

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On pousse des caisses, on pousse des caisses, on pousse des caisses (c) Rainman !


Conclusion

Sans être le ratage que l'on pouvait craindre à écouter Charles Cecil parler de la mort du jeu d'aventure tel qu'on le connaissait, Le Manuscrit De Voynich n'en demeure pas moins une semi-déception. Semi car on ne peut évidemment pas passer sous silence la réalisation globalement très convaincante du titre. Le doublage français n'est pas toujours impeccable mais le graphisme, les scènes cinématiques et la musique sont parmi les plus réussis du genre. Les décors, nombreux et variés, démontrent avec brio toute l'étendue du talent des dessinateurs de Revolution Software et le scénario n'a en lui-même pas grand chose à envier aux deux précédents épisodes. Hélas, Le Manuscrit De Voysnich pêche sur de nombreux autres aspects et les fanatiques de l'aventure PC risquent bien de pester contre ce jeu à l'influence console omniprésente et bien agaçante.

Tout d'abord la disparition du contrôle souris et son remplacement par un pseudo pad "émulé" avec les touches du clavier n'est pas une franche réussite. Ensuite, reconnaissons que le niveau de difficulté a passablement été revue à la baisse. La durée de vie s'en trouve réduite d'au moins 50% et les petites phases censées casser la monotonie tombent plutôt comme des cheveux sur la soupe. Trop souvent les développeurs ont utilisé la possibilité de pousser des objets tantôt pour actionner un mécanisme, tantôt pour atteindre un objet hors de portée. Ces épisodes "à la Tomb Raider" énerveront sans doute de nombreux joueurs qui pesteront encore bien davantage à la découverte des séquences "à la Metal Gear"... A vouloir être trop consensuel, on finit par perdre son âme.

Le Manuscrit De Voynich n'est donc pas un mauvais jeu, loin de là même ! Sa très belle réalisation technique (à condition d'apprécier la 3D évidemment) et son scénario particulièrement soigné devraient convaincre sans problème de nombreux joueurs qui ne seront pas rebutés par les intermèdes "interactifs" et les séquences "diversification". Le jeu a par contre perdu une grande partie de l'esprit "Baphomet" qui caractérisait les deux épisodes précédents. Lui donner le nom de la série, c'est d'ailleurs jouer un bien mauvais tour aux fans des anciens volets qui ne retrouveront pas grand chose de tout ce qu'ils avaient autrefois apprécié.


Les Chevaliers De Baphomet : Le Manuscrit De Voynich

4

Les plus

  • Très belle réalisation
  • Scénario intéressant
  • Dialogues et humour réussis

Les moins

  • Très court et très facile
  • Contrôle au clavier très moyen
  • Trop éloigné (puzzles) des anciens jeux

Note globale6

Réalisation7

Prise en main7

Durée de vie5



Réfractaire à toutes nos tentatives de captures d'écrans (en dehors des cinématiques), Le Manuscrit De Voysnich ne nous a laissé d'autre choix que d'utiliser les images "officielles".

Nerces

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Tombé dans le jeu vidéo à une époque où il fallait une belle imagination pour voir ici un match de foot, là un combat de tanks dans ces quelques barres représentées à l'écran, j'ai suivi toutes les évolutions depuis quarante ans. Fidèle du PC, mais adepte de tous les genres, je n'ai du mal qu'avec les JRPG. Sinon, de la stratégie tour par tour la plus aride au FPS le plus spectaculaire en passant par les simulations sportives ou les jeux musicaux, je me fais à tout... avec une préférence pour la gestion et les jeux combinant plusieurs styles. Mon panthéon du jeu vidéo se composerait de trois séries : Elite, Civilization et Max Payne.

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