Microsoft expérimente l’intégration de Phi-4 mini, un modèle de langage maison capable de tourner directement sur votre machine. De premiers indices suggèrent que le navigateur Edge pourrait bientôt traiter certaines tâches d’IA sans passer par le cloud.

Avec ce LLM, le navigateur Edge pourrait traiter l'IA en local sur Windows 11. © Ascannio / Shutterstock
Avec ce LLM, le navigateur Edge pourrait traiter l'IA en local sur Windows 11. © Ascannio / Shutterstock
L'info en 3 points
  • Microsoft teste Phi-4 mini dans Edge, une IA locale fonctionnant sans connexion cloud pour améliorer réactivité.
  • Phi-4 mini, avec quatorze milliards de paramètres, propose des tâches comme reformulation et résumé directement sur votre PC.
  • Stratégie Microsoft : limiter coûts cloud et renforcer confidentialité, répondant aux critiques sur la protection des données.

Copilot par-ci, Copilot par-là… À force de pousser son assistant intelligent un peu partout, on en oublierait presque que Redmond travaille sur d’autres projets IA, moins médiatiques, certes, mais tout aussi stratégiques. C’est pourtant exactement ce qui semble se jouer du côté de Microsoft Edge. Dans les versions expérimentales du navigateur, plusieurs indicateurs laissent en effet penser que l’entreprise testerait une forme d’intelligence artificielle embarquée, fonctionnant localement grâce à son petit modèle de langage maison : Phi mini. Contrairement aux approches actuelles, qui reposent encore massivement sur des traitements à distance, l’idée serait ici de s’appuyer directement sur les capacités matérielles des PC Windows 11 pour traiter certaines tâches d’IA, sans jamais passer par le cloud.

Phi-4 mini : une IA locale signée Microsoft

Repéré dans les dernières versions de Microsoft Edge Canary par Leopeva64 sur X.com, le modèle Phi-4 mini commence déjà à se faire une place dans les flags du navigateur. Pour l’instant, quatre fonctions expérimentales y font référence.

On y trouve d’abord une Prompt API, conçue pour exécuter localement des tâches de traitement du langage comme le résumé, la classification ou la reformulation. Trois autres API viennent compléter l’ensemble, chacune dédiée à une fonction précise : générer un résumé, rédiger un texte, ou en réécrire un existant. Dans tous les cas, le traitement se fait sur la machine, sans passer par les serveurs de Microsoft. À ce stade, on ne sait pas encore si ces fonctionnalités s’appuieront sur les puces NPU des PC Copilot+, ou si elles seront accessibles plus largement sur l’ensemble des appareils Windows 11.

Dans la description des flags, Microsoft précise bien que ces outils restent expérimentaux, sans garantie de déploiement dans les versions finales du navigateur, et ne sont pas destinés à produire des contenus factuellement exacts, ni à traiter des requêtes complexes.

À la différence de LLM comme GPT-4, Phi-4 mini n’a donc pas vocation à répondre à des usages complexes ou ouverts. Il s’agit d’un modèle de langage intermédiaire, doté de quatorze milliards de paramètres, conçu pour offrir de bonnes performances tout en restant compact. Suffisamment léger pour tourner localement sur des machines classiques, suffisamment efficace pour mener des opérations ciblées comme la reformulation ou le résumé. Et surtout, intégralement développé en interne par Microsoft, ce qui simplifie son intégration dans l’écosystème Edge et limite les contraintes liées à des partenariats ou à des licences tierces.

Avec Phi-4 mini, Microsoft teste des fonctionnalités d'IA locale dans Edge. © Clubic
Avec Phi-4 mini, Microsoft teste des fonctionnalités d'IA locale dans Edge. © Clubic

Un choix stratégique loin d’être anodin

Mais puisqu’il existe déjà Copilot, à quoi bon développer et intégrer en parallèle un petit modèle de langage comme Phi mini ? Eh bien, à vrai dire, Microsoft aurait beaucoup à y gagner.

Faire tourner un modèle localement permet déjà de limiter la dépendance au cloud. Les solutions comme Copilot ou Bing Chat mobilisent, à chaque requête, des serveurs GPU coûteux, et à l’échelle de millions d’utilisateurs et utilisatrices potentiels, la facture a vite fait de grimper. En déléguant certaines tâches au poste local, Redmond réduit donc ses coûts d’infrastructure tout en améliorant la réactivité. Sans aller-retour réseau, les réponses sont quasi instantanées. Et pour des actions simples comme reformuler un paragraphe ou résumer une page, cette sensation de fluidité compte presque autant que le résultat lui-même.

La confidentialité entre aussi en ligne de compte. En traitant le contenu directement sur la machine, Microsoft peut répondre à des attentes plus strictes en matière de protection des données. Un argument qui résonne particulièrement dans les contextes professionnels, administratifs ou réglementaires, mais aussi personnels, alors que la firme a, cette année, essuyé plusieurs critiques sur ce terrain (coucou Recall).

Ce projet vient aussi donner du corps à la promesse des PC Copilot+, censés incarner la nouvelle génération de machines orientées IA.

Mais derrière l’intégration de Phi mini, c’est une stratégie autrement ambitieuse qui se dessine. Alors que le marché du navigateur entre dans une nouvelle phase, portée par l’IA et la promesse d’agents capables d’agir à votre place, chacun y va de sa recette pour gagner la course. Google capitalise sur Gemini dans Chrome et Android, Opera s’en remet à plusieurs modèles avec Aria, Brave et Leo piochent dans les LLM de Mistral ou de Meta, et Perplexity rêve déjà d’un navigateur conçu pour vous profiler avec précision.

Face à cette logique fragmentée nourrie à la vitesse et aux promesses, Microsoft joue une autre carte, celle du tout-en-un (modèle, navigateur, système d’exploitation). Une approche plus cohérente, plus fluide, plus efficace aussi, sans doute. Mais aussi plus fermée, et de plus en plus difficile à contourner. Finalement, demain, la question ne sera peut-être plus de décider quels outils on préfère, ni même de savoir à qui l’on veut confier ses données, mais d’accepter, contraint et forcé, que cette liberté supposée de choisir n’existe plus.

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