Dans à peine plus d'un an, le découvert bancaire automatique deviendra un crédit à la consommation. La nouvelle réglementation européenne impose des règles strictes qui risquent de priver les ménages les plus fragiles de ce filet de sécurité.

L'ordonnance prise le 3 septembre dernier par le président Emmanuel Macron, qui transpose une directive européenne adoptée il y a deux ans, va radicalement transformer les règles du découvert bancaire. À compter du 20 novembre 2026, votre découvert bancaire sera soumis aux mêmes contraintes qu'un crédit à la consommation classique. Les banques devront en effet évaluer la solvabilité de leurs clients selon les critères du crédit à la consommation. Plus de 2 Français sur 10, qui se retrouvent dans le rouge chaque mois, pourraient directement être concernés, et impactés.
Le découvert bancaire intègre le régime du crédit à la consommation
La Banque de France l'a confirmé, l'ordonnance 2025-880, adoptée le 3 septembre en Conseil des ministres, fait basculer le découvert dans « le régime complet du crédit à la consommation ». Un changement imposé par l'Europe, qui vise à mieux encadrer tous les produits de crédit, du paiement fractionné au découvert en passant par la location avec option d'achat.
Jusqu'ici, le découvert vivait dans une zone grise, en étant considéré comme une sorte de crédit, mais avec des règles allégées. Plus pour longtemps. Au-delà de 200 euros (en dessous, la procédure reste légère), les banques devront éplucher revenus, dépenses et même consulter le fichier national des incidents de crédit. Le TAEG (taux annuel effectif global) et les conditions de remboursement devront être détaillés dans un document dédié, comme pour n'importe quel prêt.
Concrètement, il faudra que le consommateur établisse une demande expresse de découvert au-delà de la limite. Sa banque devra alors l'étudier, et l'accorder ou non. L'automatisation du découvert va donc prendre fin, et la protection des citoyens européens si souvent évoquée par Bruxelles, pourrait en prendre un coup.
La règle des 30% qui va bloquer des millions de Français
Le vrai casse-tête de la fin du découvert automatique, c'est la règle des 30%. Kézako ? Les conseillers bancaires vérifient systématiquement que vos charges mensuelles (factures, loyer, crédits) ne dépassent pas 30% de vos revenus nets. Sauf qu'avec cette nouvelle grille de lecture, un découvert de 400 euros devient une mensualité fictive. Du coup, une personne qui gagne 3 000 euros avec 1 000 euros de charges passe de 33% à 46% d'endettement, explique MoneyVox. Dossier refusé.
L'Observatoire des inégalités rappelle qu'un quart des salariés français touchent moins de 1 750 euros nets mensuels. Pour cette population, obtenir une autorisation de découvert de 500 ou 1 000 euros pourrait relever de l'exploit. Surtout qu'ils sont nombreux à user du découvert pour jongler sur un fil entre leurs revenus et leurs factures, coincés dans une spirale entre découvert et frais bancaires.
Du côté des banques, c'est aussi la panique annoncée. Les anciennes autorisations de découvert données ne sont officiellement pas concernées, confirme la Banque de France, qui n'évoque que les autorisations accordées à compter de ce fameux 20 novembre 2026. Mais les professionnels s'attendent à une vague de résiliations préventives d'ici l'application de la réforme. La seule avancée notable est qu'en cas de coupure, vous disposerez désormais de douze mensualités pour rembourser, contre un remboursement immédiat auparavant. Un moindre mal.