Outil pensé pour renforcer la confidentialité en ligne, le VPN est devenu un service grand public massivement adopté. Mais entre mauvaises habitudes, choix par défaut et usages détournés, les statistiques dressent un constat édifiant : trop souvent, l’outil est utilisé à côté de sa fonction première. Et la protection des données personnelles passe au second plan.

- Le VPN, conçu pour la confidentialité, est souvent utilisé pour des raisons professionnelles ou de divertissement.
- Près de la moitié des utilisateurs choisissent des VPN gratuits, souvent au détriment de leur sécurité en ligne.
- La confidentialité reste cruciale face à la surveillance croissante, mais le VPN est mal compris et sous-utilisé.
On pourrait croire que le message est passé. Que face aux atteintes à la vie privée, aux cyberattaques et à la surveillance de plus en plus étendue, le VPN s’est imposé comme une évidence. Et de fait, les chiffres sont plutôt éloquents : selon les estimations issues de plusieurs sources, compilées dans un rapport publié par Surfshark, plus de 1,75 milliard de personnes dans le monde utilisent un VPN. Une proportion qui représente un tiers des internautes. Mais à y regarder de plus près, un certain nombre de statistiques viennent tempérer cet apparent raz de marée. Et questionner, surtout, la façon dont ces outils sont compris, adoptés… et parfois totalement détournés de leur usage initial.
Un outil conçu pour la vie privée… que presque personne n’utilise pour ça
Oui, parce que vous pensiez que la majorité des internautes utilisaient un VPN pour renforcer leur confidentialité en ligne ? Eh bien pas du tout. Loin de là, même. Entre avril 2024 et avril 2025, les données de Google Trends montrent que la moitié des recherches liées aux réseaux privés virtuels portaient sur des usages professionnels. Viennent ensuite la sécurité (23 %), le gaming (15 %), les voyages (7 %), et tout en bas du classement, la confidentialité. À peine 5 % des requêtes. Autant dire que ce n’est pas ce qui motive les foules.

Difficile de parler de désintérêt total, mais force est de constater qu’on est très loin de l’image du VPN comme outil de protection de la vie privée. Dans l’esprit du grand public, il reste surtout un moyen de contourner une restriction ou d’accéder à une ressource, pas un outil de lutte contre la collecte des données personnelles.
Un constat que viennent compléter les usages déclarés dans le VPN Market Report 2024 de Security.org, mené aux États-Unis. Si 50 % des personnes utilisent un VPN uniquement pour des raisons personnelles, 28 % le font uniquement pour le travail, et 22 % pour les deux. Et si 40 % des utilisateurs et utilisatrices s’en servent tous les jours ou presque, la majorité l’active de manière occasionnelle, comme un outil de circonstance, pour répondre à un besoin ponctuel.
En clair, le VPN s’est imposé dans les usages, mais pas forcément dans le sens qu’on imagine. Il est plus accessible, plus visible, plus souvent installé… mais rarement utilisé comme un réflexe de protection, ni avec l’intention de s’inscrire durablement dans les pratiques numériques.
Vers le pire choix possible
Autre chiffre qui fait tiquer : près de la moitié des personnes qui utilisent un VPN se tournent vers une solution gratuite. Pas forcément par naïveté, ni par manque de moyens. La plupart du temps, il s'agit simplement d'une question de praticité. On a besoin d’un VPN pour débloquer un site ou accéder à un service, alors on prend ce qui passe, sans trop s’attarder sur les détails. Et c’est généralement là que les ennuis commencent.
Car à quelques rares exceptions près, ces VPN gratuits posent habituellement plus de problèmes qu’ils n’en résolvent. Fonctionnalités bridées, collecte de données, revente des historiques de navigation, voire diffusion de malwares… On est franchement loin des promesses de sécurité et de confidentialité mises en avant par ce type de service.
Et puis il y a celles et ceux qui refusent d’utiliser un VPN, par méfiance (9 %), par scepticisme (13 %), parce que c’est trop cher (27 %) ou parce qu’ils n’en voient pas l’utilité (52 %).
Bref, là encore, le VPN reste majoritairement perçu comme un outil accessoire. Difficile, alors, de construire une culture solide autour de la confidentialité. Et pourtant…
Et pourtant, la question de la confidentialité est plus que jamais d’actualité
Nos recherches, nos déplacements, nos connexions alimentent aujourd’hui des modèles publicitaires, des profils comportementaux ou des dispositifs de surveillance. Limiter la circulation de ces données, c’est garder une part de contrôle sur ce qu’on partage, et avec qui.
Certes, l’anonymat absolu n’existe pas. Mais l’anonymat relatif, oui – et il mérite d’être défendu. Parce qu’on n’a pas besoin d’être suspect pour vouloir protéger ce qu’on fait. Parce que « si vous n’avez rien à vous reprocher, vous n’avez rien à cacher » est une logique de contrôle, pas de liberté. Et parce qu’entre exploitation marchande des données et volonté étatique croissante d’y accéder au nom de la sécurité, protéger sa confidentialité reste une manière de tracer des limites simples dans un système qui les efface de plus en plus.
Alors oui, le VPN n’est pas un gadget, et ce n’est pas non plus une baguette magique. Mais c’est un outil utile, à condition qu’il soit bien compris et bien configuré, ce qui implique de dépasser les clichés, de sortir du réflexe du gratuit, de prendre le temps de comprendre à quoi servent les fonctions de sécurité et surtout, de réintégrer la confidentialité comme motivation légitime, et pas comme simple bonus.
Source : Surfshark