Musique libre : découverte et tour d'horizon

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Télécharger légalement sur eMule : c'est possible !

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Lors des débats houleux sur la loi DADVSI, il a été question de la légalité des logiciels de Peer To Peer : accusés de tous les maux, ils ne seraient que des vecteurs de diffusion de musique ou de films piratés. Ne nous voilons pas la face, c'est en grande partie le cas. Néanmoins, de la même manière que certains défenseurs du logiciel libre défendent l'utilisation de BitTorrent « pour télécharger des distributions Linux » (ce qui est effectivement faisable), il est tout à fait possible de télécharger de la musique en toute légalité sur eMule. Pas, évidemment, le dernier 50 Cent ou Nelly Furtado qui restent la propriété des maisons de disque, mais de la musique dont les auteurs permettent explicitement la reproduction libre.

Phénomène encore récent, la musique libre peut paraître comme de la « sous-musique », bricolée depuis un garage ou une chambre. Certes, mais des mouvements comme le punk ou le hip hop ont démontré depuis près de trois décennies qu'il était tout à fait possible d'enregistrer des classiques révolutionnaires avec des bouts de ficelle. La démocratisation des équipements d'enregistrement et des instruments fait que n'importe qui, à condition d'avoir un peu de talent (les mauvaises langues diront que même cette étape n'est pas indispensable) peut s'improviser artiste. Dès lors, le fait de passer outre les étapes traditionnelles (société de gestion des droits, maison de disques....) pour pouvoir proposer ses créations de manière encore plus rapide et directe peut être encore plus tentant. C'est aujourd'hui possible via plusieurs licences, dont la plus connue se nomme Creative Commons. La méthode suscite néanmoins des interrogations, notamment au niveau de la viabilité économique (comment gagner de l'argent sur une oeuvre que l'on peut reproduire gratuitement ?) et de la valeur juridique réelle de ces licences.

La musique libre : comment ça marche ?

Avant de plonger dans le vif du sujet, il convient de rappeler les fondements de la distribution de la musique telle qu'on la connaît. Lorsque vous achetez un CD chez un disquaire ou dans une grande surface, vous n'achetez pas le droit d'en faire ce que vous voulez et la musique ne vous appartient pas. Elle appartient à l'ayant droit, donc à l'artiste et/ou à la maison de disques qui commercialise le titre ou l'album. Une exception de copie privée existe et tolère notamment la réalisation de copies dans le cercle familial ou à usage personnel, mais cette exception n'est pas un droit. On pourrait débattre longtemps sur le sujet : « le P2P peut-il être assimilé à de la copie privée » mais là n'est pas le sujet. Pour simplifier, disons que mettre le dernier 50 Cent à disposition, ou de le télécharger est illégal et que vous risquez gros. Plus sérieusement, il y'a là un flou techno-juridique qui, il faut bien l'admettre, risque fort de ne pas tourner en faveur des internautes. Face à ce système est né celui du « copyleft ».

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Cet homme ne télécharge pas de musique, et vous non plus !


Vous aurez deviné le principe du jeu de mots sur le « copyright ». Le copyright est fait pour limiter les droits à la copie, tandis que le « copyleft » consiste donc à autoriser et encourager certains usages, et notamment la distribution libre sur les réseaux P2P, pour des motivations proches de celles du logiciel libre : diffuser la musique le plus largement possible pour la faire connaître du plus grand nombre. Tout comme le logiciel libre, le « copyleft » n'induit pas forcément la gratuité. Simplement, contrairement au système « traditionnel » où les artistes confient leurs droits d'auteur à des sociétés de gestion collective comme la SACEM, les licences libres impliquent la gestion individuelle des droits, et peuvent décider elles-mêmes des usages autorisés. Ca ne signifie en aucun cas que ces oeuvres ne sont pas soumises au droit d'auteur : licence libre ne signifie pas domaine public, et certains artistes « libres » tentent de vivre de leur musique, par la vente de CD ou (surtout) par le biais des concerts.

Les différentes licences disponibles

A l'instar du logiciel libre qui peut être publié selon plusieurs licences (GPL, LGPL, BSD...), la musique libre (et plus généralement toute forme d'oeuvre) est également régie par des licences aux buts plus ou moins proches, mais dont les termes peuvent différer. On distingue essentiellement une licence « dominante », Creative Commons, même si d'autres (Art Libre, GNU Art...) existent également. En réalité, n'importe qui pourrait créer une licence libre, pour peu qu'il ait suffisamment étudié le code de la propriété intellectuelle afin d'être en conformité avec celui-ci.

La licence « dominante », Creative Commons, propose en réalité un ensemble de licences permettant une grande souplesse. Ces différents contrats se caractérisent par une combinaison de conditions qui fixent les utilisations possibles de l'oeuvre :

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  • BY (Paternité) : l'utilisateur doit citer le nom de l'auteur. C'est la condition de base, commune à toutes les licences Creative Commons

  • ND (Pas de modification) : l'utilisateur ne peut pas modifier l'oeuvre originale à moins d'obtenir l'autorisation de l'artiste.

  • NC (Pas d'utilisation commerciale) : l'utilisation commerciale de l'oeuvre est soumise à l'autorisation de l'artiste. Contrairement aux idées reçues, la condition NC ne signifie pas que l'utilisation de l'oeuvre à des fins commerciale est interdite, simplement qu'elle ne peut pas se faire au mépris de l'auteur.

  • SA (Partage des conditions à l'identique) : l'utilisateur doit distribuer l'oeuvre selon les termes de la licence initiale. Cette condition rappelle les termes de la licence GPL, qui interdit par exemple à un développeur d'utiliser du code publié sous licence GPL dans un logiciel propriétaire et de le modifier sans faire profiter la communauté de ces modifications.

Les différentes licences sont nommées par ces critères. Ainsi, une oeuvre publiée sous la licence BY-NC-SA impliquera que l'auteur de l'oeuvre doit être cité, que l'usage commercial est interdit sans l'autorisation de l'auteur et que l'oeuvre doit être publiée selon les mêmes conditions. De même, une oeuvre publiée sous licence BY-ND stipule que l'auteur doit être cité et que toute modification de l'oeuvre est interdite, mais que celle-ci peut être utilisée à des fins commerciales puisque le critère NC n'est pas présent.

D'autres licences libres, moins courantes, permettent une forme de flexibilité, comme la licence Open Music qui propose une formule « green » permettant tous les usages, et une formule « yellow » plus restrictive. Néanmoins, sans vouloir faire de favoritisme à l'égard d'une licence ou de l'autre, il nous paraît clair que les licences Creative Commons sont les plus répandues à l'heure actuelle, suivies de la licence Art Libre.A priori, la musique libre peut se trouver partout : elle est même précisément faite pour circuler librement sur les réseaux P2P. Néanmoins, au risque d'ébranler un des arguments favoris des défenseurs du peer to peer (même si c'est vrai dans une certaine mesure), eMule, BitTorrent et autres Limewire sont majoritairement utilisés pour rechercher de la musique que l'on connaît déjà, que ce soit un titre entendu à la radio ou un nom soufflé par une connaissance. Les artistes publiant leur musique sous licence libre ne disposent actuellement d'aucune médiatisation. Si Internet a déjà servi à révéler certains talents, jusqu'à les signer sur une maison de disque (l'exemple des Arctic Monkeys revient souvent), il faut bien admettre que l'on serait totalement incapable de citer un seul artiste « libre ». D'où la nécessité de disposer de plates-formes relais.

Dogmazic

L'association Musique Libre agit pour la promotion des artistes sous licence Creative Commons ou Art Libre depuis quelques années déjà, avec un site très touffu, mais fourni en ressources diverses sur les artistes et les labels de musique libre. Créé à Bordeaux, Musique Libre, devenu Dogmazic, a fait des petits, telle qu'une antenne lyonnaise ou Pragmazic, un site de vente de musique dématérialisée et sur support CD.

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Le premier contact avec le site est assez ardu : pour un domaine musical quasiment inconnu du public, on ne peut pas dire que Dogmazic prenne l'auditeur néophyte par la main. La page d'accueil fourmille de sections, de liens, de profils d'artistes. Pourtant, le site s'avère être une véritable mine d'or, relayant actuellement plus de 1600 groupes et plus de 150 labels dans une cinquantaine de styles musicaux ! Comment s'y retrouver dans cette jungle ?

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Le site Dogmazic est confus au premier abord, mais on y retrouve essentiellement trois types de contenus. Le premier, et le plus important, est l'archive musicale. Mettre en avant un tel catalogue n'est pas chose aisée, et Dogmazic a choisi de ne pas imposer sa vision des choses en mettant leurs propres choix en avant, que ce soit sur la page principale du site ou sur la page d'accueil de la section musique.

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Ce sont les utilisateurs du site qui contribuent à la mise en avant sous différentes formes : les artistes les plus populaires (calculés avec un algorithme mêlant des paramètres tels que le nombre de téléchargements ou les notes attribuées), les derniers inscrits, les morceaux en cours d'écoute ou encore les dernières playlists.

On trouve également sur les pages principales du site un module de recherche particulièrement complet, mais là encore très touffu : il est possible de rechercher des artistes selon leur nom, leur label, leur ville d'origine ou encore leur genre musical.

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La page de chaque artiste renvoie vers la liste des titres proposés. Ceux-ci peuvent être écoutés en streaming ou téléchargés au format MP3 ou Ogg. On appréciera également la possibilité d'écouter une liste de lecture comprenant tous les titres d'un artiste en streaming ou de la télécharger sous forme de podcast. Cette possibilité est également offerte sur la section « Les playlists » de la section principale Musique.

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Dogmazic est également une plate-forme engagée, proposant des ressources sur les licences libres, notamment un tableau comparatif des différentes licences existantes, des FAQ sur les avantages de la musique libre pour les utilisateurs, les diffuseurs ou les artistes.

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Via son blog Dogmazine, dont le flux est repris sur la page principale de Dogmazic, le site propose également des actualités et des réflexions sur la musique libre et sur le libre en général, n'hésitant pas, par exemple, à relayer des informations sur les distributions Linux liées à la création musicale ou à la distribution de contenus libres.

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Jamendo

Nous avons largement évoqué Jamendo dans notre tour d'horizon des plates-formes de téléchargement légal sans DRM. Sans rentrer dans les querelles internes (qui existent toujours quelque soit le domaine), on peut distinguer avec Dogmazic et Jamendo deux approches, toutes deux basées sur la même « matière première » mais poursuivant des buts différents : Jamendo est une entreprise commerciale alors que Dogmazic est créée par des bénévoles et refuse le recours à la publicité sur son site.

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Sans vouloir répéter ce que nous avons déjà détaillé dans notre précédent article, Jamendo propose plus de 2000 albums en téléchargement ou en écoute. Pour un néophyte, Jamendo offre peut-être un visage plus abordable et une interface plus proche de sites comme eMusic, VirginMega ou l'iTunes Store : l'utilisateur navigue essentiellement dans un catalogue d'albums représentés par leurs pochettes.

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L'interface est assez travaillée et notamment basée autour du lecteur Jamendo, intégré au site et permettant, à condition de s'inscrire, de réaliser ses propres listes de lecture à partir du catalogue proposé. Les néophytes ne sachant pas où donner de la tête peuvent également se laisser guider par les tags de la page d'accueil qui représentent les genres proposés (plus un genre est représenté, plus le tag est gros) et qui ouvrent directement une liste de lecture basée sur le genre. Comme pour Dogmazic, il s'agit d'un bon moyen de découvrir des artistes : vous ne connaissez aucun nom présent sur ces sites, vous avez au moins des préférences en matière de genres musicaux.

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Jamendo permet d'écouter les titres des artistes présents, mais également de les télécharger au format MP3 ou Ogg. En revanche, pour cela, il vous faudra passer impérativement par eMule ou un client BitTorrent. Les titres ne sont pas hébergés par Jamendo mais transitent sur ces réseaux P2P. Selon votre préférence, vous utiliserez l'un ou l'autre, mais la solution BitTorrent est peut être la plus simple (et la plus rapide) : les clients sont nombreux (uTorrent, BitComet, l'extension FoxTorrent...) et le navigateur Opera inclut même un client.

Quelques artistes à écouter ?

Difficile de choisir des artistes à écouter parmi la multitude de titres disponibles sur les plates-formes libres. Néanmoins, afin de vous donner un aperçu des oeuvres proposées, et pour faire définitivement taire l'idée reçue selon laquelle la musique libre est une sous-musique, voici quelques coups de coeur, qu'il ne faut considérer que comme tels, et non comme une liste exhaustive d'artistes incontournables.

Bruno Stimart

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Présent sur Jamendo, cet auteur/compositeur/interprète belge propose une discographie assez prolifique et variée (instrumentaux, jazz, chanson...) et ses textes parfois bavards, mais souvent inspirés, devraient plaire aux amateurs de chanson française « engagée ». Ses albums sont déjà si nombreux qu'il est difficile d'en recommander un, mais Il y a est particulièrement bien fait, avec des morceaux à la fois sombres et chaleureux comme L'intégration ou la chanson titre, qui méritent une écoute attentive.


Madame Olga/La Curiosité Tua le Chat

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A la base de ces deux groupes lyonnais que l'on peut également écouter sur Jamendo, on trouve le même chanteur, et quiconque ayant déjà vu l'un des deux groupes sur scène sait que le dénommé Thibaut a de l'énergie à revendre et un certain sens de l'humour, dans ses paroles comme dans ses gestes. Dans les deux cas, il s'agit de rock musclé et mélangé à des touches d'electro ou de hip hop, avec des textes souvent ironiques (Les boulots à la con, Comme l'a dit Ghandi) et des mélodies assez pop. Le tout met systématiquement de bonne humeur.



Delgarma

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Derrière Delgarma, on trouve (entre autres) Didier Guillon-Cottard, qui dirige l'antenne lyonnaise de Dogmazic. Le son de ce groupe à dominante acoustique est assez indescriptible, leurs influences étant très variées, tout comme les textes qui jonglent entre le français, l'anglais et le suédois (pays d'origine de leur chanteuse). On peut dire sans trop s'avancer que les fans de Rammstein ne s'y retrouveront pas trop, mais que les amateurs de belle pop acoustique aux textes finement ciselés (écoutez « La caissière ») s'y sentiront à l'aise.

La musique libre : quelles perspectives ?

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Histoire d'éclaircir notre propos par un avis éclairé sur le sujet, nous avons rencontré Didier Guillon-Cottard, musicien au sein du groupe Delgarma et président de Musique Libre Lyon, une des composantes de Dogmazic. Il nous en dit un peu plus sur les perspectives économiques, les différentes licences et les idées reçues sur la musique libre.

Présentez-nous l'association Musique Libre et les différents sites de Dogmazic.

L'association Musique Libre est basée à Bordeaux et a été créée par Eric Aouanès, Eric Marie Gabalda et Emmanuel Sargos, dans le but de promouvoir les artistes indépendants qui utilisent les licences libres pour gérer leurs droits. Le but principal de Dogmazic est de proposer une archive musicale d'artistes sous licences libres, mais on propose aussi des informations sur les licences, afin d'aider les artistes qui souhaiteraient y passer. Nous avons ensuite Pragmazic, qui est une entreprise créée par des membres de Dogmazic, et dont le but est de vendre des albums d'artistes commercialisés par des labels (NDLR : mais toujours sous licence libre) mais avec une certaine éthique, dans le but de trouver un modèle équitable pour les artistes. Dogmazine est un blog animé par d'autres membres, et il propose des actualités et des réflexions sur la musique libre. Le fil d'actualités de Dogmazine est repris sur Dogmazic. Enfin, Musique Libre Lyon est le site de l'antenne lyonnaise de l'association.

On parle beaucoup de musique libre, mais on a une image assez confuse de ce mouvement, notamment en raison de la multiplicité des licences et des artistes inconnus du public. Pouvez-vous éclairer notre lanterne sur ce sujet ?

Je pense qu'il faut retourner le problème et oublier la musique libre. Il y a la musique, et ce qu'on appelle le droit d'auteur. Les artistes qui choisissent de publier leur musique sous licence libre ne sont pas contre le droit d'auteur, mais souhaitent tout simplement gérer leurs droits de manière individuelle, sans passer par une société de gestion collective comme la SACEM, et fixer eux-mêmes les conditions d'utilisation de leurs oeuvres. On pense que la SACEM est incontournable pour faire de la musique, mais c'est faux, il y a de nombreux artistes qui souhaitent uniquement faire de la musique pour le plaisir, pour s'exprimer.

Pour ce qui est des licences, on en compte actuellement 27, mais les plus utilisées sont les licences Creative Commons et Art Libre. Mais en fait, n'importe qui peut créer sa propre licence, il suffit pour cela de connaître le code de la propriété intellectuelle.

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Didier Guillon-Cottard officie au sein de Delgarma


On associe généralement musique libre et téléchargement gratuit. Comment un artiste libre peut-il gagner sa vie ?

Là, j'enfile ma casquette d'artiste. Je suis aussi membre d'un groupe (NDLR : Delgarma) et je ne suis pas pour le tout gratuit, je pense que l'accès à la culture est important, mais nous vendons également des CD et ça me fait toujours plaisir quand quelqu'un nous dit qu'il a aimé notre musique au point d'acheter notre album. Personnellement, j'ai un emploi et un salaire qui tombe tous les mois, mais de nombreux artistes libres essaient de vivre de leur musique. Certains viennent d'ailleurs de la SACEM, qu'ils ont quittée parce qu'ils ne gagnaient rien avec ce système. Mais il est clair que l'essentiel des revenus d'un artiste provient des concerts, et non des droits d'auteur.

Quelles sont les évolutions à venir pour l'association et Dogmazic ?

Avec Dogmazic, on essaie d'aller au-delà du web, en organisant des rencontres autour de la musique libre, en tenant des stands dans des festivals. C'est aussi pour ça que l'association a souhaité créer des antennes locales. Nous avons également un projet dont on ne peut pas parler en détail, mais l'idée est d'emmener l'archive de Dogmazic en dehors du web. A ce sujet, nous avons récemment passé un accord avec la distribution Kaella dont la dernière version inclut une sélection de titres issus de Dogmazic, à travers une interface très simple, même si on reproche souvent à notre site d'être confus.

La diffusion libre est-elle l'avenir ?

A l'heure où l'industrie du disque cherche des solutions à la crise qu'elle traverse, et qu'on prédit des rapports « tenant sur une feuille A4 », on ferait peut-être bien de se pencher sur les idées apportées par la communauté libre en matière de diffusion. Certes, le pari est risqué : en permettant une diffusion libre et gratuite de la musique, comment s'assurer que l'utilisateur aura le réflexe de l'achat ?

A cela, on pourrait trouver plusieurs pistes : l'une d'entre elles est de proposer une valeur ajoutée à l'achat. Un auditeur ayant apprécié quelques titres au format MP3 ou Ogg aura peut-être envie de « passer à la caisse » si on lui propose davantage, au niveau de l'emballage, du contenu fourni, de la qualité d'écoute proposée... Là-dessus, les artistes du libre font preuve d'une grande maturité. Plusieurs d'entre eux proposent quelques titres en téléchargement gratuit et vendent l'intégralité de leur album, et dans une qualité largement meilleure (FLAC ou WAV) sur d'autres plates-formes. La deuxième piste est bien entendu celle de la scène : il est clair que c'est, pour un artiste, la source principale de revenus, et quelque chose que l'on ne pourra jamais pirater.

Nous n'avons fait qu'effleurer l'étendue du phénomène qui, même s'il reste encore marginal, fait déjà preuve d'une grande diversité. Les deux plates-formes que nous avons présentées sont les principales, mais sont loin d'être les seules : des précurseurs, comme Magnatune, aux nouveaux venus, comme Airtist, les initiatives sont multiples, tout comme les artistes et les genres représentés (même si la musique électronique, forcément plus facile à réaliser avec un simple ordinateur, occupe une place importante). De là à dire que la musique libre est l'avenir, il y a un très grand pas que nous nous garderons de franchir. Mais il convient certainement de garder un oeil (et surtout une oreille) ouvert dans cette direction.
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