C'est bien une photo de Proton, mais ce n'est pas le décollage de Luch-Olymp K2 (mais celui d'un autre satellite en 2019). Crédits Roscosmos
C'est bien une photo de Proton, mais ce n'est pas le décollage de Luch-Olymp K2 (mais celui d'un autre satellite en 2019). Crédits Roscosmos

Une fusée Proton a décollé cette nuit de Baïkonour, transportant le satellite Luch-Olymp K2 en orbite… Un espion d'un genre particulier, dont le prédécesseur a fait couler beaucoup d'encre. Alors que la défense en orbite est d'actualité, voilà un véhicule qui sera observé avec une grande attention !

Malgré les discrétions de la Russie.

La Russie reçoit un nouvel atout

C'est un nouveau satellite relais, indiquent sobrement les communiqués russes, quand ils prennent la peine de détailler le rôle de Luch-Olymp K2. Selon sa désignation « officielle », Luch-5X serait en effet un satellite relais géostationnaire, capable de transmettre les signaux de satellites en orbite basse vers des stations de réceptions fixes. Mais voici un secret qui n'en est pas un : il s'agit bien du deuxième satellite Luch-Olymp, dont la spécialité est de venir « butiner » ou « renifler » les données à proximité d'autres unités en orbite géostationnaire, à 35 750 km d'altitude. Le décollage a eu lieu dans la nuit du 12 au 13 mars 2023 à Baïkonour, grâce à une fusée Proton qui a parfaitement rempli son rôle pour ce 4e lancement russe de l'année. Un décollage dans la plus grande discrétion, sans photographie diffusée, que ce soit pour l'arrivée sur le site de lancement ou pour le tir lui-même, les clichés figurant dans les annonces officielles étant reliés à d'anciennes campagnes.

Il ne va pas plaire à tout le monde

Mais alors, qu'est-ce qu'un satellite « butineur » ? Loin d'une image champêtre, il s'agit bien là d'un genre d'espionnage très particulier. D'abord, ces unités possèdent des capacités de manœuvre accrues, et de quoi percevoir leur environnement proche (radar, imageur de précision, autre) pour pouvoir voyager et dériver lentement près de cette ceinture de satellites que forme l'orbite géostationnaire sur l'équateur terrestre. On dit qu'il butinent, car ils vont d'un satellite de communication à un autre, à des proximités qui déclenchent parfois des récriminations diplomatiques. L'objectif est simple : avec ses antennes, un satellite comme Luch-Olymp K2 est capable d'intercepter les signaux montants et descendants de sa cible, et potentiellement de les masquer ou de les brouiller.

Peu de moyens contre les butineurs

Le premier satellite Luch-Olymp, lancé en 2014, est devenu la bête noire des opérateurs de satellites occidentaux et même des différentes entités militaires. On se souviendra des déclarations fortes de la ministre Florence Parly en 2018, qui avait montré l'approche de ce satellite venu « butiner » très près d'Athena-Fidus, satellite franco-italien dédié aux communications sécurisées. Cela avait servi d'argument lors de la création du nouveau commandement fusionné devenu l'Armée de l'Air et de l'Espace… tandis que les techniques de « butinage » sont des pivots des exercices militaires tels qu'AsterX. Voici donc que le successeur de Luch-Olymp arrive en orbite. Il y a de plus en plus de moyens pour le détecter et le suivre, mais les fameux petits satellites défenseurs de zone conçus spécialement pour lutter contre cette menace, français notamment, se font encore attendre. D'autres nations pourraient déjà avoir leurs propres « butineurs » en orbite, même s'ils sont peut-être plus discrets : la Chine et les États-Unis en tête…

Source : La Tribune