Vue d'artiste du Starship de SpaceX se posant sur la surface lunaire. © SpaceX
Vue d'artiste du Starship de SpaceX se posant sur la surface lunaire. © SpaceX

Ce n’est pas parce que l’agence américaine a signé d’importants contrats avec ses prestataires privés qu’ils seront prêts à temps. Le bureau des audits de la NASA pointe les retards du Starship de SpaceX, mais aussi des futurs scaphandres lunaires. L’agenda pour 2025 pourrait être bouleversé prochainement.

Une même semaine se termine sur deux sons de cloche différents... D’abord un directeur adjoint de la branche du spatial habité chinois, qui a confirmé que l’administration du pays communiste avait approuvé le plan pour que des astronautes de Chine aillent marcher sur la Lune avant 2030. Puis ce 30 novembre est paru le rapport public du GAO (le bureau des audits spécialisé de la NASA) sur l’atterrissage lunaire américain prévu pour 2025, mais qui ne pourra sans doute pas respecter cette date. Les agendas des deux grandes puissances spatiales se rapprochent !

D’abord on vise 2025, puis…

Lorsque le président américain Donald Trump a demandé à son administration de mettre en place un plan pour retourner marcher sur la Lune en cinq ans, les responsables et les spécialistes ont immédiatement pointé du doigt l’ampleur de la tâche. Sans fanfare, l’objectif de ce qui s’appelle désormais Artemis a ensuite été réorienté sur 2025. Et malgré la diversité des missions confiées à l’agence américaine, le retour des astronautes sur la surface lunaire est bel et bien devenu une priorité.

Politique, budgétaire, technique : la NASA a su répondre aux exigences ! La capsule Orion et son lanceur super-lourd ont effectué leur premier test l’an dernier avec Artemis I, et ce fut une ample réussite. La suite des opérations est limpide, avec un « tour de la Lune » de trois astronautes Américains et un Canadien à la fin de l’année prochaine. Reste que pour se poser sur notre satellite naturel, il faut deux autres éléments clés : l’atterrisseur lunaire HLS, et de nouveaux scaphandres. C’est là-dessus que s’est penché le GAO (Government Accountability Office) sur son dernier audit. Et ses conclusions ne sont pas tendres.

Même si ce n'est pas encore cette version qui emmènera des astronautes sur la Lune, la NASA attend des progrès rapides avec le Starship... Avant 2025 ! © SpaceX
Même si ce n'est pas encore cette version qui emmènera des astronautes sur la Lune, la NASA attend des progrès rapides avec le Starship... Avant 2025 ! © SpaceX

Des développements plus longs que prévu

« La NASA et ses sous-traitants ont progressé, et cela inclut le passage de plusieurs étapes importantes, mais elles font toujours face à de multiples obstacles dans le développement du HLS (Human Landing System) et des scaphandres », conclut le GAO. L’étude pointe notamment du doigt le Starship de SpaceX : ses deux premiers vols en 2023, ainsi que des travaux de développement plus éloigné du public ont permis de montrer des avancées significatives à la NASA… Mais il reste énormément à faire avant de pouvoir emmener des astronautes se poser sur la Lune. Au-delà d’une fiabilité vers l’orbite et dans l’espace qui fait encore défaut, le GAO pointe le défi majeur représenté par les multiples ravitaillements en ergols que le Starship lunaire devra recevoir en orbite basse avant de pouvoir se propulser vers la Lune. SpaceX n’aurait montré que « des progrès limités » sur le sujet. Ennuyeux, à moins de 2 ans de la mission supposée…

Selon le GAO, même le temps imparti à SpaceX lors de la signature du contrat était inférieur de plus d’un an au temps constaté jusqu’ici pour développer un véhicule habité au service des États-Unis.

D’autre part, le bureau des audits pointe les travaux d’Axiom Space, en estimant là aussi un retard sur le développement des premiers scaphandres lunaires produits en partenariat public/privé. La NASA a passé commande avec Axiom, qui devait à l’origine reprendre les travaux menés durant 14 ans dans les laboratoires de l’agence américaine. Mais depuis quelques mois, il semble que le matériel doit subir plusieurs modifications et améliorations pour prendre en compte tous les critères de sécurité liés à une sortie sur la Lune (y compris une réserve d’air d’une heure en cas d’urgence). Lesdites modifications, malgré la bonne volonté d’Axiom, vont faire prendre du retard au projet.

Ce n'est pas le tout de les produire, il faut aussi que les nouveaux systèmes internes soient modernisés... © Axiom Space

Si ce n’est pas 2025, alors ce sera quoi ?

2025 sera-t-elle une date impossible à viser ? Le GAO n’a pas de boule de cristal, le bureau est là pour mettre le doigt sur les problèmes de budget, d’agenda et de gestion de la NASA. Il livre néanmoins ses propres estimations, sur la base des progrès observés aujourd’hui, et conclut à une fenêtre possible en 2027. Si la NASA arrive à la même conclusion, il serait théoriquement possible d’intercaler une autre mission en lieu et place d’Artemis III et de passer l’atterrissage lunaire à Artemis IV, mais cela poserait d’autres problèmes. Il faudrait en effet modifier le contrat actuel des productions du lanceur géant SLS, Artemis IV devant pour l’instant utiliser un nouveau matériel (l’étage supérieur EUS).

Nul doute que 2024 sera une année pivot pour le programme, et ce, d’autant plus du fait des élections présidentielles à venir : ce sont les politiciens qui fixent chaque année le montant alloué à l’agence américaine. Depuis le 1er octobre, comme les représentants et sénateurs américains ne se sont pas mis d’accord, la NASA est financée par une résolution CR, c’est-à-dire qu’elle ne sait toujours pas son budget pour 2023-24 et qu’elle opère à l’aveugle sur un niveau de financement équivalent.

On n'oubliera pas qu'opportunément, une autre équipe développe actuellement un atterrisseur lunaire américain... © Blue Origin

En attendant, malgré leurs tarifs élevés, les contrats passés par la NASA avec SpaceX et Axiom sont budgétairement avantageux pour le contribuable américain : retard ou pas, les montants sont les mêmes. Au prix du calendrier ?

Source : CBS News