Live Japon : hommage aux robots ouvriers

16 février 2008 à 00h27
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Les robots humanoïdes nippons ont beau faire régulièrement du « buzz » sur internet chaque fois qu'un nouvel énergumène est montré à la presse, ce ne sont pas, loin s'en faut, les espèces les plus répandues. Leurs congénères qui bossent sans dételer dans les usines sont des milliers de fois plus nombreux et tout autant impressionnants. Rendons leur justice.

Un marché en plein essor

Sur un total d'environ un million de robots en activité dans le monde, 40% le sont au Japon, 30% en Europe de l'Ouest, et 15% aux Etats-Unis. Si l'on regarde plus en détail les chiffres, on constate que l'Allemagne totalise à elle seule près de 45% du nombre de robots employés dans les usines européennes et la France 10%, soit 3% de la population robotique ouvrière mondiale. Tous ces chiffres reflètent une autre réalité : celle des implantations d'usines sur un territoire donné. Alors que le Japon en fait pousser des dizaines chaque année (et pas des moindres), pour des produits électroniques et automobiles, entre autres, la France voit les siennes partir, à moins que les nippons Toray, Toyota et consorts n'en construisent. Pour autant, le taux de chômage au Japon reste plus de deux fois inférieur à celui de la France. Car si les robots remplacent ou secondent les hommes dans les tâches les plus ardues sur les chaînes de production, les humains sont toujours là pour les développer, les programmer, les contrôler, les maintenir, les faire évoluer...

L'industrie des robots japonaise, qui compte quelque 150 entreprises, se réjouit pour sa part de la montée en puissance des BRIC's (Brésil, Russie, Inde, Chine), VISTA (Vietnam, Indonésie, Afrique du Sud, Turquie, Argentine) et autres pays qui s'industrialisent et font un usage croissant d'automates. Selon l'association des fabricants nippons, le marché des robots d'usines va continuer de croître à un rythme soutenu pour atteindre 1.000 milliards de yens (6,5 milliards d'euros) en 2010, en valeur de production, contre 760 milliards de yens en 2007.

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Spécialiste des manipulateurs industriels depuis des décennies, le Japon profite à plein de la création, chez lui et dans les pays émergents, de sites de production pour l'industrie automobile et l'électronique, deux secteurs très gros consommateurs de main-d'oeuvre mécatronique. L'automobile absorbe plus d'un tiers de la production de robots, l'électronique (au sens large) presque autant, loin devant tous les autres domaines d'activités. « Les investissements dans les automates, en Chine notamment, progressent en raison de la fabrication croissante de téléphones portables, d'ordinateurs, d'écrans et autres produits », explique un responsable de l'association des roboticiens, Tokuro Iikura. La demande de robots dans l'électronique résulte entre autres des besoins pour le façonnage de dalles pour les écrans plats de toutes tailles et de galettes de semiconducteurs, pièces maîtresses qui ne peuvent pas être manipulées directement par l'homme. La productivité qu'ils donnent aux usines est une des raisons pour lesquelles le prix des TV à écrans plats et les baladeurs à mémoire baisse rapidement.



Le Japon, champion dans la robotique

Le Japon restera un certain temps encore le champion mondial des robots prédisent les industriels, soulignant que les sociétés nippones produisent leurs robots de la tête aux pieds, contrairement aux firmes étrangères comme le suisse ABB qui en sous-traitent souvent la fabrication. Les plus grands acteurs de la robotique industrielle japonais se nomment Fanuc, Yaskawa, Kawazaki Heavy Industries (plus connu pour ses motos ou pièces d'avions), Nachi Fujikoshi, Denso (une firme affiliée au groupe automobile Toyota) ou encore Mitsubishi Electric (également célèbre pour ses appareils électroniques et informatiques grand public). Yaskawa, le numéro un nippon, a grossi en concevant, initialement pour Honda, des robots sur-mesure parfaitement adaptés aux besoins de ses clients, alors que le deuxième, Fanuc, dont les machines se reconnaissent à leur couleur jaune « travaux publics », s'est développé grâce à un modèle de production de robots polyvalents en grande série. Yaskawa est aussi le leader mondial des pièces indispensables que sont les servo-moteurs, avec 20% du marché, tandis que Fanuc est aussi, voire surtout, le champion international des commandes numériques pour robots, avec la moitié du marché mondial à lui seul (les entreprises nippones dans leur ensemble en totalisant 70%).

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Fortes du rôle essentiel de leurs robots dans la production automobile et électronique, Fanuc (une société née de l'externalisation en 1972 de l'activité de commandes numériques naissante de Fujitsu), Yaskawa et les diverses firmes nippones du secteur cherchent aujourd'hui à séduire d'autres industries, en développant des automates de plus en plus sophistiqués et en conférant à leur créatures mécatroniques ouvrières, dignes de manga de science-fiction, des capacités nouvelles. Les dernières générations font montre d'une précision ahurissante, grâce à une bardée de capteurs sensoriels, à des logiciels d'analyse, à des micro-moteurs de plus en plus miniatures et à d'autres nombreuses technologies dans lesquelles excellent les Japonais.

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Des tâches rébarbatives remplies rapidement avec succès

Regardez-les, les trois, là, alignés, qui oeuvrent sans répit pour mettre en boîte des chocolats se présentant face à eux, en vrac et à vive allure sur un tapis roulant. Travail à la chaîne répétitif et rébarbatif, inhumain par excellence. Mais cette triplette de robots ouvriers, infatigables et corvéables à merci, rempli les boîtes sans grincher 24 heures sur 24, à raison de 300 chocolats ramassés et rangés à la minute, et pas un de manger au passage. Ces agiles bras articulés de Fanuc figurent parmi les dernières catégories d'automates embauchés dans des usines agro-alimentaires ou pharmaceutiques. Ils sont équipés d'un système de vision en trois dimensions pour voir arriver les chocolats et les attraper promptement au passage, sans vaines tentatives. La complexité est d'autant plus grande que les boîtes aussi défilent, en sens inverse, sur un autre tapis. Arrivées vides d'un côté, elles sortent pleines de l'autre, chaque robot remplissant une seule rangée de chaque.

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« Jamais un humain ne pourra aller aussi vite, et ce durant des heures sans interruption », se félicite un ingénieur de Fanuc, en présentant les exploits de ses trois phénomènes. Effectivement.



Une autre série de triplés, estampillés Nachi, trient des boîtes de conserves posées n'importe comment sur un support défilant : le premier attrape les miettes de thon, le deuxième le saumon et le troisième les sardines, sans jamais se tromper. Ils ont été programmés pour.

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Ailleurs, un autre engin s'escrime à trier des composants. Lui est encore plus doué que ses compères. A l'instar d'un enfant se concentrant pour poser des cubes, boules et autres volumes sur des formes géométriques correspondantes, cet impassible robot, qui travaille seul dans son coin, glisse une à une des pièces minuscules de différentes structures dans des espaces prévus pour les accueillir. On le voit réfléchir en approchant chaque composant au-dessus d'un emplacement, juger la pertinence de son geste (en jaugeant la taille de l'objet tenu et celui de l'emplacement) et, finalement, changer d'avis. A force de mesures et déductions successives, il trouve la bonne case.

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Chez Yaskawa, trois êtres mécatroniques à deux bras, les « Motoman », s'attellent à assembler un appareil de bout en bout, à la chaîne, en coordonnant leurs rythme et gestes. L'un ne commence à oeuvrer que lorsque le précédent lui a apporté l'objet sur lequel il doit effectuer telle ou telle manipulation avant de le porter à son collègue pour l'opération suivante. Bref, un vrai travail d'équipe. Contrairement aux tâcherons de Fanuc qui n'ont pas droit au repos, ces trois lascars semi-humanoïdes se voient offrir chaque année quelques moments de détente : ils jouent des percussions nippones « wadaiko » lors des « matsuri » (fêtes) de leur région du sud du Japon !

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Empruntant également à l'art japonais sa gestuelle esthétique et rigoureuse, le gigantesque "Artis" de Nachi (près de cinq mètres de haut) manipule des dalles de verre de très grandes dimensions, dans lesquelles seront découpés plusieurs larges écrans de télévision. Ce monstre de près de deux tonnes agit avec une précision de 0,3 millimètre, portant à bout de bras des panneaux ultra-fins d'environ trois mètres de côté qu'il tourne en tous sens dans les airs à une vitesse étourdissante.

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La célérité, c'est aussi ce dont se prévaut un robot inspecteur des travaux finis de Denso. Cette tête chercheuse imperturbable contrôle sous toutes les coutures des moteurs de voiture, tout juste assemblés, pour repérer une pièce manquante ou un composant erroné et relever les numéros et codes de chaque élément. Et ce en tournant autour de l'objet et en le manipulant sur un support rotatif pour tout photographier et analyser en temps réel.

« Sa rapidité et sa fiabilité, qui dépassent les capacités humaines, permettent d'améliorer la productivité d'une usine, de même que la qualité des objets », assure Denso. Dans une usine-modèle de Daihatsu, autre filiale de Toyota spécialiste des petites voitures, on assure avoir réduit de près de moitié la longueur des chaînes d'assemblage grâce à des robots multi-tâches capables de travailler ensemble et aux côtés des hommes. Les technologies développées pour ses automates industriels par une myriade de sociétés nippones de toutes tailles constituent en outre des éléments fondamentaux pour la création d'autres types de robots, androïdes, destinés à assister les particuliers. Mais dans un cas comme dans l'autre, l'un des principaux soucis des industriels concerne la sécurité, pour que l'autonomie grandissante des machines et leur cohabitation/collaboration avec les hommes ne constituent pas un danger pour ces derniers.
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