Faut-il acheter un moniteur 4K, maintenant ?

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Depuis l'Asus PQ321, premier moniteur 4k grand public que nous testions en octobre de l'année 2013, de l'eau a coulé sous les ponts. Si les 3 500 € demandés à l'époque réservaient ce pionnier aux early adopters fortunés, on peut aujourd'hui dégoter des moniteurs Ultra HD « premier prix » autour des 400 €. Mais attention, il y a quelques petites choses à savoir avant de se laisser tenter.

Ceux qui s'apprêtent à changer de moniteur ont peut-être noté que les écrans 4K ou Ultra HD sont désormais abordables. En excluant le Dell P2815Q, qui fait figure d'exception à 335 € sur le Marketplace d'Amazon, notre comparateur indique que le ticket d'entrée se situe en général autour des 400 €. Le choix devient plus conséquent vers les 500 €. Dans tous les cas, la 4K se décline essentiellement dans des diagonales assez grandes, rarement sous les 28 pouces. De quoi hésiter face à certains Full HD de 27 pouces à peine moins chers ? Oui, mais pas forcément pour les raisons suspectées, ni en la faveur de celui que l'on croit.

L'Ultra HD ça change quoi ?

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Sans trop s'étendre dans cette partie, nous allons simplement rappeler les tenants et aboutissants de l'Ultra HD, aussi dite 4K. L'appellation vient faire face à celle de Full HD, bien ancrée dans les esprits et les foyers. Elle désigne tout simplement une définition, quatre fois supérieure : 3 840 x 2 160 pixels contre 1 920 x 1 080 pixels. En multipliant par deux le nombre de points dans la largeur et dans la hauteur, on quadruple bien la définition.

L'écran 4K affiche ainsi 8,3 mégapixels quand le Full HD fait avec 2,07 mégapixels. Le résultat, c'est une finesse largement accrue, suffisamment pour qu'une vue normale (10/10e) ne soit plus capable de distinguer deux pixels contigus, une fois installé en face de son moniteur de PC, à une distance moyenne d'une soixantaine de centimètres. Sur un écran de 27 pouces en Full HD, en revanche, il faut plus d'un mètre de recul pour dépasser les limites d'un œil normal.

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Crédit photo apops (Fotolia) - infographie Clubic.com


En théorie, que vous promet un écran Ultra HD ?
  • Photo :
Avec des résolutions d'appareil photo où le gros du panier se situe entre 12 et 20 mégapixels, utiliser un écran 4K permet d'afficher une portion plus grande de l'image à zoom équivalent. C'est très appréciable quand on se met en taille réelle pour effectuer ses retouches ou contrôler des détails. La finesse du point sert davantage le rendu global, bref, c'est assurément mieux.

  • Bureautique :
Avec une densité d'affichage quasi doublée (environ 157 dpi sur un 28'' en 4K contre 82 dpi sur un 27'' en Full HD) sur une surface physique équivalente, on affiche beaucoup plus d'informations. Donc de fenêtres, de tableaux Excel, de pages Web, etc. C'est du confort, que les habitués du multi-écran connaissent, sauf qu'il faut ajuster l'affichage de ses polices pour que les yeux ne forcent pas trop. Et comme nous le verrons plus tard, ce n'est pas aussi simple que cela.

  • Film :
Regarder des vidéos en 4K sur un écran 4K, c'est beau ! Reste à trouver ces vidéos 4K... Le contenu commence à se développer, sur YouTube, via des services comme Netflix, ou par le biais des smartphones, qui filment de plus en plus en Ultra HD ; mais ce n'est pas encore la panacée. Et l'upscaling de films en 1080p donne plus un rendu Full HD que 4K. En même temps, quand on regarde un film, on prend souvent du recul : au-delà d'un petit mètre, on ne fait plus la différence entre du 4K ou du Full HD en 24 pouces. On a fait le test avec deux écrans côte à côte.

  • Jeu vidéo :
C'est le domaine où la 4K fait le plus parler d'elle. Quand on joue, on reste près de son écran : le bénéfice d'une définition accrue est réel. Un moniteur 4K garantit une immersion plus réaliste et des détails plus précis et fins, ce qui dans certains jeux de précision (FPS et simulateurs notamment) peut apporter un avantage non négligeable. Mais nous verrons aussi que jouer en 4K n'est pas à la portée de toutes les configurations, et donc de toutes les bourses.

Ces promesses peuvent être tenues si les conditions nécessaires sont bien remplies, mais, malgré tout, quelques bémols persistent, comme nous allons le voir.

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Les conditions requises avant de franchir le cap de la 4K

Passer sur un moniteur 4K ne fait malheureusement pas basculer, à coup sûr, dans le monde merveilleux de l'ultra haute définition. On doit d'abord s'assurer qu'on rentre dans les clous de deux prérequis techniques.

  • Connectique :
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    pour sortir à 60 images par seconde en 3 840 x 2 160 pixels sur un écran 60 Hz, il faut du DisplayPort 1.2 au minimum ou du HDMI 2.0. Cette dernière connectivité, encore peu répandue, n'est compatible pour l'heure qu'avec les GeForce GTX 970/980 (et bientôt sur la prochaine génération du haut de gamme AMD) et guère implantée sur les moniteurs 4K. Le HDMI 1.4, celui qu'on trouve majoritairement encore aujourd'hui, plafonne à 30 images par seconde en Ultra HD. Il vous faut donc une carte graphique avec DisplayPort 1.2.

  • Carte graphique :
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    la carte graphique doit assez puissante pour supporter les flux conséquents (quatre fois plus de pixels). Ce n'est pas vraiment un problème pour l'affichage statique, en revanche, pour le calcul des rendus en jeu vidéo, ou dans des films... Déjà, il faut au bas mot une Radeon HD 7700 ou une GeForce GTX 650 pour bénéficier du support de la définition 4K sur la connectique DisplayPort 1.2 mentionnée plus haut. D'autres cartes moins ambitieuses disposent de DisplayPort 1.2 mais ne prennent en charge que 2 560 x 1 600 pixels au maximum. Si le DisplayPort 1.2 est nécessaire à la transmission de la 4K, il n'en est pas pour autant garant.

Par ailleurs, la prise en charge matérielle du codec HEVC, qui est utilisé pour la 4K et devrait se démocratiser à l'avenir, constitue un plus pour soulager le processeur de l'ordinateur. Sans quoi, ce dernier devra être suffisamment puissant pour assurer l'encodage/décodage du HEVC. Mais pour l'instant, seule la GTX 960 assure cette fonction chez Nvidia ; et rien chez AMD. La firme au caméléon nous confie au cours d'une discussion non officielle qu'il n'y a pas d'urgence non plus, le contenu restant rare et le codec tout frais...

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Tests pratiques en jeu vidéo

A ce stade, nous avons décidé de conduire quelques tests pour illustrer notre propos, avec une configuration plutôt musclée mais à une seule carte graphique :

  • Carte mère Asus X99 Pro ;
  • Intel Core i7 5820K @ 3,3 GHz ;
  • Nvidia GTX 980 4 Go DDR5 ;
  • 16 Go de DDR4 G.Skills @ 2666 MHz ;
  • SSD Samsung 840 Pro 256 Go.

Le tout sur deux écrans 4K, un Dell 24 pouces (Dell UP2414Q) et un Acer 28 pouces (Acer XB280HK).

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A gauche, le Dell UP2414Q, à droite l'Acer XB280HK

Et quatre jeux à l'honneur : Dirt Showdown, FarCry4, Battlefield 4 et Assassin's Creed 4 Black Flag.

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L'idée est simple : nous voulons quantifier l'impact sur la fluidité des jeux, provoqué par le passage de la définition Full HD vers l'Ultra HD. Pour ce faire, nous mesurons le nombre de FPS, soit d'images par seconde (avec le logiciel Fraps) obtenu en jouant en 1080p, options graphiques réglées au maximum, puis avec les mêmes réglages en 4K. Nous effectuons chaque passage trois fois pour réaliser une moyenne des résultats, dans tous les cas de figure. Une triplette de séquences est également analysée en 4K, réglages à fond mais avec l'antialiasing désactivé. Pourquoi ? Parce qu'avec l'Ultra HD, on est en théorie supposé moins souffrir de l'aliasing (effet d'escaliers), donc on peut soulager un peu de GPU pour gagner quelques FPS. Et il y en aura besoin !



Sur Dirt Showdown, le moins exigeant de nos quatre jeux, le frame rate (taux d'images par seconde) s'effondre tout de même de 55,5 %. Certes, nous avons réglé l'antialiasing en MSAA 8X, le traitement le plus poussif existant. Sans antialiasing, en 4K, on obtient quasi 66 fps : c'est fluide mais l'effet d'escalier est alors visible. Il suffit de régler son antialiasing MSAA à 2X pour faire disparaître les hachures de lignes obliques, peu gênantes au demeurant, et il reste encore 61,5 fps en moyenne. Là, pas de souci. Le rendu global est beau, la netteté bien accentuée de l'image très plaisante. Toutefois, les textures du jeu ne sont pas vraiment élaborées : ce n'est pas là qu'on va profiter de tout le potentiel de la 4K.

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Sur Battlefield 4, ça ne rigole pas : on perd plus de 70% des fps ! Même en désactivant l'antialiasing, on ne parvient pas à dépasser le seuil fatidique des 60 fps en 4K. On notera que l'antialiasing, ici en MSAA 4X, pompe quasiment 20 fps sans donner de résultats probants en 4K. Mais ça ne suffit pas, il faut régler le jeu en élevé (58,5 fps) voire normal (92 fps) pour jouer confortablement. Et notamment pouvoir activer la V-Synch sur ce jeu très sensible au tearing (déchirement de l'image). Seulement en normal, le jeu devient beaucoup moins beau...





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FarCry 4 est un jeu encore plus exigeant qui mérite vraiment d'être joué en Ultra pour profiter des textures les plus fines et du voile atmosphérique ambiant délicieusement réaliste. Mais en Ultra, notre GTX 980 plafonne à 35,7 fps, une chute de 61 % par rapport au Full HD. L'antialiasing réglé par défaut en SMAA n'est pas foncièrement un problème pour la carte : en le désactivant on ne gagne que 3 fps. En revanche, l'effet d'escalier se fait alors plus visible que sur BF4 ou Assassin's Creed IV. On est loin du compte, il faut une deuxième carte graphique, ou jouer en 1080p en ultra.





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Le cas d'Assassin's Creed IV Black Flag est assez similaire à celui de FarCry 4. Avec la plupart des réglages à fond, notre configuration est à genoux. Cependant, on peut désactiver l'antialiasing (par défaut en MSAA 4X) sans trop souffrir de l'effet d'escalier et remonter à 47,5 fps. C'est plus jouable que FarCry 4... mais insuffisant. Cela dit, même en 1080p on se stabilise à 60 fps mais guère plus !

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Une seule GTX 980 se montrera un peu juste pour faire tourner des titres exigeants comme FarCry 4 ou Assassin's Creed IV dans des conditions optimales en 4K. Baisser la qualité en normal pour retrouver de la fluidité fait perdre énormément de travail sur les textures et effets d'ambiance, ce qui en 4K constitue un non sens : si on choisit un moniteur Ultra HD, c'est précisément pour exalter les graphismes, non pas pour brider le rendu. SLI ou Crossfire seront donc les armes à fourbir pour s'attaquer à la 4K dans de bonnes conditions. Mais la guerre coûte cher.





Sur FarCry 4 en particulier, on perd beaucoup à diminuer la qualité du rendu en dessous de... Ultra. Pensez à zoomer dans votre navigateur (Ctrl+ ou -) pour scruter au mieux la comparaison.


Les bémols que l'on observe dans la pratique

Votre machine est assez puissante pour digérer de la 4K, notamment en jeu vidéo ? Tant mieux ! Mais attention, si vous optez pour un écran 4K, et a fortiori, d'entrée de gamme, voilà quelques désagréments auxquels vous allez vous exposer.

  • Qui dit peu de contenu 4K dit upscaling : il est primordial de corréler contenu et affichage pour obtenir les meilleurs résultats. Quand l'écran dispose d'une définition supérieure à celle du contenu qu'on veut lui faire afficher, il faut opérer entre temps une mise à l'échelle ascendante (ou upscaling). C'est-à-dire une transformation de la définition. Celle-ci, d'ordinaire prise en charge par l'électronique de l'écran dans le monde des téléviseurs, est gérée par la carte graphique quand il s'agit d'un moniteur. Upscaler du contenu en 1080p sur un moniteur 4K fait perdre l'intérêt de l'ultra haute définition. Au mieux, on se retrouve avec un 1080p, en plus grand. Maintenant pour regarder un film - le cas de figure où l'upscaling joue son rôle - si vous vous mettez à 2 m de votre moniteur 28 pouces, vous ne verrez aucune différence.

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Test avec le film Super 8 en Full HD

  • High DPI : Pour que le bureau et l'environnement de Windows restent utilisables avec pareilles définitions, Microsoft a mis en place le réglage High DPI. L'idée, c'est de grossir les éléments d'interface, comme les icônes et polices d'écriture, pour préserver l'expérience utilisateur. Le hic, c'est que toutes les applications ne sont pas compatibles. Le client Origin par exemple, ou la visionneuse Xnview. Et quand l'échelle n'est pas adaptée, prévoyez la loupe ! Sur notre écran de 24 pouces, c'est assez insoutenable. Aussi nous vous conseillons de ne pas descendre en-dessous de 28 pouces en 4K, ce que les constructeurs s'évertuent à faire de toute manière.

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Après ajustement de la taille des éléments et de la police, on constate que toutes les applications ne sont pas encore compatibles

  • Techno en régression : alors que les moniteurs Full HD ont largement migré vers des technologies de dalle offrant une meilleure qualité d'affichage (IPS, VA), les écrans 4K d'entrée de gamme redonnent, eux, du service aux matrices TN, connues pour leurs angles de vision plus faibles. On se consolera en se disant que la technologie TN a l'avantage d'être rapide, mais tout de même...

Il n'est donc pas certain que l'achat d'un moniteur 4K amène la révolution attendue, l'acquisition pourrait même prendre des airs de cadeau empoisonné.

Couper la poire en deux avec du WQHD ou de l'Adaptative Sync ?

L'offre la plus alléchante pour l'instant se situe plutôt du côté des définitions intermédiaires, et notamment du WQHD, quatre fois la HD standard (soit 2 560 x 1 440 pixels). Un juste milieu qui force moins sur le matériel et accompagne bien l'accroissement de la diagonale à 27 pouces pour un utilisateur habitué au standard 23-24 pouces en Full HD. Car il faut bien avoir à l'esprit qu'accroître la diagonale sans toucher à la résolution condamne à augmenter le recul nécessaire pour percevoir une qualité équivalente. C'est faisable sur une télé, plus délicat avec un moniteur utilisé sur un bureau, à portée de clavier et de souris. Pour ceux que la notion d'acuité visuelle intéresse, le site du Dr Damien Gatinel, grand spécialiste en ophtalmologie et amateur de high-tech, est une mine d'informations passionnantes.


L'autre option si vous êtes de ceux qui voudraient absolument un moniteur 4K mais seraient un peu court en termes de budget pour se payer une configuration multi GPU, c'est de privilégier un moniteur G-Sync. Là, la technologie de Nvidia fait tout à fait sens : la 4K contraignant à des frame rate en-dessous des 60 fps même avec une GTX 980, il est impossible d'activer la synchronisation verticale sans d'atroces saccades et retards d'affichages. La technologie G-Sync va alors adapter le rafraîchissement de l'écran sur le débit du rendu d'image tenu par le GPU : le déchirement disparaît, les saccades et retards sont réduits au minimum. C'est rudement efficace sur l'écran Acer XB280HK que nous avons utilisé. Et pour amateurs d'AMD, les moniteurs Adaptative-Sync arrivent, voire sont déjà là !

L'Asus ROG Swift PG278Q est un excellent moniteur 27 pouces en 2 560 x 1 440 pixels, avec rafraîchissement à 144 Hz et technologie G-Sync. En revanche, l'écran n'est pas donné : 750 € !
Disponible en précommande, le BenQ XL2730Z comptera parmi les tous premiers écrans Free Sync (technologie AMD basée sur le nouveau standard VESA Adaptative Sync) du marché. Une dalle de 27 pouces en 2 560 x 1 440 pixels, rafraîchie à 144 Hz et délivrant un temps de réponse de 1 ms. Il faudra compter 700 € maximum au lancement.
On ne connait pas encore son prix, mais cet XG270HU sera une bonne alternative au modèle de BenQ. Là-aussi, il s'agit d'un 27 pouces en 2 560 x 1 440 pixels à 144 Hz et en 1 ms, compatible Adaptative Sync !
L'iiyama ProLite B2888UHSU-B1, après une mise à jour gratuite à faire effectuer par le constructeur, est supposé devenir le premier moniteur 4K Adaptative Sync. 28 pouces, 3 840 x 2 160 pixels, 1 ms pour un tarif sous les 500 € !






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