Des chercheurs auraient découvert une corrélation entre éruptions solaires et séismes terrestres

08 septembre 2020 à 22h00
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soleil

Un nombre important de protons issus de l’activité solaire et bombardés sur Terre, pourrait entraîner une forte activité sismique dans les 24 heures qui suivent.

Malgré son air paisible, lorsqu’on le regarde doucement se lever et se coucher depuis notre observatoire terrestre, le Soleil est en réalité en perpétuelle effervescence, avec des périodes plus ou moins agitées : le timelapse de dix ans d'activité solaire partagé par la NASA, il y a quelques semaines, en est une belle illustration. De fait, notre étoile ne se gêne pas pour mitrailler les alentours avec son vent solaire chargé de particules énergétiques.

Si les éruptions solaires perturbent parfois les systèmes GPS ou les réseaux électriques, une étude publiée récemment dans la revue Nature impute au Soleil une autre responsabilité : celle des séismes terrestres.

Une étude basée sur des données statistiques

Les chercheurs de ce rapport sont partis du postulat suivant : les tremblements de terre se manifestent généralement par vague, dans des intervalles de temps rapprochés. À partir de là, ils ont essayé de déterminer si un phénomène global pouvait expliquer cette singularité. Parmi les potentiels éléments observés : le Soleil.

Giuseppe De Natale, directeur de recherche à l'Institut national de géophysique et de volcanologie de Rome et co-auteur de la nouvelle étude, explique : « Les grands tremblements de terre du monde entier ne sont pas répartis de manière uniforme... Il existe une certaine corrélation entre eux. Nous avons testé l'hypothèse selon laquelle l'activité solaire pouvait influencer l'occurrence des tremblements de terre dans le monde entier ».

Afin de vérifier cette hypothèse, l’équipe a comparé vingt ans de données recueillies par le satellite SOHO (Solar and Heliospheric Observatory) de la NASA-ESA, avec les données issues du registre des tremblements de terre de l’ISC-GEM, un catalogue des séismes forts ayant eu lieu dans le monde entier.

Résultat : les scientifiques auraient trouvé une corrélation entre l'occurrence des séismes et l’augmentation du nombre de protons solaires entrants dans l'atmosphère. Concrètement, selon l’étude, lorsque le nombre de protons provenant du Soleil bombardé sur Terre est à son maximum, les tremblements de terre d'une magnitude supérieure à 5,6 sont légion au cours des 24 heures qui suivent. Or, d'après Giuseppe De Natale, « ce test statistique de l'hypothèse est très significatif. La probabilité qu'il s'agisse d'un hasard est très, très faible - moins de 1 sur 100 000 ».

Le phénomène de piézoélectricité

Pour expliquer cette corrélation les scientifiques évoquent le phénomène de piézoélectricité. Ce terme compliqué désigne un mécanisme plutôt commun, que vous avez sûrement déjà expérimenté avec un simple allume-gaz : lorsque vous exercez une pression sur un tel appareil, il se créé un arc électrique qui permet d'enflammer du gaz. La piézoélectricité désigne ainsi la propriété qu'ont certains matériaux à se polariser électriquement lorsqu'on leur applique une contrainte mécanique ; et à l’inverse, à se déformer lorsqu’ils sont soumis à un champ électrique.

Dans le cadre des séismes, le matériau soumis à la piézoélectricité est le quartz, une roche très présente dans la croûte terrestre qui, compressée, libère une impulsion électrique. C'est d'ailleurs ce qui explique l'enregistrement d'événements électromagnétiques, comme des ondes radio ou de la foudre, lors de certains tremblements de terre.

Selon certains chercheurs, les tremblements eux-mêmes induisent ces phénomènes, mais pour d’autres, qui s’appuient sur le fait que ces phénomènes électriques ont parfois lieu juste avant les séismes, au contraire, le lien entre réactions électromagnétiques et tremblements de terre reste à prouver.

De leur côté, les scientifiques de l’étude dont il est ici question considèrent que ces impulsions électromagnétiques seraient capables de déstabiliser des zones déjà proches de la rupture ; et donc de causer les séismes. Autrement dit, ils estiment que les anomalies électromagnétiques ne sont pas simplement la conséquence des séismes, mais peuvent en être parfois la cause.

C’est en ce point que le lien avec notre étoile et l’effet piézoélectrique inversé s’établit : les protons émanant du Soleil et entrant dans l'atmosphère terrestre propageraient des courants électromagnétiques à travers le globe, lesquels déformeraient le quartz de la croûte terrestre et favoriseraient donc le déclenchement des séismes dans des zones déjà sous tension.

Une étude contestée

Ce n’est pas la première fois que des scientifiques tendent à trouver une corrélation entre l'activité de notre étoile et certains tremblements de terre. Déjà, en 1853, l’astronome suisse Rudolf Wofl avait entrepris d’établir un lien entre les taches solaires à la surface du Soleil - synonymes d’activité magnétique intense - et les séismes terrestres. Au fil des années, d’autres chercheurs ont essayé de confirmer ce type de relations, sans toutefois apporter de preuves suffisantes.

Par conséquent, ces théories restent sujettes à caution et ne font aucunement consensus. En 2013, un article référence sur le sujet, publié dans le Geophysical Review Letters, examinait 100 ans de données sur ces phénomènes. Il concluait à une absence de lien entre l'activité solaire et les tremblements de terre.

L’étude publiée dans Nature cet été est déjà remise en cause par des chercheurs qui ne partagent pas cette vision. Par principe, certains scientifiques se méfient des recherches basées uniquement sur l'analyse statistique de données ; d’autres jugent les données choisies non pertinentes. Jeremy Thomas, chercheur à la NorthWest Research Associates, stipule : « Les résultats [du nouvel article] ne vous disent pas à eux seuls qu'il existe un lien physique réel. Il pourrait y en avoir un, mais je ne pense pas qu’il le prouve ».

Il faudra donc attendre que de nouvelles études viennent confirmer ou infirmer ces hypothèses ; d’ici quelques années, peut-être, la sismologie devra aussi regarder du côté du Soleil pour affiner ses prédictions !

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Commentaires (6)

Wen84
Bref, ils ont trouvé une corrélation… Ce qui ne prouve ou ne démontre pas grand chose.
Bombing_Basta
Les chercheurs de ce rapport sont partis du postulat suivant : les tremblements de terre se manifestent généralement par vague, dans des intervalles de temps rapprochés.<br /> On peut aussi se dire qu’un mouvement de plaque, qui est à l’origine d’un tremblement de terre, entraine le mouvement des plaques alentour puisqu’elles sont toutes en contact entre elles, et donc des tremblement secondaires, sans parler des ondes de choc qui se propagent dans la lithosphère.<br /> Alors peut-être que les éruptions solaires sont un facteur, mais peut-être que si c’est le cas, ce n’est pas le seul facteur.
notolik
Une irruption solaire provoque une tempête géomagnétique (en plus de tout le reste). A cette échèle c’est pas déconnant que ce rayonnement agisse sur la matière de manière perceptible.<br /> C’est la pichenette qui libère la tension accumulée, çà ne précipite que quelque chose qui allait arriver de toute façon (le lendemain, dans 5 ans,…).<br /> Du coup c’est presque bénéfique car «&nbsp;déclencher&nbsp;» un séisme permet qu’il soit moins fort (que plus tard).
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