Live Japon : love-hotels, la débauche de technologies

27 décembre 2010 à 16h12
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Que vous ayez ou non déjà séjourné au Japon, sans doute avez-vous entendu parler des love-hotels ? Comme le dessine avec un certain romantisme notre mangaka nippon surnommé Jean-Paul Nishi, ces lieux où l'on se rend a priori en couple pour faire l'amour sont aussi l'un des meilleurs endroits pour bénéficier d'un confort exceptionnel inabordable au commun des Nippons. Dans la débauche de technologies les plus osées et avancées réside depuis toujours le facteur-clef d'attractivité de ces établissements pour les couples de tous âges, légitimes ou non.

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Les love-hotels, lieux de délire et de plaisir, qui se reconnaissent à leurs noms extravagants et façades tape-à-l'œil, sont présents dans tout le Japon. Ils existent grosso modo depuis un demi-siècle et remplissent un réel rôle social en permettant par exemple à de jeunes amoureux non mariés de pouvoir goûter les délices charnelles alors même qu'il est difficile pour l'un et l'autre d'accueillir son adoré(e) au foyer parental. Le Japon totalise plusieurs milliers de love-hotels, disséminés en pleine campagne ou regroupés dans les quartiers de grandes villes. A Tokyo, on en dénombre une bonne centaine dans le périmètre appelé Kabukicho de l'arrondissement de Shinjuku, plusieurs dizaines près des gares de Shibuya, Ueno ou Ikebukuro, et des douzaines dressés ailleurs dans la capitale. Contrairement à ce que d'aucuns pourraient hâtivement penser, tous ces établissements ne sont pas tenus par des yakuza, mais beaucoup sont gérés par des petits propriétaires de pas-de-porte des plus honnêtes qui ont investi dans ce type d'activité car elle est plus lucrative que celle des classiques hôtels. Des ryokan (auberges traditionnelles japonaises) ont ainsi été convertis en love-hotels dont la particularité est qu'ils affichent un taux de remplissage quotidien de 200, 300 ou 400 % puisque plusieurs couples peuvent s'y succéder au long d'une même journée. Ces hôtels, où l'on paie pour un moment dit de repos (en général 3 heures) ou pour une nuit (par exemple de 22h à 11h), sont bien sûr destinés à s'adonner à des activités sexuelles, mais ils ne sauraient pour cela se contenter d'offrir un simple lit. Ce que souhaitent les clients, c'est d'abord un environnement érogène qui les sorte de l'ordinaire.

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Depuis l'origine, les love-hotels sont de fait des lieux où les amoureux peuvent bénéficier d'un confort et d'équipements qu'ils n'ont pour la plupart pas encore à domicile, voire ne possèderont jamais. Dans les années 1960, il s'agissait par exemple de la télévision en couleur et du climatiseur. Par la suite sont venus les lits ronds tournants trônant au milieu de chambres aux murs et plafond couverts de miroirs donnant mille reflets des scènes nuptiales. Des lits électriques, qui ne le limitaient pas à jouer aux tourniquets mais secouaient et se contorsionnaient de mille façons, ont également alimenté la chronique, avant que le tout ne soit interdit. On trouve certes encore des lits circulaires dans quelques établissements, mais désormais ils ne virevoltent plus.

Concrètement, quels équipements sont aujourd'hui proposés dans les love-hotels de Tokyo ? Rendez-vous à Shinjuku. À quelques centaines de mètres de la gare homonyme, le regard est happé par des immeubles à l'architecture ostentatoire appelés Hotel Stellate, Ray Rooms, Colorful, Bagus, Balian Island, La Mode, ou encore Pasha. Ce dernier est un des plus cossus, sachant qu'un love-hotel qui se respecte est tenu à une modernisation tous les trois ans environ. Comme nombre d'établissements, le Pasha arbore un hall au décor le plus rutilant. Ici comme ailleurs, le choix de la chambre se fait sur un large panneau lumineux (sorte d'écran tactile) où sont présentés les photos et détails de chacune d'elles, aucune n'étant semblable à une autre. Ne restent allumés sur le présentoir que les images des chambres disponibles. Une fois la sélection opérée, Il faut aussi décider entre « kyukei » (repos) et « shukuhaku » (nuitée). Le paiement peut se faire via une borne, mais dans le cas du Pasha, l'on passe à un guichet où se trouve une personne qui est censée ne pas voir le visage des clients et dont on ne connaît pas la figure. L'on prend ensuite le chemin de la chambre, laquelle se signale par une enseigne clignotante à l'entrée. Rien ne met a priori mal à l'aise, sauf certains couples dépareillés que l'on croise dans les couloirs avant de s'isoler dans son propre espace.

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Dès que l'on franchit ladite porte, on comprend que l'on ne se trouve pas dans un hôtel de bord d'autoroute pour un vulgaire « 5 à 7 ». La surface de la chambre (40, 50 ou davantage encore de mètres carrés dans le cas du Pasha), la taille du lit, les équipements, les meubles et la décoration vous font davantage penser à une suite d'un grand hôtel de luxe moderne de type Mandarin Oriental. A première vue, si ce n'est l'absence de fenêtre, peu d'indices laissent penser qu'il s'agit d'un endroit délibérément destiné à susciter le désir sexuel, du moins jusqu'à ce que soient découverts et exploités les ressorts matériels des lieux. Tous les appareils installés sont de marques japonaises réputées, un facteur essentiel pour les Nippons.

Téléviseur plasma 50 pouces Panasonic (ou projecteur dans certaines chambres), lecteur DVD Sharp, chaînes audio et vidéo à la demande, purificateur d'air à ions négatifs, toilettes électroniques entièrement automatiques siglées Toto (le numéro un du secteur), système audio 5.1 Denon ainsi qu'enceintes stéréo de plafond Bose, machine à karaoke, jeux de lumières (5 ambiances) avec télécommande encastrée à proximité du lit, four à micro-ondes, réfrigérateur, bouilloire. Tout y est digne d'un palace, lieu où ne se rendront pas les jeunes couples tokyoïtes, alors qu'ils peuvent facilement passer une agréable nuit dans un love-hotel sans se ruiner ni se déshonorer. Pour que les filles aient en outre peu de réticences à suivre leur chéri (ou compagnon d'une nuit) dans un tel endroit, l'accent est souvent mis sur les équipements de la salle de bains, l'hygiène, les produits de toilette et soins offerts et les divers accessoires à disposition.

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La baignoire géante à jets, bulles et éclairage multicolore avec TV murale figurant dans le manga de l'ami Nishi a bel et bien été vue au Pasha. Un sauna privé était adjacent à cette très spacieuse salle de bain, avec douche de plusieurs mètres carrés, que peu de Japonais peuvent se payer. S'y trouvait aussi un matelas de massage, en complément d'un fauteuil masseur électronique dernier cri posé dans la chambre.

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Outre les équipements installés de façon fixe, il est souvent aussi possible de louer dans les love-hotels des appareils complémentaires Sont entre autres communément disponibles sur demande des consoles de jeu vidéo de salon Wii de Nintendo ou Playstation 3 (PS3) de Sony, un ordinateur portable ou encore des chargeurs de téléphone portable. Il y a 30 ans, les love-hotels attiraient déjà les clients avec les consoles Famicom de Nintendo. Récemment, aux divertissements vidéos, s'ajoutent d'autres gadgets électroniques appréciés des couples romantiques, comme des mini-planétariums pour étoiler le ciel de la chambre ou de la salle de bain. Au Pasha, le prix de la chambre décrite (18 000 yens pour la nuit avec, en plus de l'appareillage high-tech, un lit de 180 x 200 cm, un canapé, etc.) comprend un petit déjeuner. Pour le dîner, sur commande à toute heure, la carte est digne de celle d'un grand restaurant, les love-hotels ayant apparemment des accords avec divers restaurateurs pour se faire livrer des mets sur demande.

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La lecture du « bouche à oreille » sur les sites internet dédiés (de très bonne tenue, soit dit en passant) confirme que les love-hotels les plus prisés sont ceux qui disposent des équipements les plus haut de gamme tels que ceux du Pasha, situé dans la catégorie élevée. Ces établissements, qui sont souvent conçus par des architectes spécialisés, achètent vraisemblablement des lots pré-constitués d'équipements, émanant de grands groupes d'électronique et électroménager nippons, ce qui leur permet de bénéficier de tarifs plus avantageux. Contre toute attente, et contrairement à ce que nous avions pu observer il y a une dizaine d'années, au-delà des décorations très colorées et de l'ajout de quelques objets un peu troublants, les chambres totalement délirantes se font cependant de plus en plus rares. Il se trouve bien sûr des lieux pour des pratiques perverses, mais ils sont loin de représenter la majorité. La tendance est davantage au grand luxe, lequel peut avoir la forme moderne du Pasha, avec des chambres très stylisées, ou bien embrasser la tradition nippone, pour se rapprocher du ryokan, mais doté des dernières technologies. Pour voir de quoi il en retourne le cas échéant, nous nous sommes aussi rendus au Takemine, un love-hotel situé à quelques centaines de mètres de la gare de Takadanobaba à Tokyo. Ici, la salle de bains est du même type que celle du Pasha (système de vapeur parfumée en plus), mais le décor de la chambre radicalement différent, similaire à un appartement de deux pièces au sol couvert de tatamis. Cet espace, salon typiquement japonais et chambre avec un lit à l'occidentale, se loue pour 19 500 yens (175 euros), petit-déjeuner japonais compris, pour 13 heures (22h à 11h).

S'y trouvent entre autres, trois téléviseurs à cristaux liquides (LCD) au total, un jeu de lumières ajustables, un fauteuil de massage très haut de gamme, etc... Particularité : la plupart des chambres comprennent une sorte de jardin japonais. Se cachait aussi dans la chambre du Takemine ce que l'on nomme généralement une « konbini box », mini-distributeur à plusieurs compartiments enfermant chacun un gadget sexuel payant de plus ou moins bon goût. Dans ce lieu, on règle son compte via une machine de paiement électronique reliée à un serveur central et dans laquelle on glisse en liquide le montant dû (ou une carte bancaire) avant de quitter la chambre. Et l'automate en question de vous dire poliment: « Nous espérons que vous avez passé un bon moment, rentrez bien et revenez ». Sûr qu'il faut plus d'une nuit pour utiliser pleinement tout l'attirail technique proposé, à moins de ne faire que cela en délaissant un peu son partenaire. Notez que dans ces lieux aussi sont proposés des programmes de « fidélité » à points, dotés de récompenses somptueuses pour les plus assidus.

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Si le nerf de la guerre pour les love-hotels est donc assurément, et depuis toujours, le niveau d'équipements high-tech qu'ils proposent (y compris bien entendu une panoplie érotique plus ou moins truffée d'électronique), il reste peut-être quelques petites lacunes à combler. Les mélomanes aimeraient y trouver un système audio qui puisse par exemple accueillir un baladeur iPod pour écouter, via l'installation audio en place, une liste de lecture personnelle. A défaut, on pourrait envisager la mise à disposition d'un iPad (ou équivalent) avec un accès à une chaîne de musique en flux via laquelle on puisse réellement opérer une sélection de morceaux (et non se limiter à un genre donné). La présence d'un réseau Wi-Fi serait aussi sans doute appréciée par nombre de pensionnaires.

Bref, les love-hotels, qui se portent mieux que tout en période de crise, ont encore des marges d'évolution, mais rien à envier à nombre d'hôtels classiques souvent plus coûteux pour une seule nuit. Bonne fin d'année. A vos amours.
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