L'ESA se prépare au survol de la Terre le plus délicat le 27 novembre

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
19 novembre 2021 à 14h55
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Vue d'artiste de la sonde Solar Orbiter de l'ESA (avec participation NASA), équipée d'un imposant bouclier. Crédits : ESA
Vue d'artiste de la sonde Solar Orbiter de l'ESA (avec participation NASA), équipée d'un imposant bouclier. Crédits : ESA

La sonde européenne Solar Orbiter, en transit depuis février 2020, va officiellement démarrer sa campagne scientifique. Mais avant, il lui reste à survoler la Terre, dans un freinage gravitationnel qui la fera passer à seulement 460 km de la surface. Un record, et une manœuvre à préparer avec attention !

Le test antisatellite russe n'arrange rien…

Une Formule 1 traverse l'orbite terrestre

Les équipes de l'ESA qui s'occupent de la sonde Solar Orbiter sont encore en phase d'observation avancée. Il leur reste quelques jours pour décider, en fonction des simulations et des prévisions de trajectoire des différents catalogues d'objets en orbite, s'il faut ou non faire une dernière petite manœuvre de correction. Car Solar Orbiter s'approche de la Terre à grande vitesse : une différence relative de plus de 35 000 km/h !

La sonde arrive dans la zone d'influence gravitationnelle de la Terre pour s'y freiner, et optimiser son parcours dans le Système solaire. Or pour économiser un maximum d'ergols (le carburant de Solar Orbiter), il est super pratique de pouvoir la faire passer au plus près de l'atmosphère terrestre. Près… très très près : 460 kilomètres seulement. Un record jusqu'ici tenu par la sonde Juno, en route vers Jupiter en 2013 (520 kilomètres environ).

Éviter le jeu de billard

Pour cette approche, l'agence spatiale européenne doit prendre beaucoup de précautions. Même si elle n'est pas spécialement alignée sur l'équateur, Solar Orbiter va traverser comme un bolide la « bande » de satellites en orbite géostationnaire (en s'approchant et en s'éloignant), avant de s'approcher beaucoup plus proche de la Terre, directement au milieu de l'orbite basse et de ses très nombreux satellites.

De quoi tenter de savoir très précisément où la sonde va passer, car il faut qu'elle évite les Starlink comme les autres satellites présents dans la zone, et même les débris qui s'y trouvent, y compris les milliers de morceaux de la récente destruction du satellite russe Cosmos 1408. Les dernières heures avant l'approche seront cruciales, notamment à cause de la vitesse de la sonde : elle passera de 460 km à plus de 36 500 km de distance en une heure à peine.

Même si elle passe très près de nous, Solar Orbiter ne sera pas visible dans le ciel de nuit. Crédits : ESA
Même si elle passe très près de nous, Solar Orbiter ne sera pas visible dans le ciel de nuit. Crédits : ESA

Un début de mission très réussi

C'est la dernière fois que Solar Orbiter va passer près de la Terre. Elle va perdre suffisamment de vitesse pour que son orbite, réduite, lui permette de modifier ses orbites suivantes en survolant Vénus. Cette fois, il ne s'agira pas que de freiner, mais aussi de changer son inclinaison. En effet, l'objectif scientifique principal de la sonde est d'étudier les zones solaires polaires, qui sont pour l'instant cachées de l'ensemble de nos capteurs. Et il faudra être patients, l'inclinaison suffisante ne sera acquise qu'entre 2027 et 2030.

La campagne scientifique, après une période d'environ un an d'étalonnages et autres essais, va rentrer dans son rythme de croisière dès le mois de décembre. En mars prochain, Solar Orbiter passera à seulement 50 millions de kilomètres du Soleil, une opportunité pour ses instruments de prendre des images deux fois mieux résolues que durant les passages précédents. Les équipes scientifiques attendent les résultats avec impatience.

Source : ESA

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (15)

SPH
On aura peut-être un joli feu d’artifice. Ca nous changera <br /> Nan mais, bonne chance quand même !
Garden_Dwarf
Question : à quelle température Solar Orbiter sera-t-elle soumise de la part du Soleil, lorsqu’elle sera à 50 Millions de kilomètres de celui-ci ?<br /> Vous avez 30 minutes ^^
ebottlaender
520°C<br /> (j’ai google)
Gweegoo
Je pense qu’on parle plutôt de freinage atmosphérique (forces de frottement avec l’atmosphère) que freinage gravitationnel (je ne sais même pas si ça existe). La gravité est plutôt utilisée pour l’accélération.
David_Rossi
Coucou <br /> La gravité terrestre (ou de n’importe quelle autre planète) peut être utilisée à la fois pour l’accélération ou le freinage. J’essaye de m’expliquer le plus clairement possible :<br /> Pour bien comprendre vous devez avoir acquis que tout objet sans aucune vitesse tombe en ligne droite sur l’objet par lequel il est attiré. Dans le reférentiel terrestre, par exemple, l’ISS doit maintenir une vitesse d’environ 27000km/h pour rester à son altitude (quelques frottements de l’air la freine, et lui font baisser sa vitesse). Si sa vitesse passait subitement à 0 km/h elle tomberait comme une pierre.<br /> Dans le référentiel du soleil, nous cherchons donc à faire freiner le satellite pour que celui ci baisse son orbite. Comment? en le faisant passer prêt de la terre avec une certaine trajectoire.<br /> Effectivement par rapport à la terre, le satellite va subir une accélération gravitationnelle. Mais ce n’est pas le cas par rapport au soleil! En le faisant accélérer dans le sens opposé de la terre, celui-ci va donc «&nbsp;freiner gravitationnellement&nbsp;» par rapport au soleil, lui faisant ainsi baisser son orbite solaire.<br /> Le freinage atmosphérique dont vous parlez n’est que très peu utilisé pour gérer les trajectoires suborbitales car il est très dangeureux (surpopulation satellitaire, masse d’air aléatoires).<br /> Dans notre cas, si le satellite passe si près, c’est justement pour pouvoir bénéficier au maximum de l’accélération gravitationnelle terrestre, et donc faire un freinage gravitationnel maximum par rapport au soleil.<br /> J’espère avoir été transparent <br /> Au plaisir de vous répondre<br /> Cordialement
Pck
@Gweegoo A priori, s’il y a l’accélération gravitationnelle pour une sonde à l’approche d’une planète,les causes produisant les mêmes effets, il parait logique qu’il se produise à l’inverse un freinage gravitationnel quand elle s’en éloigne… Sinon, il n’y aurait pas d’orbites ? Après, c’est aussi fonction de masses, d’angles, de distances et de vitesses … mais bon, je suis loin d’être spécialiste de cette science… bon , j’étais pas loin… Merci à DR
Nmut
Il faut voir l’accélération gravitationnelle d’une planète comme une fronde qui «&nbsp;chope&nbsp;» la sonde, l’accompagne en perdant un peu d’énergie et le relâche «&nbsp;de l’autre coté&nbsp;» (pour schématiser) plus rapidement qu’elle n’est arrivée. La décélération, c’est pareil mais la planète utilisée récupère de l’énergie de la sonde. Tout est question de point d’arrivée et de point de départ de la sonde dans l’attraction planétaire.
iksarfighter
Cette vidéo explique bien : How to Perform a Gravity Assist - YouTube
srochain
Oui mais Parker solar probe fait mieux!
Gweegoo
Merci, effectivement j’étais en train de chercher sans succès comment décélérer gravitationnellement. En fait, l’image est trompeuse. Pour décélérer, il faut que le satellite fasse demi-tour et que l’angle de la trajectoire retour soit supérieur de 90 degrés par rapport à l’aller. Sur l’image, on a l’impression que le satellite frôle la terre et je ne voyais pas comment il pouvait décélérer.<br /> Pour essayer d’aller un peu plus loin (en amateur), ne s’agirait-il pas d’une décélération relative? La vitesse par rapport à la terre reste la même mais en changeant de référentiel, la vitesse par rapport au Soleil a changé.
srochain
Non our les deux…tout depends de la trajectoire. Et surtout pas atmosphérique… Ça pourrait mal se terminer.
Gweegoo
Merci @srochain mais cette réponse à déjà été faite plusieurs fois. Je ne vois pas l’intérêt de répéter surtout lorsqu’on voit les commentaires qui expliquent pourquoi.
srochain
Non vous faisiez une confusion avec ce que mettent en évidence les loi de Kepler. Ici il s’agit d’emprunter du moment cinétique d’une planète pour modifier celui d’une sonde. Si la sonde est moins rapide que la planète quand elle entre dans son champ gravitationnel elle va être accélérer par la planète qui lui communiquera une petite partie de sa propre vitesse, ce qui l’accelerera. A l’inverse si la sonde est plus rapide que la planète par rapport au Soleil, la planète «&nbsp;retiendra&nbsp;» la sonde et la ralentira donc. OK ?<br /> Serge Rochain
Gweegoo
Merci @David_Rossi j’ai répondu un peu plus haut. En fait l’angle réel que prendra le satellite n’est pas celui que montre l’illustration. Il faut une sorte de demi-tour.<br /> Au final, est-ce que la vitesse par rapport à la Terre change vraiment? J’ai l’impression qu’il s’agit de vitesse relative: l’une par rapport au Soleil et l’autre par rapport à la Terre.
srochain
Excusez moi mais j’avais lu votre message en ignorant que plus loin d’autres messages donnaient une explication plus détaillé. J’espère ne pas vous avoir trop unportuné<br /> Serge Rochain
ebottlaender
Non, le satellite ne fait pas du tout demi-tour, et l’image dans l’article est juste.<br /> On explique la manoeuvre ici :<br /> Clubic.com – 7 Apr 20<br /> Assistance gravitationnelle : comment la sonde BepiColombo survole la Terre...<br /> BepiColombo, moteurs allumés durant son trajet. © ESA/ATG medialab; Mercury: NASA/JPL<br />
ebottlaender
Alors non, PSP ne fait pas mieux, puisque déjà elle ne survole pas la Terre plus proche que Solar Orbiter (c’est le sujet de l’article), et ensuite, elle n’a pas les mêmes capacités. Oui, PSP s’approche plus près du Soleil, beaucoup plus près. Mais c’est une sonde «&nbsp;in situ&nbsp;», donc ses instruments observent son environnement, ce ne sont pas des télescopes et autres instruments d’observation, ils font des mesures sur ce que traverse PSP.<br /> Solar Orbiter, elle, a la moitié de ses instruments qui sont «&nbsp;in situ&nbsp;» et l’autre qui est constituée d’instruments d’observation, en particulier des imageurs particulièrement performants, qui ont donné les premières images des «&nbsp;feux de camps&nbsp;» solaires à l’été 2020.
Gweegoo
Ok j’aurais appris qqch aujourd’hui. J’étais persuadé que la gravité ne pouvait que servir à accélérer, sans doute par la popularité du programme Voyager.<br /> Apparemment, j’ai quand même compris qqch avec la “vitesse relative” lorsque ça dit “ Elle a ralenti parce que pendant ce survol, la Terre se déplaçait, elle avait donc sa propre vitesse dans un autre référentiel”.<br /> Amicalement,
David_Rossi
Il s’agit tout à fait de vitesses relatives. Relativement à la terre la sonde va d’abord accélérer en se rapprochant de la terre, puis décélérer en s’en éloignant. Relativement au soleil, il faut utiliser l’attraction gravitationnelle terrestre pour obtenir une vitesse plus faible et ainsi baisser son orbite autour du soleil. je joins un dessin Paint tout bête. Sans titre1353×902 9.24 KB
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